2ème festival des évadés du bocal (du 8 novembre au 2 décembre)

 

Le festival des Evadés du bocal recommence. Merdre ! 

Evènement festif et critique, il prétend bousculer quelques-uns des processus normatifs qui trament nos sociétés et leur rationalité néo-libérale. Nous voulons nous emparer du champ de la folie comme analyseur de phénomènes beaucoup plus larges qui agissent sur le lien social. Nous souhaitons rendre possible une analyse critique de ces normes afin d’imaginer d’autres manières de vivre et penser l’accueil de l’autre, l’étrange, l’étranger, y compris celui qui est en chacun de nous.

Nous sommes un collectif d’artistes, de soignants, de patients, de personnes évoluant dans le champ des sciences humaines et sociales, de citoyens. Le festival est pensé pour évoluer au cœur de la cité ; pour cette deuxième édition, il se déroulera au théâtre du Lavoir Moderne Parisien dans le 18ème, au bar le Lieu-dit dans le 20ème, à l’Espace Khiasma aux Lilas et à la librairie l’Atelier dans le 20ème.

A travers le festival, notre horizon est de produire, d’inventer du commun, des constellations de pratiques et de pensées, d’oser une marche particulière qui nous conduise à percer les murs, décloisonner, refuser l’exclusion. Nous voulons, par le biais de cette chose qu’on appelle art, fabriquer des événements qui provoquent de la convivialité, qui questionnent nos postures et nos idées reçues. Nous voulons inventer de nouvelles manières de parler et d’agir ensemble. Trouver des outils d’analyse institutionnelle et des modalités d’action collective pour faire jaillir de l’autrement possible.

SITE OFFICIEL DU FESTIVAL LES EVADES DU BOCAL

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> Transmettre le mouvement de la PI c'est récuser l'arrêt sur image

Dans la dynamique de préparation des Assises que les 39 et les Ceméa organisent en 2013 (31 mai et 1er juin ) P. Chemla propose à la lecture ce texte qui amorce une élaboration sur la transmission de la PI mais aussi le combat pour la construction des Assises.

 

TRANSMETTRE LE MOUVEMENT DE LA PI C EST RECUSER L’ARRET SUR IMAGE

 

J’aborde cette intervention et ce colloque avec un sentiment d’urgence : urgence politique devant les menaces fascisantes de ces groupes qui tentent actuellement de nous faire taire et d’interdire de parler, penser, agir avec la psychanalyse et la PI.

Urgence aussi à transmettre dans un contexte où les représentations de la folie se trouvent bouleversées et se présentent comme une sorte de kaléidoscope : entre l’image du « fou à délier » de l’Asile traditionnel qu’une génération de psy a voulu libérer de ses chaines et celle du handicapé psychique qu’il s’agit de gérer et de normaliser, il semble bien qu’une constante demeure, celle de faire taire et de mettre au silence les témoignages et  la tentative que représente la crie de folie de trouver un lieu d’adresse. Envers et contre tout la Folie s’exprime à sa manière.

Entre temps la psychanalyse et la PI qui étaient « à la mode » il y a 40 ans et qui avaient de fait profondément transformé les représentations de la folie et de la prétendue normalité connaissent un discrédit dans les media mais aussi sur le terrain. Cela alors que les méthodes se réclamant d’une pseudo-scientificité s’appuyant sur la biologie ou le comportementalisme ont fait la preuve de leur peu d’efficacité : il n’y a eu aucun progrès significatif dans l’approche thérapeutique malgré les progrès des neurosciences.

Il s’agit donc d’une imposture mais tous ces discours occupent aujourd’hui une position dominante au point de vouloir éradiquer toute autre approche. Il y a les interdictions récentes qui exigent une mobilisation de notre part, mais elles ont été précédées par de nombreuses autres offensives : dois-je rappeler que l’enseignement de psychanalyse et de PI que nous proposions au titre de la Criée  à la fac de psycho de Reims a été purement et simplement supprimé voici 5 ans ? Comme dans de nombreuses facs maintenant, des psychologues sont formés sans entendre parler de Freud et à fortiori de la PI.

Bien plus grave : certains lobbys de parents d’autistes ont obtenu de la HAS la « non recommandation » du packing et de toute approche fondée sur la psychanalyse et la PI. Et même la promesse de généraliser cet interdit de penser à toute la psychiatrie !

Il s’agit à proprement parler d’une déclaration de guerre que l’on aurait bien tort de négliger en croyant qu’elle pourrait cesser à la faveur d’un changement de gouvernement. Car elle est le symptôme d’une défaite que j’espère provisoire de toute  pensée critique et de la promotion de « pensées » techniques et opératoires qui se prêtent aisément à l’évaluation, à la mesure de la performance et sont ainsi en sympathie profonde avec l’ordre néolibéral. Nous aurions bien tort de croire que ces attaques soient uniquement centrées dans le champ spécifique de notre praxis, alors qu’elles s’appuient sur une conception du monde et de l’humain qui envahit tous les espaces de la société.

Cette nouvelle raison du monde que Pierre Dardot a exposé à l’ouverture de ce colloque ne pouvait qu’entrer en collision frontale avec nos représentations de l’homme en tant que sujet parlant, divisé par son désir inconscient mais aussi inscrit dans une histoire à la fois personnelle et collective.

Cette intrication qui est le ressort crucial de notre praxis est absolument antagonique avec l’ordre néolibéral. Et les efforts pathétiques de certains analystes pour inventer des échelles d’évaluation afin de rivaliser avec les TCC sont bien à côté de la plaque d’enjeux bien plus radicaux.

La guerre nous est déclarée en termes d’éradication, et tout se passe comme si un grand nombre d’entre nous ne voulait rien en savoir au sens du refoulement, mais sans doute aussi du déni de réalité. Longtemps l’illusion a prévalu que nous pourrions traverser le tsunami en évitant le combat frontal et en préservant le noyau dur, autrement dit la psychanalyse. Nombre de collègues sont encore persuadés que cette crise est seulement celle de la psychiatrie, et certains ont même cru un temps que cela laisserait la place libre à une « clinique psychanalytique autonome » et délivrée de toute aliénation à l’ordre médical. Il y aurait beaucoup à dire de cette vision d’un progrès pour l’analyse qui consisterait à se délier de la médecine, pour promouvoir une « psychanalyse pure » prétendument détachée du registre de l’imaginaire pour viser le réel par le biais des mathèmes dont certains à l’ECF prétendent maintenant qu’ils permettent même de se passer du transfert et de raccourcir l’analyse.

Je n’insisterais pas sur cette dérive aberrante si elle n’avait pas envahi le champ de la formation avec une visée hégémonique, discréditant de fait la pratique d’une psychanalyse vivante qui nous permet de penser mais aussi de construire une représentation de notre travail. Sans un acte de foi sans cesse à relancer dans l’inconscient freudien, sans les praticables et constructions imaginaires que nous ne cessons de produire, nous ne pourrions tenir le coup et accueillir les patients, et en particulier les psychotiques et les borderline.

Avec eux nous sommes nous aussi mis à mal et questionnés dans nos fondations, nos croyances et préjugés, notre représentation de la folie mais aussi du transfert psychotique et de la PI.

D’où le détour que je vous propose par l’histoire, ou plus exactement par les moments qui auront marqué notre praxis.  Comment faire autrement que de nous appuyer sur les constructions qui ont marqué l’histoire de notre praxis, en particulier sur les praticables que nous avons pu inventer et qui ont pu soutenir un désir soignant mis en acte ?

Jean Oury témoigne d’une prise de position qui aura marqué un inaugural : avec Tosquelles, dans une transmission articulée avec l’enseignement de Lacan et de multiples apports hétérogènes, il devenait possible de subvertir les établissements et de promouvoir des institutions soignantes, ou tout au moins qui seraient support potentiel du soin psychique. Je le dis pour situer l’enjeu que je vais tenter de déployer : s’agirait-il de poursuivre de façon linéaire une fondation dont chacun sait ici la part de courage, et qui a pu tenir pour nous la place d’un mythe fondateur ? Je vais tenter de questionner ce qui ici pourrait passer pour une évidence et qui risquerait fort de nous conduire dans une impasse.

Une telle perspective risquerait en effet de fixer la figure de jean Oury ou celle de Tosquelles comme icone ou comme fétiche et de produire une mystification, voire une religiosité de très mauvais aloi.

Poursuivre comme si le temps n’avait pas passé reviendrait à croire à ce que les artifices inventés à l’époque par la PI soient perçus comme des invariants structuraux. Et comme ils deviennent de plus en plus difficiles à mettre en œuvre, une telle posture nous fixerait dans la déploration et la nostalgie d’un prétendu âge d’or. Nous avons beau savoir que cet âge d’or n’aura jamais existé ailleurs que dans nos pires moments de nostalgie, il n’empêche que nous aimerions y croire, et oublier l’extrême difficulté rencontrée par quelques-uns qui ont voulu promouvoir le désaliénisme et une praxis de l’analyse articulée avec la phénoménologie. Nous voudrions oublier aussi la lutte opiniâtre d’un Bonnafé arrivant sur le long cours à convaincre de la politique de secteur des gaullistes et des hauts fonctionnaires qui n’étaient pas du tout de son bord politique. Nous aimerions sans doute aussi escamoter les disputes violentes entre les courants de la PI, les scissions justifiées par des enjeux aussi forts que l’obligation faite par le PCF aux psychiatres qui s’en réclamaient de dénoncer la psychanalyse comme « un faux contre-révolutionnaire ». Sans compter la rupture du congrès de Sèvres sur l’enjeu crucial de la participation des infirmiers à la psychothérapie, et la réplique fameuse de Jean Oury : « les infirmiers ne sont pas des cons »…

Ce que je vous propose comme projet : lever en permanence le refoulement et le désaveu d’une histoire qui sinon deviendrait pure mystification, sans pour autant se tenir dans une sorte d’hypermnésie qui maintiendrait le passé comme une chape de plomb paralysante. Mais aussi  refuser « de faire du passé table rase » avec les conséquences tragiques qu’une telle posture entraine…

Se tenir dans une transmission consisterait à nous écarter sans cesse de ces deux écueils pour continuer à penser, créer, agir. Nous ne voulons aucunement d’une tabula rasa pas plus que d’une histoire monumentale.

Je voudrais ici évoquer ma première rencontre avec Tosquelles en 1987 aux journées de St Alban. Nous y allions en équipe invités par Gentis, et ne connaissions personne de la bande de la PI autrement que par le nom. A quelques-uns nous exposâmes dans un atelier la pratique balbutiante du centre Artaud, le club extrahospitalier que nous avions construit depuis 1980, la lutte anti asilaire qui nous agitait, et aussi le récit clinique d’une psychothérapie à domicile d’une patiente psychotique qui d’ailleurs s’en est très bien sortie depuis…

Dans la salle je sentis monter une grande incompréhension, pour ne pas dire une certaine hostilité : ce que je racontais n’était pas très casher : la lutte contre l’asile et l’idée même d’un club extrahospitalier paraissaient condamnables pour une grande partie de l’auditoire, dont une grande partie soutenait explicitement qu’à moins de 100 lits d’hospitalisation on ne pouvait pas faire de PI, cela jusqu’au moment où un petit vieux assis au premier rang prit la parole avec un accent inimitable pour m’intimer l’ordre de ne pas répondre à tous ces « hystériques de merde ». Puis d’annoncer avec un enthousiasme juvénile qu’il s’agissait là du renouveau de la PI alors qu’il avait eu l’impression jusque-là d’être dans la posture d’un Buffalo Bill qu’on exposerait comme à la foire. Je venais de faire la connaissance de Tosquelles sur le mode de la tuche, et il avait donc saisi qu’il ne s’agissait pas de faire du clonage de St Alban, mais de produire le changement possible et nécessaire à partir des conditions concrètes de chaque époque. Les conditions de l’HP de Chalons nous empêchaient de faire à l’époque un travail dans l’intra, la notion de club thérapeutique était vomie par l’établissement et nous étions même moqués voire menacés physiquement par une majorité assez bruyante nous considérant comme des gauchistes en train de détruire l’hôpital, leur outil de travail. Il n’est pas inutile de rappeler cette séquence historique, car si nous avions raison de vouloir le changement, ceux qui nous critiquaient n’avaient pas non plus entièrement tort. Ils avaient tort bien sûr de défendre l’Asile dans toute sa cruauté sordide, mais ils avaient raison quant à la défense du service public. La suite a montré hélas comment notre discours a pu être récupéré par le néolibéralisme qui nous a instrumentalisé pour fermer des lits sans pour autant construire les lieux d’accueil ambulatoires que nous espérions.

Nous aurions ainsi à élaborer ce paradoxe de toute transmission, et à nous dégager d’une opposition binaire où le changement comporterait forcément l’idée de progrès, alors que la défense d’une position ancienne serait forcément rétrograde.

Il me semble que dans les combats actuels que nous menons, nous nous trouvons régulièrement affrontés à ces paradoxes, en ayant souvent tendance actuellement à préserver nos acquis quand nous en avons, tellement la conjoncture nous est défavorable. Or une telle posture par trop défensive est peu propice à la créativité et risque fort de stériliser ceux qui voudraient aujourd’hui se replier dans un lieu qui fut créatif un temps, mais qui pourrait bien vite se transformer en « forteresse vide ». De nombreux collègues ont ainsi récusé le travail en direction de la précarité, et toutes les nouvelles formes que la souffrance psychique emprunte pour s’exprimer, ainsi que les demandes sociales embarrassantes qui nous sont adressées, et nous obligent à des déplacements psychiques : travail avec les familles, avec les réseaux de santé mentale, avec les GEM etc…

A ce point de l’exposé je voudrais évoquer une deuxième rencontre personnelle que j’ai eu avec Tosquelles. Ce fut la dernière hélas, car après il mourut et j’aurais aimé poursuivre avec lui, mais elle fut moins gratifiante que la précédente. Je lui confiais mon projet, déjà à l’époque d’un colloque de la Criée à Reims sur la transmission pour faire valoir l’actualité de la PI. Or il se fâcha tout net en m’opposant la « permanence » sur le modèle de la «révolution permanente ». Comme certains le savent ici, j’étais d’autant plus fâché que je m’inscrivais sur ce bord-là du marxisme, et que j’étais ainsi taxé d’incompréhension radicale du politique par un maitre qui m’inspirait une grande admiration.

Oury a souvent développé depuis combien la structure du POUM aura pu servir pour Tosquelles de matrice aux formes imaginées pour la PI : la transversalité, autrement dit l’articulation permanente entre verticalité et horizontalité dans l’établissement doit beaucoup à cette conception d’un collectif qui refuserait d’aplatir sa multidimensionnalité. Donc pas seulement une dette politique/ la guerre d’Espagne, mais la source d’une gestaltung, d’une forme en mouvement qui laisse place aux vecteurs de singularité tout en soutenant la dimension du politique.

Peu après sans nous laisser trop démonter par la parole du maitre, nous organisâmes à Reims des rencontres de la Criée sur la transmission, et par ailleurs un livre parut sous la direction de Pierre Delion intitulé « Actualité de la PI » auquel notre équipe contribua activement : c’était notre perspective de travail.

Que dire de cette discorde apparente ? Sinon qu’elle révélait dans son malentendu même l’enjeu d’une transmission où le vif de la subversion institutionnelle se poursuivait avec d’autres mots que ceux du fondateur, voire même se relançait dans un nouveau contexte qui nous déclarait déjà has been.

L’enjeu d’une transmission ce serait cette fidélité à la méthode et surtout au mouvement qu’il s’agit d’impulser et de relancer. En aucune manière une fidélité à la personne du fondateur, ou pire à une fondation statufiée qui nous ferait en quelque sorte nous tenir dans un plan fixe, une sorte d’arrêt sur image : une image couleur sépia au charme désuet mais définitivement révolu. Cette fixité-là serait à mon avis à la source d’une posture de déploration qui a ruiné une génération de psychistes tournés vers un passé idéalisé et n’arrivant pas à affronter l’actuel. Cela nous ne pouvons le faire qu’avec notre manière d’être au monde, et surtout en tenant compte du contexte politique et institutionnel dans lequel nous nous inscrivons pour le meilleur et aussi pour le pire.

Nous aurions aussi à soutenir une fondation toujours en devenir, toujours à relancer contre le mirage inquiétant d’une fixation de l’origine ou de l’originaire, qui transformerait inéluctablement l’histoire en image pieuse et les journées de St Alban en pèlerinage au lieu de la révélation.

Ces préliminaires étant posés, il nous resterait à déployer les lieux nécessaires pour métaphoriser le changement, ou pour le dire plus précisément pour relancer le mouvement instituant.

Pendant longtemps nous avons pu nous imaginer qu’il suffirait de développer des lieux suffisamment accueillants, de conjuguer la verticalité de l’établissement avec la fonction club, et de soutenir une analyse institutionnelle permanente.

Cela d’ailleurs reste  vrai, je continue à le soutenir dans ma pratique comme dans mon enseignement, et pourtant je reste persuadé que cela n’a jamais suffi. Il n’y a qu’à constater la multiplicité des lieux que le mouvement de PI s’est donné au cours de son histoire : groupe de Sèvres,  GTPsy, Fiac actuellement etc… pour en déduire la nécessité de lieux d’élaboration extérieurs aux institutions. Ces lieux ont permis la confrontation et la dispute au sens noble de ce terme, mais aussi la confrontation au politique. Il parait en effet difficile à l’échelle d’un seul établissement même bien vivant de se faire une idée de la multiplicité des situations et de mener l’analyse nécessaire de la double aliénation. Concept clé que je garde sans cesse à l’esprit pour éviter tout rabattement unidimensionnel. Il y a une aliénation psychopathologique mais aussi une aliénation au politique (et non à la politique)  et nous aurions  à penser cette duplicité en terme de nouage hétérogène et non de compartimentation.

De plus nous avons à échanger avec ceux qui travaillent en dehors des institutions, et aussi en dehors de la psychiatrie : psychanalystes, mais aussi philosophes, écrivains, artistes, poètes qui explorent et éclairent un réel que nous partageons peu ou prou.

Cette nécessité de lieux tiers figure ainsi une extériorité ou plutôt une figure de bord sur le modèle de la bande de Moebius comme échangeur avec le monde.

Faute de quoi en restant repliés dans les institutions nous pourrions nous figurer une réalité illusoire à la mesure de nos fantasmes ou de nos hantises.

Or cette confrontation au réel est absolument indispensable dans notre travail psychothérapique avec la psychose quand nous tentons de reconstruire avec le patient un monde habitable. Ce qui me fait irrésistiblement penser à Winnicott se levant au cours d’une réunion de la société britannique de psychanalyse pendant la guerre pour déclarer « Nous sommes en train de subir un bombardement ». Cela alors que ses collègues continuaient leur discussion psychanalytique comme si de rien n’était…

C’est ce geste tout simple qui déterminera un point d’accrochage transférentiel avec Margaret Little. Celle-ci sensible à un tel sens du réel, décidera de lui demander une analyse dont elle a fait par ailleurs le récit remarquable ; moment paradigmatique assurément où l’attitude de l’analyste devant le monde permet l’ouverture du transfert psychotique. Rappelons que M.Little avait poursuivi plusieurs analyses, longues pour l’époque, qui lui avaient permis de devenir didacticienne sans pour autant apaiser sa souffrance et ses moments de déréliction.

Car les patients, et Margaret Little en témoigne très précisément dans le récit de son analyse avec Winnicott sentent très bien quand l’attitude de leur analyste est dans le « comme si », empruntée ou convenue. Et de nombreuses analyses menées sur ce mode, en copiant le maitre du moment, M.Klein à l’époque ou Lacan aujourd’hui, ne peuvent être que des analyses « comme si », passant à côté du vif du sujet, le laissant en souffrance d’un lieu d’adresse et de fiabilité.

Car il faudra en cabinet comme en institution tenir cette dimension de la fiabilité qui a toujours manqué au patient psychotique ou borderline : que l’on reprenne l’hypothèse winnicottienne de l’agonie primitive et de l’effondrement ou l’hypothèse lacanienne de la forclusion, nous butons toujours sur une zone de catastrophe, une zone de mort psychique au sens de Gaetano Benedetti.

Or pour traverser ces zones où les boussoles s’affolent, il faudra au patient un thérapeute et si possible un collectif suffisamment vivants, et lui offrant ce petit bout de monde fiable sur quoi il puisse poser ses pieds. Ce bout de monde ayant les plus étroits rapports avec « la fabrique du pré » dont parle Oury dans son séminaire sur « Création et Schizophrénie », un lieu du pathique qui tient d’un dire sensible, ou plutôt d’une conjugaison de dires lorsqu’il s’agit d’un collectif.

Nous savons que l’ambiance, la stimmung tiennent une très grande place dans cette sensation de vivance et de fiabilité qui ne trompe pas la sensibilité de ces écorchés vifs qui sont en attente d’un accueil humain. Et donc la construction permanente de la vie quotidienne est de la plus haute importance pour permettre qu’il y ait de la rencontre.

Mais nous savons aussi que la confusion des registres, l’absence de diacritique, constituent autant d’écueils dans cette construction. Affaire de tact, d’adresse et pas seulement de théorie. Certains y excellent sans aucune formation initiale, alors que d’autres blindés de la « vraie théorie »,  se trouvent dans l’incapacité de faire surgir cet espace de possibilisation de la rencontre.

Et l’expérience montre aussi que certains patients peuvent être à leur tour support de transfert, voire même tenir par moment « la fonction psy » pour d’autres patients ou même soignants. Il n’est pas rare dans mon expérience à Artaud que des patients mettent ainsi leurs soignants référents en analyse plus ou moins sauvage ; ce qui peut induire des effets de déstabilisation si les soignants en question (c’est le cas de le dire) ne s’engagent pas dans une analyse pour leur propre compte. S’ils ne le font pas, ils peuvent avoir tendance alors à se tenir dans un retrait défensif, ou même à s’expulser d’une telle situation.

D’où l’importance des lieux de métaphorisation que j’ai évoqués précédemment et qui peuvent permettre aux soignants d’exprimer leurs éprouvés sensibles, voire d’élaborer leur contre-transfert en théorisant leur traversée en se fabriquant une boite à outils métapsychologique. Mais aussi en rencontrant les éprouvés des patients, des familles et de tous ceux qui se sentent concernés par la folie et la souffrance psychique.

C’est ainsi que j’ai fondé avec d’autres la Criée il y a 26 ans à Reims pour qu’existe un lieu sur le bord du Centre Artaud, tenant séminaires et conférences en dehors des horaires de travail et relançant ainsi délibérément les enjeux hétérogènes du politique et de la psychanalyse avec des étrangers à l’institution.  D’entrée de jeu, cet acte fut vécu comme une dépossession imaginaire par de nombreux soignants : « on parle de nos patients en notre absence », et je persiste à penser que cette dépossession, tout imaginaire qu’elle soit, comporte des effets de réel tout à fait essentiels.

La rencontre avec le mouvement de PI mais aussi avec des analystes de différents courants, à la condition qu’ils acceptent de témoigner de leur clinique,  et les colloques organisés avec des collègues toujours plus nombreux nous permettent  je crois de nous décentrer par rapport au vécu circulaire et autocentré de toute institution.

Il y a de l’ailleurs et de l’hétérogène à accueillir, et de la confrontation aussi avec des discours qui nous sont radicalement étrangers voire carrément hostiles. C’est ainsi que nous avons accueilli et combattu le discours de l’évaluation et de la « bonne gestion de la folie » chère à Edouard Couty, et que nous avons fait valoir une autre manière de parler de notre praxis à partir des éprouvés sensibles et de la théorisation de l’expérience.

C’est dans cet espace que nous sommes rentrés en collision frontale avec le discours de celui que Jean Oury a appelé « la puce » : en nous piquant il a réveillé certains, mais il a propagé une sorte d’épidémie de peste dont nous avions sous-estimé la dangerosité.

C’est dans ce contexte violemment hostile que j’ai participé à la fondation du  « groupe des 39 contre la nuit sécuritaire » avec un sentiment d’urgence à se mobiliser que je n’avais jamais ressenti avec autant d’intensité.

Je passe sur les nombreux meetings et les pétitions qui ont rencontré un succès allant bien au-delà de nos espérances et qui se sont poursuivis jusqu’aux dernières élections ; le départ de Sarkozy ouvrant une nouvelle période sur laquelle je reviendrai plus tard.

Ce sur quoi je voudrais insister c’est la participation active de familles et de nombreux patients, prenant la parole en leur nom et témoignant de leur place dans tous les rassemblements que nous avons provoqués.

Des témoignages qui m’ont d’ailleurs atteint et montré à quel point je méconnaissais la gravité de la situation de la psychiatrie, et le retour de pratiques barbares que je croyais sottement révolues.

Brusquement les pratiques de contention se sont répandues avec une facilité, une absence de résistance des soignants qui m’ont troublé.

Récemment une soignante m’expliquait-mais c’est un discours largement partagé- que si les patients n’étaient pas attachés alors qu’ils sont déjà enfermés et isolés, ils pourraient se faire du mal en se tapant la tête contre les murs. Et comme c’était dit avec une grande sincérité je me suis retenu de lui dire que c’était effectivement à se taper la tête contre les murs !! Vous voyez que l’autocensure m’est venue tout naturellement, alors que j’aurais témoigné aussitôt de ma colère il y a quelques années…

Par contre, il existe aussi un envers de cette banalisation de la violence : plusieurs patients ont rejoint progressivement les 39, dont certains du centre Artaud. Ce qui me met transférentiellement dans une situation délicate, mais qui leur a permis de faire une avancée impressionnante.

Il faut dire que nous tenons depuis longtemps, outre les clubs et lieux de parole, une AG du centre Artaud où toutes les questions de la vie quotidienne peuvent être abordées. Généralement cela tourne autour de la gestion du club, des comptes, des activités et autres fêtes à organiser.

Mais au moment du discours de Sarko, les patients nous ont immédiatement interpelés pour nous demander comment nous nous positionnions.   

Et là impossible de se dérober : j’ai dû leur dire avec un certain embarras mon engagement dans les 39 contre un tel discours qui les criminalisait et qui était aux antipodes de ma conception du soin. Ce qui me retenait jusqu’alors d’évoquer mes positions politiques avec les patients, c’était bien sur le risque de les instrumentaliser dans le transfert et de m’embarquer avec eux dans une aventure dangereuse. Nous ne pouvons en effet méconnaitre les ravages qui ont eu lieu dans les années post68 quand certains que jean Oury appelle les     « régénérés de 68 » ont voulu embrigader les patients dans des groupes gauchistes en méconnaissant précisément la double aliénation et le transfert.

Je pense que l’embarras qui m’a saisi est pris dans cette histoire et m’a permis en quelque sorte d’anticiper les difficultés à venir ; car dans une telle situation, le pire serait l’ingénuité et l’engouement qui risquerait de nous aveugler collectivement.

Or d’engouement il n’y eut point, certains soignants disant leur réticence qu’il s’agissait d’entendre, à se retrouver dans une telle situation de proximité avec les patients ; au point que certains purent témoigner de leur trouble dans une telle occurrence, avec la question : comment nous distinguer des patients si nous manifestons avec eux et que plus rien ne nous différencie?

Où l’on entend que la peur de la folie et de sa contagiosité ont encore un bel avenir y compris dans les équipes les plus engagées et que de telles situations permettent de faire émerger des questions cruciales que l’on aurait pu croire élaborées. Ces questions étant souvent masquées par de l’idéologie ou par une représentation idéalisée que le Collectif se donne de lui-même

Je dois aussi mentionner les très nombreux patients qui ne voulurent rien entendre de toute cette cruauté déversée sur les ondes contre les prétendus  « schizophrènes dangereux » et qui continuent à se boucher les oreilles ou à quitter les réunions dès qu’il en est question.

Mais il y eut aussi la création de l’association Humapsy l’année dernière. Tout commença par des réunions le jeudi après-midi au moment de la fermeture du centre pour cause de réunion institutionnelle. Et les patients nous envoyèrent des messages et même au début des comptes rendus où il était d’ailleurs question « de leur douleur dans le transfert pourtant nécessaire », et de revendications tout à fait pertinentes sur leur situation de stigmatisatisation.

Puis ils prirent de nombreuses  initiatives à nos côtés dans les meetings et manifestations contre le projet de loi sécuritaire.

Et puis arriva le meeting des 39 à Montreuil du 17 mars où deux d’entre eux prirent la parole à mes côtés dans une table-ronde sur la norme avec également un philosophe politique Pierre Dardot. Vous pourrez les voir et entendre leurs interventions remarquables sur le site des 39.

 Mais je voudrais citer l’ouverture : l’un deux pour rendre compte de la naissance de leur association, expliqua qu’au cours des rencontres, ils s’étaient rendus compte de situations désastreuses pour les patients et les soignants, qu’ils s’étaient alors rendu compte de leur chance d’avoir été soignés correctement, et me montrant du doigt il insista en me désignant sur la nécessité que « ça continue quand il ne serait plus là… »

Puis il annonça la première des initiatives qu’il venait de décider : le forum fou sur une barge à Paris, où Humapsy a réussi à rassembler et à donner la parole à de très nombreux patients venant témoigner de leur situation et de leur révolte. Mouvement qui continue depuis avec récemment la tenue d’un stand à la fête de l’Huma et leur projet de s’adresser au public et maintenant de former les soignants en souffrance

On ne saurait mieux dire la nécessité de la transmission et combien celui qui parle alors arrive de façon surprenante à symboliser la perte à venir, et à métaphoriser cette perte en en faisant un gain psychique. Ainsi en anticipant sur ma disparition, ces patients se mettent en position active, dans leur vie comme dans la transmission, et quittent toute assignation à résidence dans un quelconque statut « d’handicapé psychique » ou de « bon malade ».

D’ailleurs les réactions du public en témoignèrent partagés entre la gêne vis-à-vis de moi et le fou-rire que l’on aurait trop vite fait de qualifier d’hystérique. Car il s’agit sans doute d’un rire défensif devant l’angoisse de mort : en tout cas c’est ainsi que je l’ai interprété, dans la mesure où j’étais renvoyé à la possibilité de ma disparition. Nous sommes bien loin du principe de plaisir dans une telle passe mais bien plutôt dans une symbolisation de la mort qui m’a laissé perplexe.

Voilà des patients qui viennent formuler très exactement l’enjeu même de toute transmission, ce que de nombreux névrosés n’arrivent pas à faire, empêtrés qu’ils  sont dans l’inhibition de leur agressivité et de leur angoisse à l’idée de la disparition de leur analyste ou de leur maitre.

Surtout et c’est là que je voudrais vous amener pour conclure sur un questionnement : j’ai bien peur que des lacaniens trop orthodoxes viennent affirmer que si des patients franchissent cette passe, c’est qu’ils n’étaient pas psychotiques, puisque «ils en sont empêchés par leur structure». Propos récurrent qui a le don de me mettre en colère et qui revient à chaque fois qu’un patient s’en sort et passe en quelque sorte de l’autre côté de la psychose, ce que je n’hésite pas à qualifier de « guérison psychanalytique » au sens que Nathalie Zaltzmann donnait à ce terme dans son œuvre.

Ceux que Jean Clavreul  appelait les lacanistes dans son livre ultime (l’homme qui marchait sous la pluie) ont considérablement discrédité la psychanalyse en transformant le diagnostic de structure psychotique en verdict d’incurabilité.

Ils ont beau citer les écrits de Lacan à propos de Joyce et du sinthome, tout se passe comme si leur clinique de la psychose se réduisait à une clinique hors transfert, d’observation psychiatrique dans le cadre de la présentation de malades. Or ce que nous avons à faire valoir c’est cette réalité vivante du transfert : le ressort de la psychanalyse qui empêche toute conception fixée du psychisme humain, tout arrêt sur image.

Faute de quoi, et ce n’est pas seulement vrai pour la psychose, la psychanalyse se mettrait en posture conservatrice pour ne pas dire réactionnaire, en collusion avec toutes les forces de la pulsion de mort qui détruisent actuellement la Culture.

Vous l’aurez compris, je pense que la psychanalyse vivante, celle qui s’occupe de la souffrance et du soin psychique, qui se soucie de la guérison au sens winnicottien de redonner gout à l’existence (qui fasse « que la vie vaille la peine d’être vécue »), cette psychanalyse en mouvement constitue le soubassement nécessaire qu’il s’agit de re/construire sans cesse.

Faute de quoi nos propositions ne seraient que des prothèses au mal de vivre : car ce n’est pas seulement de moyens financiers ou de reconnaissance imaginaire dont nous aurions prétendument besoin, mais surtout de retrouver du désir mis en acte dans des collectifs. Nous aurions à soutenir une relation à l’inconnu qui peut effrayer certains d’entre nous mais qui est nécessaire pour ne pas se figer dans une défense des acquis alors qu’il s’agit de se tenir du côté de la gestaltung, autrement dit de l’invention de formes nouvelles.

Il est clair en tout cas pour moi qu’il nous faudra compter sur les patients et les familles, et qu’il n’est pas trop tard pour le faire et affirmer que cette transmission/réinvention de la PI peut constituer une cause commune.

Encore faut-il créer le lieu de ce partage et de cette construction commune, et c’est pour cela que le collectif des 39 a décidé de lancer en lien avec les CEMEA des Assises citoyennes pour l’hospitalité dans la psychiatrie et le médicosocial.

Une manière de mettre en acte le pari d’une reconstruction de la psychiatrie par ceux qui en font l’expérience à des titres divers et qui pourraient en témoigner. Un pari sur la démocratie aussi car nous ne pouvons pas savoir à l’avance ce qui résultera d’une telle rencontre que nous commençons à préparer dans des collectifs locaux et qui mise sur la longue durée.

Un pari enfin sur la construction collective qui nous dégagerait d’une simple dénonciation d’une psychiatrie décérébrée, violente et normalisante.

Un pari me semble-t-il aussi pour la psychanalyse qui ne saurait se réfugier dans ses formes anciennes ou ses fondations héroïsées mais devrait se refonder dans cette conjoncture où elle se trouve radicalement menacée. 

 Autrement dit il s’agirait de trouver le courage de sortir du discours de la plainte pour se rassembler dans la diversité des points de vue et des vecteurs de singularité et tenter de poursuivre, c’est-à-dire de réinventer la psychanalyse et la PI de notre époque en frayant notre propre chemin sur les traces de ceux qui nous ont précédés. 

J’en profite pour vous inviter à vous mettre vous aussi en mouvement et que ce colloque soit l’occasion « d’entrer dans la danse » et dans les enjeux de ces Assises.

EUROPSY 2012 –  P. CHEMLA

 

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>L'arbre rose ferme ses portes (sudouest.fr)

Par isabelle Castéra

Il est planté au milieu de l'hôpital Charles-Perrens. Il y a des gens allongés dans l'herbe devant la porte, d'autres sur un banc fument une clope. Une dame en robe longue, les cheveux sur la figure danse avec les étoiles. L'Arbre Rose est un atelier d'art-thérapie, ouvert chaque jour, qui accueille dans un joyeux entassement d'objets colorés, des patients de l'hôpital ou pas. Ici, on met la maladie sur pause. Et on peint, on sculpte, on bricole, on discute, on rigole, on chiale aussi. Le maître des lieux depuis 35 ans s'appelle « Jibé » : Jean-Bernard Couzinet.

Jibé parle fort, autant dire qu'il gueule. Créateur de l'Arbre Rose, il est entré à l'hôpital en 1978, après un doctorat en art et communication, quelques années aux Beaux-Arts, un diplôme d'animateur socioculturel et même une psychanalyse. La folie ne l'effraie pas.

« Tout a commencé ici un jour où un patient est venu me voir avec des tableaux sous le bras, des dessins splendides. À l'époque, l'hôpital m'avait cédé un local, afin d'y organiser une activité. Ce patient, qui s'appelait Bernard m'a initié. Alors que je lui proposais de venir peindre dans mon atelier, il a invité d'autres malades à peindre avec lui. Nous avons créé la première fresque commune. Je n'ai jamais rien imposé, j'ai attendu que les gens viennent à moi. Ici, je les connais tous par leur prénom. Je ne sais rien de leur dossier médical. Chacun arrive avec son projet artistique, pour cela je me suis inspiré de la psychiatrie italienne. »

Lire la suite sur le site sudouest.fr

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> Question écrite à propos de la loi du 5/07/2011

 Question d’une élue à propos de la loi du 5 juillet 2011.

Mme Jacqueline Fraysse attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le mémoire émis par ses services le 6 juin 2012 contre une requête en annulation du Cercle de réflexion et de proposition d'action sur la psychiatrie. Cette requête porte sur le décret n° 2011-846 du 18 juillet 2011 concernant l'application de la loi du 5 juillet 2011 relative aux « droits et à la protection des personnes faisant l'objet d'une prise en charge psychiatrique » et dénonce la vision sécuritaire de la psychiatrie portée par cette loi. Ce faisant, elle s'appuie sur les arguments avancés par les parlementaires de l'opposition lors de l'examen de ce texte, conduisant à leur vote négatif le 15 mars 2011. Or le mémoire actuellement présenté au nom du ministère de la santé reprend dans ses grandes lignes la position sécuritaire de l'ancien gouvernement. Elle s'étonne de ce manque de cohérence. Elle lui demande donc quelle est sa position concernant ce texte qu'elle a vivement combattu lorsqu'elle était dans l'opposition.

Le lien vers le site de l’Assemblée Nationale

http://questions.assemblee-nationale.fr/q14/14-4258QE.htm

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>Communiqué commun de l’ensemble des Syndicats de la psychiatrie publique

 

SPH – IDEPP – SPEP – USP – SPF

A la suite d’un meurtre commis en février 2004 par un malade en fugue d’hospitalisation d’office depuis 20 jours et la condamnation de l’établissement hospitalier devant la cour administrative d’appel en octobre 2009, la responsabilité personnelle du psychiatre traitant a été mise cause au pénal par la famille de la victime.

Notre  collègue le Dr Danielle Canarelli, a été mise en examen au chef d’homicide involontaire avec renvoi au tribunal correctionnel pour un jugement prévu le 13 novembre 2012.

Alors que ce patient se trouvait administrativement en sortie d’essai, une fugue impulsive était survenue pendant la consultation au moment où elle l’informait de la nécessité d’une hospitalisation immédiate.

Il lui est reproché de « n’avoir pris aucune disposition effective pour ramener à exécution de manière contraignante la mesure d’hospitalisation d’office » alors même qu’elle avait établi les certificats et avis de recherche, les avait adressés aux services concernés (DDASS et services de police) et qu’elle avait organisé plusieurs visites à domicile.

L’ensemble des syndicats des psychiatres hospitaliers de la psychiatrie publique apporte son total soutien au Dr Canarelli qui n’a commis aucune faute ni erreur médicales en ayant porté un jugement correct, prescrit des soins adaptés et effectué les démarches médico-légales adéquates. Elle ne saurait être tenue pour responsable dans les faits en cause, puisqu’il ne relevait ni de son pouvoir ni de ses fonctions d’intervenir autrement.

Les syndicats de psychiatres publics dénoncent unanimement la tendance à vouloir mettre en cause la responsabilité des psychiatres hospitaliers en exigeant d’eux une obligation de résultat et non plus de moyen, dans un domaine où la prédictivité et le risque zéro n’existent pas et où de nombreux autres intervenants, sur lesquels ils n’ont pas autorité, sont concernés.

Dr J-C. Pénochet, Président du Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux

Dr A. Mercuel, Président de l’Intersyndicale de Défense de la Psychiatrie Publique

Dr O. Labouret, Président de l’Union Syndicale de la Psychiatrie

Dr A. Poli, Président du Syndicat des Psychiatres d’Exercice Public

Dr J-Y. Cozic, Président du Syndicat des Psychiatres Français

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>Après-midi débat le samedi 15 septembre 2012 à 15 h 00

La Fédération des Ateliers de Psychanalyse propose un après-midi débat

 

à la Faculté de Théologie Protestante, 83 boulevard Arago, 75014 Paris Métro : Glacière, Denfert-Rochereau ou Les Gobelins avec Philippe BORREL autour de son film UN MONDE SANS FOUS (documentaire, 2010)

avec la participation de Patrick CHEMLA et Paul MACHTO


"Au cœur du film de Philippe Borel : la place que notre société laisse à la folie. Et, d’entrée de jeu, nous voilà confrontés à cette cruauté banalisée où les patients se retrouvent « jetés hors du monde » (Hanna Arendt), abandonnés à la prison ou à la rue. Le spectre de la mort par délaissement plane ainsi sur tout le film.

Au-delà de l’histoire de la folie écrite magistralement par Michel Foucault, marquée par le grand renfermement, se profile ainsi la perspective nouvelle et terrifiante d’une mise au ban et de « la vie nue », exposée par Agamben dans Homo Sacer.

À l’évidence, ces enjeux éthiques et politiques débordent tout cadre professionnel. Mais quelles sont les implications spécifiques qui reviendraient à tous ceux qui s’inscrivent dans une transmission freudienne ?

Comment imaginer un espace pour la psychanalyse dans un monde qui voudrait taire la folie par tous les moyens possibles, y compris la contrainte à domicile ?

Une telle violence symbolique et réelle est lourde d’une haine de l’inconscient freudien. Cette haine vient maintenant explicitement s’attaquer à toutes les pratiques qui se soutiennent de la psychanalyse et de la psychothérapie institutionnelle.

La pratique analytique ne pourrait donc s’envisager en dehors d’une critique de son inscription dans le monde, autrement dit, pour reprendre la formulation de Jean Oury, sans poursuivre « l’analyse de l’analyse ».

Analyse sans fin assurément."

SIÈGE SOCIAL 45 rue Sedaine, 75011 Paris Tél. 01 48 06 24 99 – Mail : gendre.dusuzeau@noos.fr

Site : http://www.federation-ateliers-psychanalyse.org/

Patrick CHEMLA


"Le film de Philippe Borrel pose un regard particulièrement pertinent sur les questions qui se posent aujourd’hui dans la société à propos de l’accueil de la folie, des maladies mentales, et par extension de la souffrance psychique, questions sur la place de la psychiatrie, et ce que l’on appelle la « santé mentale ».

Ce documentaire, fruit d’un travail immense et particulièrement approfondi, fut tourné dans le moment si particulier où Nicolas Sarkozy prononça son sinistre discours à Antony en décembre 2008. Ce fut à cette occasion que Philippe Borrel rencontra le Collectif des 39 contre la Nuit Sécuritaire qui venait d’être créé.

Nous sommes confrontés à une régression, prônant un retour au grand renfermement, tournant le dos aux progrès réalisés par la psychiatrie depuis cinquante ans.

La Fédération des Ateliers s’est engagée clairement auprès du Collectif des 39 : participation à plusieurs meetings et forums, communiqués et interventions publiques de plusieurs de ses membres et notamment de sa présidente, Anna Angelopoulos.

En effet, les analystes ont toute leur place dans ce débat, pour y soutenir la place essentielle de la parole, à l’heure où l’idéologie médicale dans sa version la plus scientiste tente de dominer la scène. Les analystes de la Fédération y ont encore plus particulièrement leur place car des discours psychanalytiques, notoirement dogmatiques, ont accompagné si ce n’est suscité, un isolement et un hermétisme notablement préjudiciable, comme on a pu le voir au moment de la polémique stérile sur l’autisme. Ainsi des associations de familles, de patients aussi se sont engouffrés dans cette brèche, et ont accompagné le discrédit de « LA » psychanalyse, attaquée depuis quelques années.

Comme le notait dans Télérama, Marie Cailletet : « Époustouflante enquête, le documentaire explore pas à pas les éléments d'un puzzle qui, en s'imbriquant, font sens. Apparemment sans lien avec la déshérence voulue de la psychiatrie hexagonale, le choix d'un étalonnage mental de la population, du repérage anticipé des « déviances » et du recours aux médicaments pour normaliser se révèle glaçant de cohérence. Mais pour quel monde ?"

Paul MACHTO

(Participation aux frais de location de la salle : 10 €)

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>Résistance, résister : débat le 19 septembre à 19h

Le Mercredi 19 Septembre à 19h

Autour de la revue V.S.T. n°113

« Résistance », « résister » : il en est beaucoup question dans le travail social, et plus largement dans la société civile. Résister à la mise en actes du libéralisme avec la marchandisation du social et du soin, et l’irruption des méthodes managériales stéréotypées dans la gestion des institutions. Résister pour maintenir le centrage sur une clinique du sujet. Qui ne voudrait pas résister ? Reste alors, et ce n’est pas un détail, à savoir comment faire. Seul ? A plusieurs ? Comment ?

Mais résister a aussi un autre sens, moins lyrique. Quand le sujet « résiste » c’est qu’il ne veut pas bouger, centré qu’il est sur ce qui le constitue même si cela l’enferme. Résister c’est donc aussi refuser le changement.

Alors, « résister » : ne rien bouger, jamais ?

Débat avec :

Yves Gigou, collectif des 39

François Chobeaux, rédacteur en chef de VST

Saül Karsz, philosophe, sociologue

Autour de la revue V.S.T.

« VST est une revue associative et militante au croisement du champ social et la santé mentale. Elle s’adresse aux professionnels, aux bénévoles et aux militants de ces deux secteurs, en leur proposant d’être un lieu de confrontation critique et d’élaboration collective face à la pesanteur des tendances traditionnelles réduisant le travail psychothérapique et le travail social à leurs seules formes réglées et codées. »

Librairie La Terrasse de Gutenberg, 9 rue Emilio Castelar Paris 12ème

tel : 01 43 07 42 15   

Métros Ledru Rollin/Bastille/Gare de Lyon Bus n° 86/87/91

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> XXVIèmes Journées de Psychothérapie Institutionnelle

XXVIèmes Journées de Psychothérapie Institutionnelle

 

 

 

 

12 et 13 Octobre 2012 à MARSEILLE

 

Les lieux du changement : quels espaces pour le travail clinique et psychothérapique dans la psychiatrie du 21ème siècle ?

 

Cité des Associations, 93 la Canebière 13001 Marseille

Métro Noailles (ligne 2)

 

  Les lieux du changement : quels espaces pour le travail clinique

et psychothérapique dans la psychiatrie du 21ème siècle ? 

 

 

Deux lames de fond traversent la psychiatrie contemporaine : une dérive sécuritaire assimilant folie et dangerosité et produisant le retour du grand renfermement, et un rabattement étio pathogénique organiciste considérant la folie comme l’expression d’un cerveau malade.

La perte de l’humain qui en découle questionne un nombre croissant de tous ceux qui rencontrent les personnes malades.

Le mouvement de psychothérapie institutionnelle qui considère la folie comme une potentialité humaine a forgé des outils pour proposer un accueil à la folie et des possibilités de transformation psychique de la personne malade autres que l'association médicaments-apprentisages                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                  L’AMPI consacrera ses 26èmes journées à ce double enjeu : revisiter le champ des psychothérapies en rappelant leur pertinence dans le projet de transformation psychique des patients et mener une réflexion sur les lieux possibles pour leur mise en œuvre.

Le facteur temps offre bien des surprises et les « hasards » des calendriers mettent à l’honneur en ce printemps 2012 l’idée de changement.

S’il appartient aux « psychistes » de participer activement à ce desserrement de l’étau sociétal, il leur revient également de définir les supports théoriques, techniques, psychopathologiques qui permettent à la personne souffrante de se réapproprier son destin.

Ces apports à la formation initiale et continue de tout soignant, associés à un désir toujours à soutenir, sont indispensables à toute approche relationnelle proposant son espace psychique à l’autre.

A un moment où le « parcours du patient »  se fragmente de plus en plus, où la continuité des soins tend à se confondre avec la « traçabilité »  informatique, où le turn-over soignant devient la règle, il est « urgent » de redéfinir les lieux où la rencontre est possible, c'est-à-dire là où il est possible de circuler, penser, inventer, créer…

Inscription : (Places limitées  pas d’inscription le jour même)

Individuelle : 120 €

Etudiants : 50 € (sur présentation justificatif )

Formation Continue : 180 €.

 

N° A.N.F.H. : 93.13.02.688.13

N° S.I.R.E.T. : 403 156 458 000 16

C.C.P. : 2969-15 Y MARSEILLE

Chèques à l’ordre de : A.M.P.I

A envoyer  à :

A.M.P.I. / Bibliothèque du C.H. Edouard Toulouse

118, chemin de Mimet 13917 Marseille Cedex 15

Tél. secrétariat secteur 13G13 : 04 91 96 99 93 – Fax : 04 91 96 97 58

email secrétariat AMPI : isabelle.borzone@ch-edouard-toulouse.fr

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> Le 7 septembre "L'art de l'écoute et de l'écho"

Vendredi 7 septembre 2012                      

Centre équestre  « Les Cavaliers du Pays Cathare » à Magrin(81) 19h30 

« L’ART DE L’ECOUTE ET DE L’ECHO »

Cette notion semble essentielle pour parvenir à la rencontre avec cet  Autre en souffrance.

Et pourtant :  

Est-il encore possible d’écouter le symptôme, de le considérer comme un signe du sujet ?

Que faisons-nous du transfert, de cet espace psychique nécessaire à la rencontre qui apparait si souvent bien difficile.

Le transfert n’est il pas négligé ?  Est-il encore d’actualité, une option ?

N’existe-t-il pas une tendance visant à réduire trop rapidement le symptôme à une manifestation dangereuse qu’il faut éradiquer au plus vite ?

Que fait-on des émotions si particulières qui sont véhiculées dans la relation soignante ?

Finalement qu’en est-il actuellement de notre écoute et de l’écho que nous faisons à la parole des patients ?

A toutes ces interrogations donnons une  « raison-ance », faisons écho…

 « La psychanalyse, qu’on le veuille ou non, c’est quand même, fondamentalement, une science de l’écoute et de l’écho <….>  Il faut multiplier nos propres capacités d’écoute de ce que l’autre dit et se faire, soi-même, une aptitude à donner un écho sensible, à réagir ». Lucien Bonnafé

Avec la participation de Patrick CHEMLA, Psychiatre, Psychanalyste, Chef de Service du centre de jour Antonin Artaud de Reims.

Renseignements: 06 87 28 08 05 – lespsycausent@gmail.com – http://lespsy-causent.over-blog.fr/

 

PS : Après avoir bien écouté et pour faire écho à la convivialité, apporte quelque chose à boire ou à manger !

 

 

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>Cahiers pour la folie N°3

 

Le numéro 3 des Nouveaux Cahiers pour la folie est paru! 

Sous le titre de « Maux-fléchés », vous y  croiserez des aphorismes, des poèmes qui croissent  là où le sens commun s’arrête, une conversation entre « schizos qui se rencontrent », un examen des idées reçues sur l’autisme, des recherches institutionnelles, des photos de ce qui ne se voit pas, des dessins de ce dont on a perdu la mémoire, un entretien sur le délire des marchés financiers, et beaucoup d’autres choses encore…

Les Nouveaux Cahiers pour la folie y poursuivent leurs chemins de traverse, en recueillant des textes et images émanant de diverses personnes impliquées dans les différents bords de la folie. Concrètement, y interviennent tant des personnes soignées en psychiatrie que des personnes ayant fonction de soignant, ou tout un chacun qui se sent concerné à quelque titre que ce soit. Pari sur l’utopie, dans une période où tout concourt à faire taire les « voix » de la folie.

Rappelons que tout lecteur est invité à devenir contributeur, il suffit d’envoyer vos propositions à:  http://lesnouveauxcahierspourlafolie.unblog.fr

Et voici la nouveauté: une offre d’abonnement. N’hésitez pas, la revue n’est subventionnée que par ses lecteurs!


Patricia Janody, Sophie Dufau, Thomas Gabison,

avec Anne-Lise Caprile et Frédéric Mauvisseau

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OFFRE D’ABONNEMENT pour 3 NUMEROS: 20 euros  (frais de port inclus)

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Adresser à : Champ Social Editions

34 bis rue Clérisseau

30000 Nîmes


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TELECHARGER les Cahiers pour la folie N°3 : Cahiers-folie-n-3

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> Le soin sans consentement n’existe pas

Le 20 avril 2012 le Conseil constitutionnel a censuré deux dispositions issues de la loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge. Dès lors, que devient cette loi ? Explication de texte par Gilles Devers, avocat et docteur en droit.

Après la décision du Conseil constitutionnel (CC) du 20 avril 2012, que se passe- t-il pour la loi du 5 juillet 2011 ?

Les sages du Conseil constitutionnel ont été saisi de quatre questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) soulevées par l’association d’usager de la psychiatrie CPRA (Cercle de réflexions et de propositions d’actions sur la psychiatrie). Après examen de ces questions, les choses sont simples : le Conseil constitutionnel (CC) laisse intact l’essentiel de la loi du 5 juillet 2011. Il ne déclare anticonstitutionnel qu’un aspect ponctuel de la loi, à savoir les dispositions contenues dans le paragraphe II de l’article L.3211-12 et l’article L3213- 8, concernant les conditions d’hospitalisation sous contrainte pour les patients faisant l’objet d’une décision d’irresponsabilité pénale ou ceux admis en UMD. S’agissant des programmes de soins à domicile, le Conseil constitutionnel constate que la loi ne permet pas de prendre des mesures coercitives et qu’il est donc impos- sible d’imposer des soins sans consentement. En clair, si un patient refuse de respecter le programme de soins établi à l’issue de la période de soins et d’observation de 72 heures, le psychiatre ne peut l’y obliger sauf à le faire hospitaliser.

Peu de choses vont donc changer ?

lire cet article sur le site de Santé Mentale

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>Le Collectif des 39 à Jazz in Marciac avec la Ligue de l’enseignement

Lundi 30 juillet 2012 à 14h30 : « Thélonious Monk, de la singularité à l’universel ». Avec Yves Buin, psychiatre et écrivain, auteur d’une biographie de T. Monk et Patrice Charbit, psychiatre à Montpellier, du Collectif des 39.

"Thelonius Monk à la fois universel et singulier est l'un des acteurs emblêmatiques non seulement de l'art afro- americain du vingtième siècle mais de la musique contemporaine. Pianiste et compositeur, il fut artiste exigeant tout au long de son parcours, cultivant une sorte d'ascèse musicale marquée toutefois par la jubilation et l'humour, qui le fit considérer comme le Webern noir. Son oeuvre en fait désormais un classique."

 Yves Buin

Yves Buin. Psychiatre de profession, aujourd'hui en retraite, il a choisi d’exercer son métier en milieu urbain déshérité. 

Egalement poète, passionné de jazz, il a collaboré à Jazz Hot à la fin des années 60, avec Patrice Blanc Francart, Daniel Caux ou Philippe Constantin, dans l’équipe rassemblée par Michel Le Bris qui joua un grand rôle dans l’introduction du free jazz en France. Biographe de Thelonious Monk entre autres – il conjugue travail et passion grâce à la littérature.

Son écriture, lorsqu’il ne s’agit pas d’essais psychiatriques, s’inspire des rythmes et des respirations du jazz. Rien d’étonnant donc à ce qu’il se passionne pour l’oeuvre de Jack Kerouac : le jazz était, dans Sur la Route, presqu’un personnage à part entière, et Jack Kerouac disait chercher la similitude rythmique entre jazz et écriture.

Les oeuvres poétiques d’Yves Buin sont régulièrement mises en musique… jazz bien évidemment.

Auteur de plus d’une vingtaine d’ouvrages, Yves buin a notamment écrit deux essais sur la psychiatrie, (Psychiatries, l’utopie, le déclin et La Psychiatrie mystifiée). Kerouac, publié en 2006, n’est pas le premier livre que Yves Buin consacre au plus breton des auteurs américains (il raconte la recherche de ses racines à Brest dans Satori à Paris). Il a déjà préfacé et établi l’édition d’œuvres choisies de Jack Kerouac pour Sur la route et autres romans (Gallimard, 2003) et rédigé Jack Kerouac : vendredi après-midi dans l’univers avant de se lancer dans l’écriture de sa biographie. 

Mardi 31 juillet 2012  à 14h30 : « Prendre soin… Eloge de la parole et de la créativité ». Avec Hervé Bokobza, psychiatre à Montpellier et Simone Molina, psychanalyste, Avignon, membres du Collectif des 39. Débat animé par Sophie Dufau, journaliste à Médiapart.fr

« Au cours des cinq dernières années, les personnes en souffrance psychique ont été particulièrement stigmatisées. La politique sécuritaire a malmené la psychiatrie en renforçant les mesures d’enfermement. La loi du 5 juillet 2011 sur "les soins sans consentement", y compris à domicile, a gravement accéléré le déclin des pratiques humanistes de nombre d'équipes professionnelles au profit d’une dérive techniciste  prônant l'isolement et la contention comme seule réponse à ces souffrances. 

Au lieu d’un débat sur l'organisation des soins et d’un renforcement de la politique de secteur psychiatrique demandée par les soignants, nous avons assisté à une mise en cause des professionnels afin de masquer la bureaucratie et le tout-gestionnaire des hôpitaux ainsi que les carences dans le domaine des soins de l'enfance et de l'adolescence comme dans d'autres champs du social. Cette mise en cause a favorisé des affrontements alors que c'est le débat et le dialogue qui s'imposent sur ces questions complexes. 

La nouvelle donne politique va-t-elle ouvrir enfin des espaces de dialogue, de débats pour refonder une psychiatrie où l'accueil et l'hospitalité seraient au coeur même du dispositif de soins ? 

La culture, la création, les activités artistiques, qui font encore partie du dispositif thérapeutique dans certains lieux de soins du fait de la détermination des équipes soignantes et des personnes accueillies, pourront elles avoir la place qu'elles méritent ? 

Tels sont les enjeux que le Collectif des 39 — associant professionnels, patients et entourage — veut porter dans le débat public ».

Mercredi 1er août 2012 à 14h30 : Projection du film « Les Voix de ma sœur », de Cécile Philippin. Débat avec la réalisatrice, Yves Gigou, infirmier et formateur, ( Villejuif 94) et Paul Machto, psychiatre, (Montfermeil 93) membres du Collectif des 39. Débat animé par Sophie Dufau, journaliste à Médiapart.fr

« Les voix de ma sœur » est un portrait et un témoignage. Il prend la forme d’un journal intime à plusieurs voix :
- celle d'une patiente, décrivant avec lucidité sa pathologie, 
- celle de sa famille combattant la culpabilité et le déni, 
- celles de ses soignants de l'hôpital Saine Anne à Paris.

Ce document a vocation de dé-stigmatisation des personnes souffrant de troubles schizophréniques et de sensibilisation au travail des familles et des soignants.

Les voix de ma sœur n’est pas un documentaire sur la schizophrénie, un énième qui montrerait combien la maladie psychique est dure, est triste, chronique, presque sans espoir…Ce film est la déclinaison des modes de la liberté humaine, y compris dans la folie qui l’excède. C’est un éloge de la parole et de ses effets. Dr Philippe Lavergne »

avec Paulette, Valérie et Hélène Philippin, Pr Jean-Pierre Olié, Odette Forestier, SHU Sainte Anne, Unafam 92, Gem des 4 Communes.

Tournage : février – octobre 2011- durée : 49 minutes.

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>A Lille, le procès d'une méthode de traitement d'enfants autistes (Mediapart)

(par Sophie Dufau, Mediapart)

La prise en charge des enfants autistes selon les méthodes de Vinca Rivière, dans le Nord, est loin d'être le conte de fées que cette enseignante à l'université s'évertue à présenter. Après le rapport de l'agence régionale de santé qui, en réponse à un courrier de parents, concluait en février que le centre Camus présentait des « dysfonctionnements »constituant « des facteurs de risques de maltraitance susceptibles d'avoir des répercussions sur les enfants accueillis » (lire les révélations de Mediapart), c'est un procès au civil qui se prépare pour l'automne pour « pratique déloyale de Vinca Rivière et de son association Pas-à-pas et manquements contractuels » dans la prise en charge d'un enfant à domicile. Autrement dit, à entendre cette famille raconter son histoire : mauvais traitements et personnel incompétent.

Jacques Turan, le père de l'enfant, ne fait pas ce procès «pour l'argent» – les parents réclament 5 000 euros, bien loin des sommes engagées et s'ils obtiennent gain de cause, la somme sera reversée à une association de prise en charge de l’autisme –, « c'est simplement pour dénoncer le mépris qu'elle a eu de notre enfant : elle l'a pris comme un Kleenex, elle l’a exclu sans aucun scrupule. On ne voulait pas partir avec ce sentiment d'impunité. Et on espère, en témoignant, que ça servira aux autres parents ».

Vinca Rivière, à droite.Vinca Rivière, à droite.

Pour comprendre les enjeux de cette plainte, il faut d'abord se souvenir que Vinca Rivière est une petite sommité dans le monde de l'autisme. Responsable d'un master et d'un diplôme universitaire à l'université de Lille 3, elle se targue d'avoir introduit en France la méthode ABA – Applied Behavior Analysis, ou, en français, analyse appliquée du comportement –, une méthode comportementale d'apprentissage que la Haute autorité de santé a classée en mars dernier dans les « interventions recommandées » dans la prise en charge des personnes présentant des troubles envahissants du développement.

Même si nombre de professionnels contestent à Vinca Rivière le titre de pionnière, même si l'unique association à laquelle elle revendique appartenir« la fédération pour le développement des sciences du comportement qui réunit jusqu’à 12 associations nationales et 2 associations étrangères», fut simplement créée par elle en 2009, c'est pourtant vers Vinca Rivière que bien souvent se tournent les médias pour illustrer les nouvelles prises en charge de l'autisme. Et le grand public se souvient sans doute de la soirée que France-2 lui a consacrée en juin 2008, lorsque l'acteur Francis Perrin eut carte blanche dans l'émission Envoyé spécial pour présenter la méthode et les professionnels qui s'occupaient de son fils Louis.

Dans notre enquête d'avril dernier, outre que Vinca Rivière défendait pour certains cas de patients adultes « des procédures de punition par choc électrique », nous révélions aussi que forte du soutien écrit de Xavier Bertrand qu'elle a obtenu, le centre Camus qu'elle a ouvert en 2008 se voyait octroyer par le ministère de la santé un budget de fonctionnement de plus de 80 000 euros par enfant et par an, soit une somme 2,5 fois plus élevée que des centres fonctionnant de façon similaire en France.

C'est dans ce contexte que ces courriers et plainte de parents prennent tout leur relief. A Roubaix, Vinca Rivière dirige deux structures : l'association Pas-à-pas qu'elle a fondée au début des années 2000 (elle en est aujourd'hui la trésorière) pour assurer une prise en charge à domicile des enfants et le centre Camus ouvert en 2008, dont le gestionnaire est l'association Pas-à-pas. Aujourd'hui 20 enfants sont accueillis dans le centre et 80 dans l'association.

C'est au milieu des années 2000 que Jacques Turan croise la route de Vinca Rivière.

Fin 2006, il s'inscrit au diplôme universitaire qu'elle dirige à Lille 3. Il est alors médecin en Franche-Comté. Son fils, 6 ans à l'époque, ne parle pas, n'est pas propre et n'avait pas particulièrement de prise en charge. Le père espère que ces allers-retours mensuels Lille-Vesoul lui permettront de rencontrer des psychologues ABA disposés à s'installer dans l'Est de la France.« Mais Vinca Rivière m'a affirmé que si on venait à Lille, Zacharie pourrait bénéficier d'une prise en charge de 40 h par semaine à domicile. » En avril 2007, la psychologue avec laquelle il fut mis en relation lui assure que « tout est prêt pour l'accueil de Zacharie ». « Et il ne fallait pas traîner. A 6 ans, disait-elle,chaque jour compte. Il faut venir vite, très vite. C'était presque du harcèlement. »

Même si l'association n'avait fait aucun diagnostic de l'enfant et s'était contentée du récit du père pour évaluer ses besoins, les époux Turan décident de s'engager. Du jour au lendemain, ils quittent la Franche-Comté, vendent la maison « qu'on avait fait construire », mettent fin « à la collaboration avec le cabinet de médecins avec qui je travaillais ». Face à l'indigence des prises en charge de leur enfant autiste, toute perche qui se présente fait espérer de pouvoir sortir la tête de l'eau.

Mais arrivés à Lille, ce fut la « grande surprise, il n'y avait pas d'équipe, seulement une étudiante fraîchement diplômée, incapable d’élaborer ou de modifier un programme selon l’évolution de l’enfant, et une autre en 4e année d'études », raconte le père. La mère poursuit : « Dès le départ, il y avait beaucoup de choses qui clochaient : la psychologue était complètement à côté de la plaque, vague, évasive. Elle a fait passer le test de capacités à Zacharie à toute vitesse. Dans tous les centres de ressources autisme, ce test est suivi d'un compte rendu écrit, nous en avions d'ailleurs eu un à Strasbourg. Mais quand je le lui réclame, elle me répond que ce n'est pas “dans sa pratique” et qu'elle fera un bilan verbalement. Nous avions quand même payé 545 euros… »

Vinca Rivière vient alors chez eux pour discuter. Les parents demandent non seulement un compte rendu écrit du test, mais aussi un bilan des séances que Zacharie suivait avec la psychologue et l'intervenante. « Pas à l'issue de chaque séance,explique le père, mais une fois par semaine ou même 2 fois par mois, simplement quelque chose qui nous détaille le programme, les progressions éventuelles. »

Alors qu'ils pensaient, en arrivant à Lille, pouvoir disposer de personnel expérimenté, les parents comprennent vite que tous les intervenants sont des étudiants. (« On les payait en chèque emploi service : 12 € net de l'heure, pour ceux qui étaient en master 2 ; 10 € pour ceux qui étaient en master 1 ; et 8 € pour ceux qui étaient en licence. ») Une psychologue est là pour assurer la supervision des intervenants, une sorte de formation continue.« Nous avions convenu au départ que Zacharie aurait chaque semaine 40 h de séances à domicile, et que la psychologue nous facturerait en plus 10 heures de supervision. »

Mais face aux difficultés rencontrées par les intervenants, la psychologue n'avait qu'une seule réponse : « Dès que ça n'allait pas avec telle ou telle, il fallait superviser. C'était toujours plus de supervisions, payées 35 € de l'heure, et donc toujours plus d'argent. Ou alors elle se proposait pour intervenir elle-même, mais au tarif de 25  de l’heure, ce qui n’était pas du tout prévu dans notre budget », explique Zakia Turan. En moyenne, cette prise en charge leur a coûté quelque 2 000 euros par mois.

 

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>Des fous comme vous (France Culture)

Emission du 12 juin 2012. ECOUTEZ L'EMISSION

 

Chacun a sa représentation de la folie. Schizophrénie, paranoïa, bipolarité, érotomanie, dépression, troubles cognitifs et comportementaux. Mais derrière ces mots, ces maux, il y a des êtres humains avec leurs rêves, leurs vies, leurs aspirations, leurs désirs, leurs envies malgré la maladie.

Dans ce documentaire voici le vécu, le ressenti, les espoirs, les aspirations, les émotions d’exception et les réflexions du quotidien de Léa, Michel,Giancarlo et Marie-Françoise, tous clients assidus des centres et des hôpitaux psychiatriques, mais surtout des êtres d’exception qui ont cent vies en une seule, qui suçotent leur cigarette comme si c’était la dernière et qui seront toujours les premiers à s’étonner, malgré leur maladie, de la folie et de la bizarrerie de la société.

Il y a un monde derrière le miroir des illusions, des a priori, des préjugés. Il existe des fous comme les autres terriens, pour qui la vie est une lutte de tous les jours, un chemin entre rêves et cauchemars, beauté et laideur, tout comme vous.

« Entre un dixième et un cinquième de la population, estime-t-on, risque d’être atteint par un trouble mental à un moment quelconque de la vie. » Extrait du Rapport de la Cour des Comptes de Décembre 2011 sur l’organisation des soins en psychiatrie

Site de l'émission

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>Droit de réponse à l'interview de Madame Rogé sur Mediapart

A Madame Bernadette Rogé, à la suite de son interview dans Médiapart le 14 mai

 

De la part de Madame Dominique Amy, présidente de la CIPPA


Bonjour Madame,

Bien que co-éditées par Dunod, nous n'avons jamais eu l'occasion de nous rencontrer et je le regrette.

En tant que présidente de la CIPPA (Coordination Internationale de Psychothérapeutes Psychanalystes et membres associés s'occupant de Personnes avec Autisme), je souhaite faire un commentaire à votre interview  du 14 mai dernier dans Médiapart.

Etant, comme un certain nombre de membres de la CIPPA, formée aux approches éducatives et aux évaluations cognitives, je ne peux que m'associer à la plupart de vos assertions.

Toutefois les réactions virulentes d'un nombre important de nos membres psychanalystes ou non, m'amène à revenir auprès de vous sur ce que vous dites de la psychanalyse et qui, nous semble-t-il, relève d'une vraie méconnaissance de notre pratique.

Comment pouvez-vous imaginer un seul instant que nous allongeons des enfants, des adolescents ou des adultes autistes sur un divan?  Si tant est qu'il y en ait un dans le bureau – ce qui est loin d'être toujours le cas ! – il est, comme tout le reste du matériel, à la disposition de la personne autiste comme un objet de mise en scène d'un état qu'elle vit et que nous cherchons à comprendre et à l'aider à comprendre elle même.

Vous le savez aussi bien que moi, les autistes vivent des émotions dont le sens leur échappe. Lorsqu'ils sont sans langage, c'est bien par le corps qu'ils nous montrent à la fois ce qu'ils vivent et leur incompréhension de ce vécu. Comment donc imaginer qu'un psychanalyste puisse allonger une personne autiste ( j'en connais peu qui se plieraient à cet exercice ) et qu'assis derrière lui ou elle, il attende sagement qu'elle  se mette à parler?

Tout ceci me désole car si une personne aussi bien formée que vous l'êtes (j’ai lu votre livre avec le plus grand intérêt) imagine que la psychanalyse est ce que vous semblez penser qu'elle est, on comprend mieux ce qu'il en est des parents ou de certains professionnels non avertis.

J'espère que nous aurons l'occasion d'une rencontre et d'une discussion approfondie sur tout cela et vous prie, en attendant, de croire, Madame, à mes sentiments cordiaux.

 

Marie Dominique Amy

 

P.S. voici notre cite: www.cippautisme.org

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>Seuls les moutons ont besoin de berger

Un  management autoritaire s’est  instauré depuis 2008 (particulièrement depuis l’arrêt maladie du Directeur d’établissement à l’IME, qui en est une des conséquences), dite « nouvelle gouvernance », avec l’accroissement d’une hiérarchie à distance du terrain, qui méconnait malgré ses dires ce terrain, qu’il imagine de façon fantasmatique, avec divers préjugés.

Cette association est constituée de parents d’adultes qui ont fréquenté l’IME il y a 20 voire 30 ans (Les parents des jeunes accueillis à l’IME ne sont pas pour la plupart adhérents à l’Association et peuvent avoir des options divergentes avec cette dernière).

Le Président de cette Association gestionnaire, issu du privé, transpose au médicosocial une idéologie marchande.  

D’où :

– l’autoritarisme          

– La volonté  de soumette toute l’équipe pluridisciplinaire à un projet technocratique défini de façon unilatérale.

Le mépris également des métiers,  de l’expérience : les éducateurs ne sont là que « pour promener les enfants », les « psychologues sont dogmatiques » , division des différentes catégories de personnel ( ex : mise en place d’un audit , qui a été présenté au personnel de L’IME comme : une aide , des « appuis techniques » pour pallier à l’absence du Directeur d’établissement , et qui s’est dévoilé comme étant un audit pour monter les salariés les uns contre les autres : untel a dit que …etc.).

Le management par la peur et diverses manipulations est également  un moyen de cliver le collectif, et de faire voler en éclats les solidarités.

Ce management « rusé » impose « des petits changements successifs » en s’ingérant dans la pratique professionnelle, et multiplie des « commissions » (« loisirs », « vivre ensemble »…) afin que le personnel ait l’impression de « décider »  de quelque chose décidé à l’avance ! « Soumission volontaire » par la réunionite !

Le projet institutionnel, construit collectivement est dénigré, voire dénié : « il n’existe pas » ! Pourtant il est obligatoire pour les autorités de tutelle et  assure la cohérence de l’ensemble institutionnel.

Or ce projet insiste sur l’importance :

– d’une conception solidaire et humaniste du « vivre ensemble » : enfants en situation de handicap et adultes de l’équipe pluridisciplinaire.

– la nécessite de « penser » en continue ses pratiques, ses valeurs et de ne pas accepter une localisation étanche des savoirs.

Un travail clinique : qui fasse que chaque jeune accueilli soit entendu comme sujet qui respecte la pluralité et la conflictualité de la parole. 

La pensée que nous considérons comme la plus value «  symbolique », la valeur de nos métiers est méprisée : il faut agir, multiplier les actions vidées de toute substance et les accoler  à une signification immédiatement utilitaire  (Emploi du temps bien rempli) et se soumettre à la normalisation idéologique.

Tout cela conduit à une exténuation du sens et de l’humain.

A contrario d’un des animateurs d’ HUMAPSY (Mathieu), qui disait au colloque des 39, le 17 mars 2012 : « Etre un non spécialiste de RIEN », ces gestionnaires se pensent des spécialistes de TOUT, souhaitant tout maitriser.

Les enfants accueillis ont des pathologies importantes : organiques ou psychiques, dont certaines mettent déjà  a mal le lien social (violences, attaques du cadre éducatif surtout dans les groupes d’adolescents). 

Les pressions continuelles de l’employeur ont bien sur des effets sur le personnel en terme de souffrance au travail (arrêts maladie à répétition, départ d’une des psychologues cliniciennes, désorientation des personnels quant-au sens de leur action) et sur le travail d’accompagnement (médical, éducatif, pédagogique)  auprès des enfants.

Dans ce secteur : il est important de prendre soin des enfants dans une ambiance apaisée, sinon on déclenche de l’angoisse et des passages à l’acte du côté des enfants et jeunes adultes.

Egalement main mise sur la formation et volonté de mettre en place une sorte de « police des normes » comme dit Rolland Gori (Ex : mise en place d’une formation « maison », avec forte incitation  des salariés à s’y inscrire, au niveau du plan de formation).

Les éducateurs qui se plaignent de perdre le sens de leur travail sont taxés d’archaïsme, de refuser la « modernité ».

Le travail de Max WEBER sur l’innovation sociale  souligne que c’est l’individu qui est la source véritable de l’innovation sociale ….Si l’individu est mis à mal sa créativité se délite.

Le sentiment général est un sentiment de désolation face à la déconstruction d’un projet qui était très mobilisateur pour tous (enfants, parents, personnel), et qu’il a fallu des années pour construire.

Actuellement porté une idéalisation objectivante de la SCIENCE, l’association gestionnaire vise à une réorganisation, non plus seulement sur le mode technocratique (création d’un siège,  et d’une pléthores de cadres  éloignés du terrain, hiérarchisation accrue, évaluations fétichisées….Etc.) , mais idéologique : les enfants sont arrimés à leurs gènes, il faut dans un proche avenir (une fois le psychiatre en place viré) multiplier les bilans neuropsychologiques, les examens biologiques et autres … car «  la science a évolué » ! 

On radicalise le rapport humain à la chose et on vide la vie de son contenu.

Voila ! La tâche est devant nous :  

il nous faut recréer de nouvelles forces « éruptives » 

-qui ressouderont le collectif  

– qui nous libéreront de la standardisation de nos métiers.

– qui nous sortiront de la «  domestication » : nous refusons de devenir des moutons  

                          

 Des indignés Sparnaciens

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>La loi du 5 juillet 2011, une loi biopolitique ? (gilles sainati – Mediapart.fr)

Ce  texte de loi et de procédure n’est pas apparu le soir d’un jour de pluie mais il a été largement anticipé par toute une série de textes qui visent à placer la notion de  dangerosité comme le critère distinctif entre la norme et l’anormalité et d’en faire découler toute une série de processus de contention et de contrôle sociaux, pénaux.

Citons ici:

les dispositifs qui consistent à repérer les enfants turbulents à l’école et que l’on retrouvera ensuite avec un traitement de ritalin, l’un des critères pouvant être la notion d’absentéisme scolaire aboutissant aussi , dans certains cas , à suspendre les allocations familiales,

Les dispositifs de bracelets électroniques pénaux  ( gps) visant à suivre les condamnés en milieu ouvert et à remplacer le suivi post-pénal avec un contrôle électronique à distance..La tendance est maintenant à poser des bornes pénales interdisant l’accès à certains endroits en fonction du type de condamnation ( exemple:  proximité des établissements scolaires)

Les textes juridiques qui fondent ces dispositifs ont émaillé les lois votées ces dix dernières années: loi perben II, loi prévention de la délinquance, loi sur l’égalité des chances etc. 

Indiscutablement cette nouvelle société de contrôle tourne autour d’un concept: la dangerosité qui explose tous les cadres précédemment établis de l’Etat de droit qui  reposaient sur un principe simple celui  de la légalité des délits et des peines…C’est à dire que l’on ne pouvait condamner une personne que si elle avait commis un acte, une infraction prévue par loi.

Aujourd’hui la sanction n’est plus réservée au juge pénal, mais en plus l’on sanctionnera un comportement selon qu’il sera considéré dangereux in futurum…Le juge, le droit est dépassé..

Deux lois illustrent parfaitement cette nouvelle ère:

la rétention de sûreté qui prévoit qu’une personne ayant purgé une peine puisse rester enfermée car considérée comme dangereuse…

– la loi que nous examinons ici du 21 juillet 2011 telle que issue de sa nouvelle forme après la décision du Conseil Constitutionnel

Les caractéristiques de ces nouveaux textes sont que la notion de dangerosité est principalement arbitrée par une autorité administrativo-médicale et que le droit est transformé en une suite de procédures complexes qui confinent au  processus.

La loi nouvelle, au travers des mécanismes qu’elle met en oeuvre, interroge alors la nature de cette société postdisciplinaire que Foucault avait entrevue et que Gilles Deleuze a nommée la société de contrôle. La prise en charge des anormalités n’y relèverait plus du redressement autoritaire et de l’exclusion systématique de la vie sociale mais procèderait davantage d’une gestion des problématiques liées à certains groupes et individus au cœur de la cité par dispersion de mécanismes de correction souples et protéiformes qui, tout en manifestant généralement une volonté de respecter la liberté individuelle voire en se fondant sur elle, viseraient à conduire chacun à exercer celle-ci de manière conforme à certaines normes sociales explicites ou implicites.

En quelque sorte, la psychiatrie de secteur a été rattrapée par les soins ambulatoires sans consentement..

La contrainte devient protéiforme sous les atours d’une bienveillante tolérance.  Le danger devient évident et repose sur l’énoncé de la loi : généraliser les soins sans consentement hors l’hôpital transforme petit à petit la psychiatrie en une trame médico-administrative vouée à distribuer dans le corps social les prises en charge juridiquement imposées. A cet égard, le fait que les soins sans consentement aient vocation à se dérouler hors de l’hôpital et puissent même englober le domicile du malade s’avère lourd de significations quant à un effacement de nombre de séparations fondatrices de notre constitution sociale voire anthropologique : liberté/contrainte, dedans/dehors, privé/public…(1)

La loi du 5 juillet 2011 poserait  certains jalons favorisant la réalisation cette nouvelle société biopolitique.

2)Analyse du process de la loi

Pour analyser ce texte de loi qui enchevêtre les compétences judiciaires et administratives ainsi que l’approche médicale il convient de retenir l’intervention de trois autorités dans un processus:

le préfet et/ou le directeur d’établissement

Le corps médical et pas forcement psychiatrique

le juge du siège.

La loi distingue  deux types de mesures sous contrainte :

d’une part, l’hospitalisation complète,

d’autre part, un ensemble de modalités particulières de soins, définies dans un programme de soins (article L. 3211-2-1). Ces alternatives à l’hospitalisation complète peuvent prendre plusieurs formes, notamment une hospitalisation à temps partiel (de jour, de nuit), des soins à domicile, des consultations en ambulatoire, des activités thérapeutiques.

Les nouvelles modalités de soins supposent en toute hypothèse la mise en œuvre d’une phase initiale d’hospitalisation complète à des fins d’évaluation, dont la durée peut aller jusqu’à 72 heures. Avant l’achèvement de celle-ci, un certificat médical spécifique est établi et, s’il conclut au maintien nécessaire de la mesure, une proposition motivée se prononçant sur la forme de la prise en charge et, le cas échéant, sur le programme de soins, est formulée par un psychiatre de l’établissement d’accueil. Des soins ambulatoires, ou un autre mode de suivi contraignant peuvent alors être substitués à l’hospitalisation complète. Une procédure souple permet cependant au directeur d’établissement de rétablir une hospitalisation complète, s’il est constaté que la prise en charge sous une forme moins contraignante ne permet pas de dispenser les soins nécessaires.

La distinction entre les soins ambulatoires et l’hospitalisation complète détermine la compétence du juge au regard  de l’article 66 de la Constitution, 

contrôle obligatoire du juge

1) Le contrôle de plein droit prévu à l'article L. 3211-12-1 du code de la santé publique

Suite à la décision du Conseil Constitutionnel du 26 novembre 2010, un contrôle de plein droit, portant sur la nécessité du maintien de l’hospitalisation complète, a été instauré à l'article L 3211-12-1 du code de la santé publique.

Ce contrôle systématique s’applique à toutes les mesures d’hospitalisation complète, ainsi qu’aux décisions les renouvelant :

– celles décidées par le directeur d’établissement à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent sur le fondement des articles L. 3212-1 (demande d'un tiers accompagnée de 2 certificats médicaux), L. 3212-3 (demande d'un tiers accompagnée d'un seul certificat médical, en raison d'un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade), ou L. 3212-7 (renouvellement de la mesure tous les mois) ;

– celles décidées par le représentant de l'État dans le département sur le fondement des articles L. 3213-1 (hospitalisation initiale), L. 3213-4 (renouvellement de la mesure à 1 mois, puis 3 mois, puis tous les 6 mois), L. 3213-6 (lorsque consécutivement à des soins psychiatriques à la demande d’un tiers, un psychiatre constate la nécessité de soins, le patient compromettant la sûreté des personnes ou portant atteinte de façon grave à l'ordre public) et L. 3214-1 (mesure concernant une personne détenue) ;

– celles prononcées, à la suite d’une déclaration d’irresponsabilité pénale, soit par la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement (article 706-135 du code de procédure pénale), soit par le représentant de l'État (article L. 3213-7).

Le nouveau contrôle intervient avant l’expiration du quinzième jour à compter de l’admission en hospitalisation complète, puis à l’issue de chaque période de 6 mois à compter de la précédente décision judiciaire. En cas d’hospitalisation sans consentement ordonnée directement par la juridiction pénale, le premier contrôle a lieu dans les 6 mois de cette décision judiciaire, puis est renouvelé tous les 6 mois.

Le juge peut, soit maintenir l'hospitalisation complète, soit en ordonner la mainlevée.

Ce dispositif ne s’applique pas aux mesures incluant des soins ambulatoires, même si ceux-ci sont associés à une hospitalisation à temps partiel, de telles mesures ne constituant pas une privation complète de la liberté individuelle relevant de l’article 66 de la Constitution.

2)Le contrôle de plein droit prévu par l'article L. 3213-5 du code de la santé publique

La loi prévoit également une saisine systématique du juge, si, au-delà du quinzième jour de l’admission en hospitalisation complète, le représentant de l'État dans le département n'ordonne pas la levée d'une mesure de soins sous la forme d'une hospitalisation complète, alors qu’un psychiatre atteste par un certificat médical que les conditions ayant justifié cette hospitalisation ne sont plus remplies et que la levée de cette mesure peut être ordonnée (article L.3213-5 du code de la santé publique).

Ces contrôles de plein droit se cumulent avec les recours qui existaient antérieurement à la réforme du 5 juillet 2011, à savoir avec :

– La faculté pour les intéressés, ou les personnes habilitées à agir dans leur intérêt, d’exercer un recours facultatif à l’encontre d’une mesure de soins sans consentement, prévu à l'article L. 3211-12 modifié du code de la santé publique, étant précisé que ce recours a été étendu et peut désormais être formé quelle que soit la forme des soins contraints (hospitalisation complète ou partielle et soins ambulatoires) ;

– La faculté pour le juge de se saisir d'office : Les articles L. 3211-12 et R. 3211-14 du code de la santé publique reprennent ainsi les dispositions permettant au juge des libertés et de la détention de se saisir d’office (ancien article R. 3211-7) et fixent les spécificités applicables dans ce cas.

le contrôle facultatif du juge (article L. 3211-12 du code de la santé publique) : 

Le recours peut être exercé aux fins d’obtenir la mainlevée de toute mesure de soins psychiatriques, quelle qu’en soit la modalité de mise en œuvre (hospitalisation complète ou soins ambulatoires), dès lors que celle-ci relève soit d’un des chapitres II à IV du titre premier du livre deuxième de la troisième partie du code de la santé publique (hospitalisation sans consentement ordonnée par le directeur d'établissement ou le représentant de l'État), soit de l’article 706-135 du code de procédure pénale (hospitalisation d'office ordonnée par la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement ayant prononcé un arrêt ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental). Le juge peut donc être saisi aux fins d’ordonner mainlevée d’une mesure contraignante tant en cas de soins ambulatoires, avec ou sans une hospitalisation partielle, qu’en cas d’hospitalisation à temps complet.

Une décision de mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète, si elle est prise par le juge, ne met toutefois pas nécessairement fin à tout soin psychiatrique délivré dans le cadre d’un programme de soins sous contrainte. En effet, la loi prévoit des procédures ménageant au directeur d’établissement ou au représentant de l'État la possibilité d'organiser des soins sans consentement à l'issue de la décision judiciaire. Ainsi qu’il a été rappelé au I-C ci-avant, il appartient au juge prononçant la mainlevée d’une hospitalisation complète d’apprécier s’il y a lieu d’assortir ou non sa décision d’une mention en différant l’effet durant un délai maximal de 24 heures afin de permettre, à l’autorité administrative compétente, lorsqu’elle l’estime nécessaire, de mettre en œuvre un programme de soins. Si tel est le cas, le prononcé d'un tel différé devra donner lieu à une motivation spécifique dans l'ordonnance.

3) Un contrôle judiciaire de façade

Comment un juge peut il ? :

Contrôler la réalité d’un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade accompagné d’un certificat médical

Contrôler le péril  imminent assorti de deux certificats médicaux

L’on voit ici  que le juge va donner une réponse en fonction du contexte ,, la loi ne distinguant pas la nécessité si le certificat médical initial doit émaner d’un psychiatre ou pas ( cas de Loupian)..

Enfin il est bien évident que cette réforme s’est faite à moyens constants en termes d’effectifs et la saisine d’expert enserre la décision dans un délai de 15 jours, aussi la loi prévoit le principe de subsidiarité des expertises susceptibles d’être ordonnées par le juge, que rappelle le code de procédure civile, tel son article 147 au terme duquel le juge doit limiter le choix de la mesure à ce qui est suffisant pour la solution du litige, en s’attachant à retenir ce qui est le plus simple et le moins onéreux.

Par ailleurs les experts qui seront désignés par le juge doivent  nécessairement désigner un expert figurant sur la liste établie par le procureur de la République, après avis du directeur général de l’agence régionale de santé de la région dans lequel est situé l’établissement ou, à défaut, sur la liste des experts inscrits près la cour d’appel du ressort de l’établissement (cf. articles L. 3211-12 II et L. 3211-12-1 III, renvoyant à l’article L. 3213-5-1). La prégnance de la tutelle de l’autorité administrative en l’occurrence l’ARS s’applique aussi au juge. 

De quel juge s’agit -il ?

Le Juge des Libertés et de la Détention (J.L.D) est compétent pour statuer. Il a aussi la compétence en matière de mandat de dépôt et de rétention des étrangers. En réalité à la différence du juge d’instruction ou du juge de  l‘Application des Peines, le  JLD n’a aucun statut. Nommé par le Président du Tribunal, il est révocable ad nutum, en fonction de la gestion du personnel ou de ses inclinaisons politiques. Ainsi, sous l’ère Sarkozy,  de nombreux JLD furent rapidement transférés de service et se sont retrouvés à juger des affaires de circulation car ils s’opposaient à la politique du chiffre en matière d’éloignement des étrangers…

Ainsi  donc à  cette fragilité de statut se rajoute la mission d’un contrôle impossible; le contrôle du JLD est donc extrêmement marginal.

Cette situation est dénoncée par la commission des affaires sociales de l’assemblée nationale dans un rapport d’information relatif à la mise en œuvre de la loi déposé le 22 février 2012 qui relève que "quand les patients sont transportés au tribunal, les conditions matérielles d’accueil sont rarement adaptées et ne présentent pas toujours des conditions de sécurité suffisantes" et constate que cette expérience peut se révéler traumatisante pour le patient, ce que confirment de nombreux soignants.

Lorsque ces audiences ont lieu au tribunal, il est par ailleurs avéré que de nombreux malades n’y sont pas conduits, un certificat médical s’y opposant "dans leur intérêt" ; le taux de non-présentation serait ainsi de l’ordre de 40 à 45 % en région parisienne et atteindrait même 100 % pour certains établissements !!

 Il est en effet ainsi procédé, de plus en plus souvent, à un simple contrôle « sur dossier » ; la personne hospitalisée sans son consentement se trouve privée, pour des motifs fallacieux, de son droit légitime de rencontrer le juge chargé de contrôler la mesure qu’elle subit et de pouvoir faire valoir ses observations ; d’autant que, dans ces conditions, elle n’aura souvent pas eu de contact avec l’avocat chargé de la représenter, saisi tardivement.

Les rapporteurs de la commission des affaires sociales soulignent encore que cette situation serait imputable à une réticence, voire d’un refus, de la hiérarchie judiciaire d’envisager – parfois contre l’avis des juges des libertés et de la détention concernés – l’organisation des audiences sur le site de l’hôpital ou d’accorder les moyens le permettant.

L’expérience de ces quelques mois d’application de la réforme témoigne pourtant indiscutablement du fait que ce contrôle s’exerce de manière effective (la quasi-totalité des malades assistant à l’audience), dans des conditions satisfaisantes pour tous, dans les juridictions ayant fait choix de tenir les audiences sur les sites hospitaliers ; le rapport précité de MM. Blisko et Lefrand préconise d’ailleurs, au terme de l’enquête réalisée, leur généralisation, solution "éminemment préférable d’un point de vue humain" et respectueuse de la dignité des patients.

Si cette réforme a bouleversé considérablement l’activité des juges des libertés et de la détention dans ce domaine (plus de 30 000 saisines en six mois selon le bilan statistique établi parle ministère) ; l’étude réalisée en janvier 2011 évaluait d’ailleurs l’impact de cette réforme sur les effectifs à 80 ETP de magistrats et 60 ETP de greffiers ; elle préconisait également un abondement du budget de l’aide juridictionnelle en conséquence.

Le remède à cette situation ne saurait être le recours massif à la visioconférence – piste semble-t-il privilégiée par la Chancellerie – dont l’usage ici, encore plus que dans d’autres domaines, s’avère totalement inadapté compte tenu de l'état de santé des personnes hospitalisées. 

Et la liberté dans tout cela ..

L’intervention du juge du siège est motivée par la préservation de nos libertés, rude mission..

Mais la réponse est dans  les motivations de loi et je dois vous lire ces quelques lignes extraites du discours de Grenoble de notre ancien président du 2/12/2010 qui présentait cette loi à l’occasion de la visite d’un hôpital psychiatrique à Antony. Ce discours intervenait suite à la mise en exergue d’un fait divers dramatique intervenu à Grenoble sur une personne de 26 ans par un malade qui avait fugué de l’hôpital psychiatrique de Saint-Egrève.

«Il faut trouver un équilibre, que nous n’avons pas trouvé, entre la réinsertion du patient absolument nécessaire et la protection de la société. Dire cela ce n’est bafouer personne. Mon devoir c’est de protéger la société et nos compatriotes, de la même façon que les personnels. Parce que vous êtes les premiers au contact de cette violence éruptive, imprévisible et soudaine. L’espérance, parfois ténue, d’un retour à la vie normale, – j’ose le dire ici – ne peut pas primer en toutes circonstances sur la protection de nos concitoyens. Mettez-vous aussi à ma place. Je dois répondre à l’interrogation des familles des victimes que je reçois. Les malades potentiellement dangereux doivent être soumis à une surveillance particulière afin d’empêcher un éventuel passage à l’acte. Et vous savez fort bien, mieux que moi, que des patients dont l’état s’est stabilisé pendant un certain temps peuvent soudainement devenir dangereux.»

Et plus loin : «Les sorties de patients, absolument indispensables, doivent être davantage encadrées. La décision d’autoriser une personne hospitalisée d’office à sortir de son établissement ne peut pas être prise à la légère. Je ne dis pas qu’elle est prise à la légère. Vous avez des convictions j’en ai aussi. Je dis que la décision de sortie est une décision qu’on ne peut pas prendre à la légère. Elle ne l’est pas, tant mieux.»

«Mais des gens dangereux dans la rue, c’est un scandale aussi. Je veux dire les deux choses et qu’on ne vienne pas me dire que c’est un cas de temps en temps. Parce que si c’était nous, un membre de notre famille, on ne dirait pas cela. Donc, il va falloir faire évoluer une partie de l’hôpital psychiatrique pour tenir compte de cette trilogie : la prison, la rue, l’hôpital, et trouver le bon équilibre et le bon compromis.»

Prison, hôpital, rue,  voici donc que les mots sont lâchés et la mission assignée à la psychiatrie: la tranquillité et l’ordre social et sa hiérarchie intrinsèque   aussi il n’est pas  étonnant que ce dispositif puisse servir maintenant à éliminer les militants récalcitrants, les contestataires …

Dans la campagne électorale il n’a pas été question de cette loi, pourtant il ne tient qu’à nous d'inverser ce mouvement en re-affirmant les fondements  éthiques et démocratiques qui fondent notre Etat de droit et la singularité du soin. C’est une  histoire que l’on doit écrire dans les prochains mois.

Gilles Sainati

Cet article est issu du texte de mon intervention lors de la journée «Folie et ordre social, entre prévention et prédiction, consentement et stigmatisation, quelle politique pour la « santé mentale ? » organisée par l’association régionale d’aide à la santé mentale « Croix Marine » le 12 mai 2012 à Montpellier

1) voir notamment l’article de Mathias  Couturier , Maître de conférences en droit privé et sciences criminelles: «La loi du 5 juillet 2011 :vers un contrôle social psychiatrique ?» sur https://www.collectifpsychiatrie.fr/

URL source: http://blogs.mediapart.fr/blog/gilles-sainati/210512/la-loi-du-5-juillet-2011-une-loi-biopolitique

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> La Criée

La Criée (Collectif de recherche sur l'institutionnel et l'éthique) a été fondée à Reims en 1985 par des professionnels du champ psychiatrique adossés au Centre Antonin Artaud et rejoint par des soignants d'autres équipes, des psychanalystes et des psychiatres libéraux. D'entrée de jeu, il s'agissait de créer un lieu d'échange et de recherche inscrit dans la transmission de la Psychothérapie Institutionnelle, et la volonté de promouvoir une psychiatrie respectueuse du sujet en souffrance.

La  psychiatrie française avait en effet connu une vague de progrès depuis l'après-guerre, avec l'apport de la psychanalyse et d'une volonté politique de construire le Secteur, autrement dit d'offrir des soins de proximité tout en luttant contre l'enfermement et les processus de ségrégation des malades mentaux.

Mais nous constations déjà un reflux avec une tendance qui est allée en s'alourdissant de mesurer les pratiques humaines avec des normes issues de l'industrie. Cette tendance est aujourd'hui dominante qui promet de tout mesurer de la souffrance et du désir humain, alors que toute notre expérience témoigne de l'incommensurable de l'esprit humain.

Tous nos séminaires et colloques qui se tiennent depuis cette époque reprennent ce souci de l'autre en l'articulant avec une analyse des pratiques et des confrontations nécessaires entre des professionnels de toutes disciplines. Très tôt nos colloques rémois ont accueilli des soignants venant de toute la   France, et même d'autres pays francophones et la qualité des échanges nous a permis une publication régulière aux Éditions ERES.

Depuis le discours d'Antony en décembre 2008 où Nicolas Sarkozy traitait les malades comme des criminels potentiels, la Criée s'est mobilisée et a été partie prenante du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire.

Avec le soutien d'Adeline Hazan et de la Mairie de Reims, soignants et patients, rejoints d'ailleurs par plusieurs familles, se sont mis en mouvement pour faire reconnaître une autre psychiatrie fondée sur des valeurs respectueuses de l’humain, et refusant le tournant actuel d'une psychiatrie sécuritaire, refusant en particulier la nouvelle loi honteuse du 5 juillet 2011 qui permet "l'internement à domicile"

A l'inverse, dans nos pratiques, dont les média se sont fait l’écho, comme dans les échanges que nous proposons, nous témoignons d'une possibilité dès maintenant d'une transformation positive des pratiques, en lien avec les patients regroupés maintenant dans l'association rémoise Humapsy et les familles  regroupées dans l'Unafam.

Notre prochain colloque "Politiques de l'hospitalité" s'inscrit dans cette perspective d'un débat entre professionnels, mais aussi d'un forum citoyen ouvert à tous ceux qui se sentent concernés par cet enjeu humain  et politique. Ce forum soutenu par la mairie de Reims donnera la parole à plusieurs intervenants directement concernés et témoignant de la crise actuelle mais aussi de leurs aspirations.

A bien des égards ces aspirations demandent à être entendues par le nouveau pouvoir que la France vient d'élire, et nous préparons des Assises d'une psychiatrie fondée sur l'hospitalité pour construire le mouvement nécessaire. A Reims le samedi 2 Juin, nous donnerons en quelque sorte le coup d'envoi à ces Assises… 

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>Trouble 307.23 : lecture le mardi 22 mai 2012 à 20h30 au lieu dit Le Vent Se Lève !

Lecture / Performance

DURÉE : 2h00

Tout public

Par Joël Kérouanton

Quid de nos enfermements ? Quid de nos présupposés ? Quid de nos divagations ? Quid de notre liberté ?

Lecture-performance de Trouble 307.23, en présence de l'auteur et de l'artiste plasticien Wen Aloë. Nota.Bene : cette soirée ne s'arrêtera pas à une rencontre littéraire. Trouble 307.23 propose un détournement des Critères diagnostics du DSM-III ; Wen Aloë se réappropriera Trouble 307.23 dans un geste pictural en live. Il sera accompagné par l'ambiance du débat, introduit et modéré par Frédérique Debout, psychologue clinicienne, membre du Laboratoire psychanalyse, santé et travail de Christophe Dejour, secrétaire de rédaction de "Champ psy" et membre du Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire. 

Trouble 307.23, Joël Kérouanton, éd. champ social, 2011 : Deux drôles déblatèrent dans une roulotte avec la ferme intention de donner chair à une pièce de théâtre. Ils divaguent autour de Sébastien Brant et sa Nef des fous, Michel Foucault et son Histoire de la folie… Nul ne sait pourquoi l’un d’eux dérape tout particulièrement sur le DSM-III (Diagnostic and Statistical Manual – Troisième révision), et poétise les Critères diagnostics de ce célèbre ouvrage de psychiatrie.

« Sur invitation de Philippe Duban, directeur artistique de l’association Turbulences !, je lis le DSM-III en évitant de surligner les formes morbides de la folie et en y prélevant les déformations de la vie morale. Je lis et je prélève et j’isole, de façon à ce que ces Critères diagnostiques, remis à dessein dans leur état brut, puissent constituer le contour d’un individu lambda, un ami ? un voisin ? un politique ? un autoportrait ? Ces critères, devenus poèmes, se liraient comme un jeu, non sans humour. Un jeu glissant, puisque quatre à cinq d’entre eux suffiraient à définir le trouble psychiatrique. Trouble 307.23 est dédié à tous les malades d’hier, d’aujourd’hui et demain. » (J.K.) 

Dossier de presse  – http://www.calameo.com/read/00082383985eadf6c6559

Publications – http://fr.calameo.com/read/00082383983453bcc6f8b

Site de l'éditeur : http://www.champsocial.com/book-trouble_307_23,626.html

 

Le Vent Se Lève ! se situe au 181 avenue Jean Jaurès dans le 19e arrondissement.

Métro Ourcq (ligne 5) 
Ourcq/Jean Jaurès (BUS 60)

Nous sommes un peu cachés, derrière le restaurant El Molino qui est également au 181 avenue Jean Jaurès

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>Autisme: l'ABA trouble l'université de Lille (Article Mediapart)

Ce sera l'un des dossiers brûlants des prochaines semaines de l'université de Lille-3 : l'ouverture ou non d'une licence Pro ABA – Applied Behavior Analysis, ou, en français, analyse appliquée du comportement – destinée à former des intervenants à cette méthode comportementale d'apprentissage pour enfants autistes ou présentant des troubles sévères du comportement. Le 6 avril dernier, juste avant les vacances, le conseil d'administration de l'université de Lille-3 a reporté sa décision concernant la création d'une telle licence.

Hasard du calendrier, ce report fit suite à notre enquête, publiée le 3 avril et toujours disponible en cliquant ici, enquête qui révèle les résultats d'une inspection de l'agence régionale de santé (ARS) du Nord dans le centre Camus de Villeneuve d'Ascq où, suite à la lettre d'un parent, les quatre membres de l'équipe d'inspection concluaient que ce centre présente des « dysfonctionnements »constituant « des facteurs de risques de maltraitance susceptibles d'avoir des répercussions sur les enfants accueillis ».

Or, ce centre, fortement soutenu par Xavier Bertrand comme nous le révélions, entretient des liens très étroits avec l'université. Non seulement, au moment de l'inspection de l'ARS, tous les psychologues travaillant au centre Camus étaient titulaires du Master 2 “Psychologie spécialité analyse expérimentale appliquée au comportement” de Lille-3, mais surtout, le centre Camus a été créé par Vinca Rivière, maître de conférences à Lille-3 où elle est responsable d'un master et d'un diplôme universitaire et où elle espérait, jusqu'au 6 avril dernier, obtenir l'ouverture d'une licence professionnelle.

Outre ces dysfonctionnements pointés par l'ARS, notre enquête révélait aussi que Vinca Rivière n'était pas contre « des procédures de punition par choc électrique »: « Ce qu'on appelle “choc électrique”, on le présente en formation en faisant sucer une pile de 9 volts : ça picote la langue, se justifiait-elle. Et ça suffit à changer un comportement, je l'ai vu en Hollande, et l'efficacité en est démontrée depuis les années 50. La personne au comportement inapproprié (là, explique-t-elle, une femme qui se tapait violemment le menton – ndlr) porte en permanence à la taille une ceinture reliée à un émetteur placé sur sa cuisse. » À distance,« l'éducateur actionne le dispositif grâce à sa télécommande dès qu'elle émet le comportement. Ça produit effectivement un choc. Mais l'important est de voir que cette personne, qui ne pouvait plus rien faire, a diminué son comportement et a pu faire autre chose. »

Enfin, Vinca Rivière, à contre-courant des recommandations de la Haute autorité de santé édictées en mars dernier, expliquait pourquoi elle refusait toute pluridisciplinarité au centre Camus : pour avoir la garantie que « 50 % des enfants qui seront pris avant l'âge de 4 ans n'auront plus besoin de suivi au bout de 2 ou 3 ans », il faut « l'ABA et rien d'autre ». Et « la base, c'est notre formation » à l'université.

L'ABA n'a pas été importé d'Amérique du Nord par Vinca Rivière, contrairement à ce qui est souvent affirmé. D'autres universitaires l'enseignent et le pratiquent en France depuis des années avec une tout autre approche. Bernadette Rogé est de ceux-là. Psychologue, formée à l'ABA depuis quelque trente ans, professeur des universités à Toulouse Le Mirail, c'est l'une des expertes du comité de pilotage élargi de la Haute autorité de santé. Elle est aussi fondatrice et directrice d'un SESSAD (service d'éducation spéciale et de soins à domicile) à Toulouse, géré par l’associationCeresa (Centre régional, d'éducation et de services pour l'autisme). Cette structure comporte une équipe pluridisciplinaire de 20 personnes pour 38 enfants présentant des troubles du spectre de l’autisme et fonctionne avec un coût moyen de 29 000 euros par enfant et par an.

Quand et comment avez-vous été formée à l'ABA ?

BERNADETTE ROGE — Au milieu des années 1970, à la fin de mes études de psychologie, j'ai pris l'orientation thérapie comportementale et cognitive (TCC) et fait différentes formations généralistes en TCC. Puis dans les années 1980, je suis allée à Los Angeles où j'ai eu l'occasion de me former auprès du docteur en psychologie Ivar Lovaas, qui a initié cette méthode dans les années 1960. Ça fait donc quasiment trente ans que je suis formée à l'ABA et que je l’ai intégré à ma pratique en France.

Justement, comment le pratiquez-vous ?

D'une manière souple. Car si, au départ, Lovaas pratiquait un comportementalisme pur et dur où les intervenants étaient très directifs avec les enfants en leur imposant des tâches répétitives que l'on renforçait systématiquement (grosso modo, par un système de récompense quand les tâches étaient correctement accomplies), depuis, il y a eu des avancées. On sait aujourd'hui que les enfants autistes ne généralisent pas bien. Si on leur fait répéter indéfiniment une même situation, ces enfants feront certes des acquisitions mais ils ne pourront les reproduire que dans cette situation donnée. Ils ne la transposeront pas à une situation similaire. L'apprentissage alors n'est pas intéressant car ce que l'on veut c'est que, globalement, l'enfant soit davantage adapté au monde qui l'entoure. Cette approche a donc évolué en tenant compte de la dimension cognitive. J'ai ainsi été formée aussi auTeacch chez Eric Schopler, où, pour le dire vite, on adapte l'environnement pour favoriser les apprentissages de l'enfant. J'ai ainsi infléchi mon approche de l'ABA en tenant compte des particularités de ces enfants. Car on ne peut pas se contenter de travailler avec ces enfants en leur inculquant des fonctionnements répétitifs, nous devons aussi tenir compte de leur disponibilité, leur motivation, leur fonctionnement particulier sur le plan sensoriel, cognitif, ce qui demande beaucoup d'adaptations. Enfin, en juillet dernier, je suis allée me former à Sacramento en Californie, au modèle de Denver. Cette approche destinée aux tout-petits travaille davantage sur les émotions et la dimension relationnelle. Elle croise l'approche émotionnelle et l'ABA. Plus concrètement, au lieu de rester sur un plan strictement cognitif ou adaptatif, on pose un contexte qui est celui du jeu et de l'interaction émotionnelle positive. Denver se différencie des méthodes de thérapies par le jeu que sont SonRise ou Floortime, car Denver utilise le jeu, le plaisir, pour appliquer les techniques de l'ABA et faire apprendre l'enfant. Si l'on est moins directif qu'avec l'ABA seul, c'est pour que l'enfant nous suive dans ce que nous lui proposons. L'important, c'est d'obtenir sa motivation pour lui apprendre qu'il a une certaine emprise sur son environnement. S'il dit non ou refuse, on accompagne ce refus en le commentant et en en tenant compte. « Tu ne veux pas ? Alors c'est terminé et on passe à autre chose. » Du coup, on travaille tous les domaines, langage, adaptation, motricité… d'une manière beaucoup plus naturelle et spontanée. Je constate tous les jours qu'avec cette combinaison de méthodes, on peut obtenir des comportements beaucoup plus spontanés. Il s’agit de très jeunes enfants et le fait de tenir compte de ce qu’ils aiment ou pas leur procure une certaine emprise sur le milieu, les motive et leur donne plus d’initiative. Cela ne signifie pas que progressivement on ne va pas aussi poser un cadre et des interdits comme pour tout enfant.

Pourquoi toutes ces évolutions ? L'ABA ne suffisait pas ?

Au départ, ce qui était reproché à l'approche comportementale, c'était d'apprendre à l'enfant un type de comportement plaqué, acquis par renforcement. Et c'est vrai que certains enfants gardaient un style stéréotypé. Mais Sally Rogers, la psychologue américaine qui développe le modèle Denver, montre que si l'enfant est pris en charge jeune, à l'âge où les réseaux neuronaux sont en cours de constitution, et que l'on travaille sans séparer le socio-émotionnel du comportemental, on a plus de chance d'obtenir un comportement naturel. Sally Rogers travaille avec des enfants de 12 mois environ. Moi, parce qu'on n’a pas les mêmes outils de détection en France, je travaille avec des enfants de 2 ou 3 ans. Mais même plus grands, je constate avec un grand plaisir l'évolution des enfants, des évolutions plus intéressantes qu'avec l'ABA stricto sensu.

Au centre Camus de Villeneuve d'Ascq, Mme Vinca Rivière affirme pourtant que l'ABA doit être utilisé seul pour obtenir des résultats…

Je ne veux pas me prononcer sur ces pratiques. Même quand Mme Rivière explique que la technique “du choc électrique” est efficace sur certains adultes ? J'ai dit que je ne voulais pas me prononcer… Mais il faut savoir qu'au départ, dans les années 1960, il y a donc plus de cinquante ans, l'ABA était une technique exclusivement expérimentale : on voulait voir si les enfants et les adultes avec autisme pouvaient, comme tout un chacun, apprendre avec les théories de l'apprentissage et du conditionnement. On apprenait donc à un enfant à appuyer sur un bouton quand il y a une sonnerie, et pour renforcer le bon comportement, on lui donnait un aliment ou un bonbon. Ça n'avait pas beaucoup de sens, mais c'était des expérimentations pour montrer que ce modèle d'apprentissage pouvait marcher chez les autistes comme chez les autres personnes. Ensuite, il y a eu, et c'est dommage, et c'est très malencontreux, des gens qui ont utilisé des chocs électriques. Ça a été dénoncé dès les années 1960, par Eric Schopler notamment, puis même Lovaas l'a regretté. Pour ma part, je pense que sur un plan éthique, c'est absolument exclu. C'est impossible à justifier.

Mais dans les instances professionnelles, vous en parlez ?

Mais cette personne n'est dans aucun réseau professionnel français des thérapies comportementales et cognitives ! Pour ma part, j'ai eu la chance de suivre ces évolutions car je suis membre del'association française des TCC, je suis aussi présidente du comité scientifique de l'Arapi (Association pour la recherche sur l'autisme et la prévention des inadaptations), par ailleurs, en tant qu'enseignante chercheur à l'université de Toulouse Le Mirail, je fais évoluer ma pratique en fonction des progrès scientifiques. On sait maintenant que faire uniquement de l'ABA, ce n'est pas forcément l’idéal. Il faut s'adapter à l'enfant, le mettre au centre du dispositif et utiliser tous les outils, sans entrer en religion pour une méthode.

Tous les outils… jusqu'aux psychothérapies ?

Non, ça s'arrête aux approches éducatives recommandées par la Haute autorité de santé. Il s'agit de ne pas tout mélanger même si l'on peut utiliser certaines psychothérapies avec des enfants de haut niveau, comme des autistes Asperger par exemple. Mais on doit rester dans une approche très pragmatique et concrète correspondant aux besoins de ces enfants et adolescents. Par exemple, à travers un jeu de rôle, on peut construire avec eux un scénario qui mette en scène une situation qui les angoisse, qui est difficile et on peut leur apprendre à mieux se comporter dans cette situation lorsqu’elle se reproduira. La dimension concrète est très importante pour les autistes. Les allonger sur un divan, ça n'a pas de sens quand on sait comment ils fonctionnent.

Diriez-vous qu'avec l'ABA ou les autres méthodes que vous utilisez, les enfants peuvent sortir de l'autisme ?

Non. Dire cela, c'est méconnaître totalement ce qu'est l'autisme. On ne sort pas de l'autisme, on s'améliore. Quand on pose le diagnostic, en général, des choses irréversibles se sont déjà produites dans le cerveau. D'où l'importance de prendre en charge au plus jeune âge. Avec des enfants encore en développement, on peut, avec des méthodes adaptées minimiser les risques d'évolutions négatives et leur apprendre beaucoup de choses. C'est sûr que l'on obtient des améliorations, mais promettre qu'on va les faire sortir de l'autisme, c'est du mensonge.

Comment évaluer alors les effets de la méthode ABA ?

D'abord chaque professionnel s'auto-évalue, il trace les courbes d'apprentissage des enfants, et cela peut se prêter à une évaluation externe. D'ailleurs, si l'on veut faire une publication scientifique, ce sont les évaluations de personnes externes qui comptent. Il faut que ce soit bien sûr fait par des psychologues formés à l'ABA, mais il y en a beaucoup en France, qui ont reçu un enseignement à l'étranger ou en France. Rien que dans mon université, je forme depuis des années des psychologues à l’approche comportementale et cognitive.

Justement comment se fait la formation ? Comment s'articulent la théorie et la pratique et comment s'assurer que, notamment durant les stages, la pratique des étudiants est une bonne pratique ?

Chaque étudiant qui entre en Master Professionnel (après une licence et une première année de master, soit quatre années d’études) consacre d'abord tout le premier semestre à ses cours. C'est une partie théorique très intensive. Ensuite, de janvier à juin, il aura un stage de professionnalisation de 500 heures dans une structure. Et tous interviennent aussi dans des familles. Les étudiants qui vont dans les familles n'y vont jamais seuls. A deux, ils forment un binôme et quand ils rencontrent de trop grandes difficultés, les enseignants les accompagnent. De plus, ils sont supervisés chaque semaine, au cours d'une séance de trois heures. Ils sont vraiment suivis et en aucun cas les étudiants ne partent remplacer des professionnels. C'est une rigueur qui rassure les familles mais qui assure aussi la qualité des pratiques qui leur sont proposées.

Article original sur mediapart

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>Lettre au nouveau Président de la République et aux futurs élus de l'Assemblée

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Monsieur le Président, chers candidats,

C'est avec émotion que je m'adresse à vous, avec émotion et espoir, l'espoir du professionnel et du citoyen qui a assisté impuissant dans le dernier quinquennat à la déconstruction du plus bel outil façonné patiemment depuis des décennies dans la Résistance par la psychiatrie française: la psychiatrie de secteur.

L'émotion est celle d'un citoyen espérant pouvoir enfin redevenir fier de son pays et de la façon dont il traite les personnes souffrant de troubles psychiques. L'état des lieux, Monsieur le Président, laissé par votre prédécesseur, est celui d'un pays qui aurait perdu toute humanité, et qui aurait été guidé par le seul désir de contrôle au service du pouvoir, utilisant la menace et la peur pour convaincre…

L'idéal socialiste qui vous anime ne saurait se satisfaire de cet état des lieux. Aidez-nous à renouer avec notre service public, sa qualité et la philosophie qui en a permis le développement. Que le socialisme montre au monde entier comment respecter, soutenir et faire advenir la part d'humanité, existant en chaque personne présentant un handicap psychique.

Votre prédécesseur dans son violent discours à la télévision du 2 décembre 2008 s'est appuyé sur des thèses du 19e siècle associant crime et maladie mentale et a fait voter la loi du 5 juillet 2012 plus répressive que toutes celles qui ont existé avant, utilisant enfermement et traitement chimique obligatoire, disqualifiant tous les efforts qui ont porté la psychiatrie française au plus haut niveau (Obama et la Chine ont cherché à la connaître).

Au lieu de continuer à développer tous les soins dans le tissu social, il a renforcé les anciens asiles du 19e siècle. La stigmatisation ainsi créée a eu des conséquences dramatiques. Elle a détruit le moral des soignants en les disqualifiant par son propos, annulant 50 ans d'efforts faits pour rendre les soins proches, accessibles, solidaires; il a divisé les divers acteurs de la Santé mentale, favorisé des compromissions réunies dans le Plan de santé mentale de janvier dernier: celui-ci intègre le rapport Couty proposant la dispersion des divers soins nécessaires pour un même malade, ce qui détruit la continuité des soins proposée par la politique de secteur, et pire sous le titre ''d'aidants'' veut lever une véritable "milice" de familles (aidants familiaux) et de patients (médiateurs-pairs aidants, ou "bons malades") pour suppléer les soignants dits défaillants.

Aujourd'hui il est indispensable et nécessaire que le Président, les nouveaux élus, redonnent confiance aux divers professionnels de la psychiatrie et de l'action sociale, qu'ils abrogent la loi de 2011 et le Plan de santé mentale qui la consolide. Ainsi ils permettront leur rassemblement et leur union autour d'un grand projet pour la psychiatrie associant les soins et les compensations sociales des handicaps psychiques.

Savez-vous chers candidats que ce sont 10 millions de personnes qui sont concernées par la psychiatrie, dont 3 millions avec des troubles graves, en comptant leurs familles et leurs soignants ? La stigmatisation était telle qu'ils n'osaient plus se manifester.

La peur étant écartée, la psychiatrie de secteur pourra être reconstruite sur la solidarité, la proximité: une même équipe de soin, met à la disposition de chaque patient, dans la continuité tout au long de sa vie, les diverses acquisitions psychothérapiques et scientifiques en veillant à toujours les associer.

Ce projet né au lendemain de la guerre avec l'expérience de la Résistance, bâti sur la solidarité, doit être reformulé, reconduit, mais associé à la création d'un bureau de la psychiatrie au ministère de la Santé et d'un comité de Sages, nécessaires pour faire évoluer la psychiatrie à la mesure de l'évolution de la société française (ceci existait entre 1970 et 1990 et a fait ses preuves). Ces instances sont plus fiables que des lois.

Confirmez la psychiatrie de secteur qui a fait ses preuves, avec ses soins bâtis sur la confiance, la liberté, à partir d'une vraie rencontre humaine, cette liberté dont le patient a besoin pour se reconstruire, s'appuyant sur ses talents, ses potentialités, sa créativité.

 

Guy Baillon, Psychiatre des hôpitaux en 1969, chef de secteur de Bondy dans le 93, rattaché à Ville-Evrard.

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>Monsieur le Président…

Le 14 mai 2012                                                    

 

 

Monsieur le Président,

 

Déterminés à œuvrer pour que votre élection advienne, nous sommes très heureux de vous voir enfin nommé à la tête de l’État. L’immense espoir que vous avez levé dans la Nation doit se voir concrétisé lors des élections législatives du mois de juin. Nous comptons poursuivre notre effort afin que vous ayez une majorité qui vous soutienne à l’Assemblée nationale.

Votre élection suscite déjà beaucoup d’attente et notamment celle d’apaiser notre lien social si fragilisé par les cinq années passées. Nous croyons comme vous que les valeurs humanistes et progressistes sont une nécessité tant au niveau d’une politique générale que dans nos métiers et nos pratiques quotidiennes.

Le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire a vu le jour au lendemain du discours sur la psychiatrie et les malades mentaux, tenu le 2 décembre 2008 par le Président sortant Nicolas Sarkozy. Les personnes malades s’y sont vues assigner le destin d’une population parfois à exclure, souvent à enfermer, toujours à contrôler. La loi sécuritaire qui en a résulté en juillet 2011, promue sous le joug de l’émotion, a conduit une partie de nos concitoyens, les plus fragiles, tant psychiquement que socialement, à être exclus d’avantage, désignés et stigmatisés, d’être exilés de notre humanité commune.

C’est exactement à partir des valeurs humanistes que nous avons fondé notre Collectif afin de résister au pire, à la relégation d’une partie de nos concitoyens hors du lien social. Nous avons alors dû tenir fermement sur ces positions humanistes, pour proposer toujours et encore une psychiatrie fondée sur l’hospitalité, le temps que le peuple choisisse enfin de changer de Président.

Si sur le terrain notre mobilisation a eu des effets et a contribué à créer des espaces de travail commun entre patients, soignants, familles, monde de la culture et citoyens intéressés, il est nécessaire de sortir l’ensemble des acteurs du champ « psy » de leur abandon, de leur désarroi et du désaveu du travail des professionnels qu’ils ont subi du plus haut sommet de l’Etat. Au niveau national, notre mobilisation, si elle n’a pas suffi à empêcher le vote de la loi du 5 juillet 2011, elle a néanmoins permis à la psychiatrie de sortir de l’ombre et de contribuer au changement de regard porté sur la maladie mentale, notamment dans les médias.

La démolition de notre pacte social a été telle et eu tant d’incidence dans les services publics et en particulier dans le secteur de la santé qu’une politique liquidant l’héritage trouble du Président sortant, de son gouvernement et de sa majorité est actuellement une priorité.

Les diverses atteintes aux fondements républicains et démocratiques d’un état de droit, nécessitent la révision d’un certain nombre de lois dont celles du 5 juillet 2011 réformant les hospitalisations psychiatriques sous contrainte ainsi que la réforme hospitalière de 2009 (loi HPST). Cette dernière a tellement distordu les métiers, les pratiques et les expériences de terrain au profit d’une logique purement gestionnaire, que les citoyens ne retrouvent plus ce service public qui faisait encore, il y a peu, notre fierté nationale.

Comprenant les préoccupations du moment concernant l’Europe, les finances de la Nation ainsi que les priorités pour l’éducation et la justice, nous souhaitons toutefois vous faire part des nôtres concernant les champs du service public, du sanitaire, du médico-social et de l’associatif. Confrontés aux conséquences catastrophiques pour l’accueil et pour les soins psychiques tant en communauté qu’en institution et en soins ambulatoires, il nous faut sensibiliser le gouvernement et les élus de la Nation au défi que nous avons à relever dans l’arsenal législatif et réglementaire qui borde nos pratiques.

Nous souhaitons qu’une politique juste et équilibrée soit élaborée dans le cadre d’une loi générale pour la psychiatrie et le secteur médico-social, permettant aux avancées cliniques d’une psychiatrie moderne et attentive à la personne humaine de se développer.

Enfin débarrassés d’une hyper présidence extrêmement dommageable dans ses menées autoritaires et sécuritaires, nous souhaitons dans les temps prochains pouvoir solliciter auprès de vous un entretien afin de vous exposer les préoccupations qui sont les nôtres.

Nous vous prions de bien vouloir agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre très haute considération.

le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire

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>Politique de l'hospitalité : XIIIème rencontre de la Criée le 1er et 2 juin

 

Reprendre une fois encore cet enjeu crucial de l’hospitalité dans ce moment de crise, traversé d’attaques aux fondements de la Culture, nous conduit nécessairement à une prise de position politique. Comment passer sous silence l’insupportable montée du racisme et de l’antisémitisme, l’hostilité explicite aux étrangers qui menaceraient tellement l’identité nationale qu’il faudrait les expulser sans cesse ?

Se trouve ainsi ravagée toute une tradition du droit d’asile et des lois de l’hospitalité qui sont au fondement même du lien social et des processus de symbolisation. Ce que l’anthropologie a pu reconnaître et investiguer en termes d’éloge du don et du pottlach, de la régulation qu’opère aussi le sacrifice rituel dans la religion monothéiste, tous ces montages textuels et sociaux se trouveraient déniés par une lame de fond que l’on dit postmoderne.

Un tel contexte où la haine de l’étranger vient à se dire de façon de plus en plus explicite ne peut qu’exacerber la peur et la haine du différent, et retentir dans nos pratiques d’accueil de la folie. Quand un magistrat, Serge Portelli, vient nous dire que nous serions dans un « Etat limite », dans la hantise d’un Etat autoritaire qui pourrait produire des ravages inédits, nous aurions intérêt à nous sentir pour le moins concernés, si ce n’est menacés par de telles dérives. Ce qui s’énonce comme une politique sécuritaire, prend le visage précisément de la rupture avec une tradition d’accueil et de soins qu’il ne s’agit pas d’idéaliser, mais qui ne mettait plus en avant, depuis les avancées du Secteur et de la Psychothérapie Institutionnelle, ces idéaux de contrainte et de « soins sans consentement » qui reviennent aujourd’hui sans vergogne.

Cette rupture s’opère, parée maintenant des vertus présumées d’une déshospitalisation qui se trouve pervertie, en rejetant les patients à la rue ou en les condamnant à la prison. Une nouvelle loi nous promet le meilleur des mondes en avançant la généralisation de « soins obligatoires en ambulatoire », soins qui sont imaginés selon une conception du sujet où tout désordre trouverait son remède. Que ces remèdes soient en premier lieu imaginés comme médicaments administrés de force témoigne d’une méconnaissance active, voire d’un refus de tout l’abord psychanalytique du sujet, de la folie, et de soins psychiques fondés en raison sur l’accueil du délire. Nous ne pouvons pas non plus ignorer la possibilité de « psychothérapies sur ordonnance » qui seraient exécutées par des praticiens « certifiés conformes » par l’Etat, censées résoudre ainsi le malaise et produire l’adéquation d’un monde parfait.

L’appui sur l’abord freudien nous sera donc essentiel pour questionner l’accueil de l’étrangement inquiétant (unheimilich) et soutenir en acte la possibilité du transfert. Le concevoir comme une offre en rapport avec le désir d’analyse pourrait polariser cette hospitalité où l’analyste, le soignant offre son espace psychique pour accueillir autrui.

Ce don premier qui est une bejahung, une affirmation primordiale et une ouverture à l’altérité, constitueraient autant de fondations précieuses qu’il s’agirait de relancer sans cesse, dans leur précarité d’autant plus essentielle qu’elle se trouve menacée de façon explicite par l’idéologie de notre époque.

Penser l’hospitalité à l’entrecroisement hétérogène de plusieurs champs s’impose avec insistance, et nous aurons besoin, pour soutenir ce mouvement et retrouver du souffle, d’autres abords philosophiques, littéraires, poétiques … L’enjeu consisterait, en évitant la nostalgie d’un âge d’or, à soutenir les collectifs qui résistent et soutiennent une pratique inventive, tout en évitant un repli dans des institutions qui pourraient vite devenir de petites « forteresses vides », si nous cessions d’y relancer un mouvement de subversion de l’institué.

Patrick CHEMLA

Télécharger le programme et les bulletins d'inscription : La-CRIEE-2012

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>Humapsy à la radio (émission du 13 avril 2012, Radio Libertaire)

Plusieurs membres de l'association Humapsy étaient invités le 13 avril dernier dans les studios de Radio Libertaire pour parler psychiatrie, psychose, folie, société, relation, médicaments, soins psychiques…

L'émission débute un peu brutalement, mais il semble ne pas manquer beaucoup du début de cette émission passionnante dont les intervenants, premiers concernés par les soins psychiques, expriment avec une grande justesse la réalité du monde de la psychiatrie : ce qui est nommé folie ou maladie mentale…

Ecouter l'émission 

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> Un appel du Dr Pierre Sadoul pour le 6 mai 2012

 

Je ne peux rester indifférent aux résultats finaux des élections présidentielles qui précèdent les législatives de juin 2012.

 

J’appelle à voter pour François Hollande contre Nicolas Sarkozy emblème et acteur du dispositif législatif et réglementaire NON NEGOCIE, sécuritaire et NON SANITAIRE, en dérive libérale la plus effrénée.

Le service public de santé et particulièrement la psychiatrie sont karcherisés par ce gouvernement affligé d’une surdité destructrice pour l’Humain !

* Suite au rapport Larcher, la loi HPST, dite Bachelot (hôpital population santé territoire), assigne les équipes et le personnel médical à une obéissance, assortie de menaces, aux impératifs strictement gestionnaires par un contrôle vertical. Rattacher la hiérarchie infirmière aux directeurs d’hôpitaux à qui tout pouvoir est donné sur la carrière des médecins aboutit à un contrôle gestionnaire à la Lénine (mode perversion soviétique), persécuteur, stérilisant, et source de souffrances institutionnelles par réduction des effectifs. Les mesures prises ne visent qu’à l’optimisation du rendement industriel du service public mis en concurrence avec le privé…et en coupe réglée.

* Ce même gouvernement a produit dans la précipitation la loi du 5 juillet 2011 sur les soins psychiatriques sous contrainte, traitant l’usager, le patient, comme individu-objet consommé et consommable. Ainsi les patients « difficiles », considérés comme déviants, doivent-ils être « maîtrisés » par tous moyens y compris coercitifs. Mais le Conseil constitutionnel a exigé la présence d’un juge des libertés pour trancher des éventuelles privations de liberté.

En totale opposition à cette idéologie, je défends l’éthique d’une pratique de l’hospitalité de la folie portée par une psychiatrie humaniste se montrant respectueuse du sujet en souffrance et en grave difficulté. 

A l’heure qu’il est je n’ai aucune garantie qu’un changement de président et de majorité permette d’imaginer être entendu dans les mois prochains. 

Dans cette course de fond je préfère toutefois me battre avec cette nouvelle majorité que nous sommes nombreux à appeler. Charge à moi et à ceux qui sont en accord avec ma position de faire en sorte que nos idées et nos propositions soient diffusées et finissent par être prises en compte. Mettons les décideurs en état de réflexion approfondie sur les conséquences inhumaines des mesures jusqu’ici prises. 

En foi de quoi le mot d’ordre : votez le 6 mai 2012 pour déblayer le terrain et y reconstruire !

Dr Pierre SADOUL,

Psychiatre des hôpitaux, ex-médecin-chef de secteur pédopsychiatrique et membre du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire

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>Une nouvelle loi en psychiatrie pour la prochaine majorité

Communiqué

 

Le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision concernant une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) portée par le CRPA, elle concernait plusieurs articles de la loi du 5 juillet 2011 réformant les soins psychiatriques sans consentement.

Un article de cette loi a été déclaré inconstitutionnel, il porte sur le sort réservé à la catégorie des patients supposés « dangereux » (article L3213.8) qui se trouvent enfermés sans garantie légale contre l’arbitraire de leur « traitement ».

De surcroît, nous considérons comme une grande victoire que les soins sans consentement en ambulatoire ne puissent être « contraints », même s’ils peuvent se révéler « obligatoires » (sic). Cela annule de facto leur possibilité d’application. Il s’agit d’une énorme avancée. Le collectif des 39 se félicitent de cet augure. Ces pseudo-soins de contrôle psychiatrique ne sont pas envisageables dans notre cadre constitutionnel. La prochaine majorité devra réécrire une loi : NOTRE VIGILANCE S’EN TROUVE ACCRUE. Il en est de la responsabilité des acteurs de la psychiatrie et des citoyens de ce pays de veiller à ce que la rédaction de la future loi soit guidée par l’éthique des soins.

Par ailleurs, le rapport du Comité Européen de Prévention de la Torture (CEPT) sur les conditions d’accueil et de soins dans les services de psychiatrie nous rappelle les dérives quotidiennes dans les pratiques, tant sécuritaires que gestionnaires et protocolaires, dérives qui ont conduit à l’internement de force d’un militant politique dans l’Héraut le mois dernier.

Faut-il rappeler que les soins psychiques s’appuient sur la confiance, non sur la défiance, nécessitent du temps afin que la relation soit au cœur du processus de soin ? Il sera donc urgent après les élections présidentielles et législatives de remettre les soins psychiques dans leur ensemble au cœur du débat public.

La loi devant être réformée avant le 1er octobre 2013, l’ensemble des citoyens (usagers, professionnels, familles, élus) mobilisés par l’hospitalité faite à la folie doit peser de tout son poids pour obtenir l’abrogation de la loi du 5 juillet 2011 et que soient établies des pratiques dignes d’une démocratie.

Nous appelons toutes celles et ceux qui se sont mobilisés à nos côtés à confirmer leur engagement pour soutenir et créer des pratiques accueillantes et émancipatrices.

 Le collectif des 39 contre la nuit sécuritaire

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> Positionnement des Ceméa sur l'autisme.

DEBAT DE SOCIETE SUR L’AUTISME

 

 

Positionnement des Ceméa

 

2012 a été déclarée Grande Cause Nationale pour l'Autisme.

Le 8 mars 2012, la Haute Autorité à la Santé (HAS) prononce un avis qui privilégie la prise en charge éducative et comportementale pour les enfants et les adolescents souffrant de Troubles Envahissant du Développement et interdit le "packing", technique d’enveloppement humide et les thérapies d'inspiration psychanalytique.

Dans le communiqué conjoint avec celui de l'ANESM (Agence Nationale de l’Evaluation et de la qualité des Etablissements et Services sociaux et Médico-sociaux), il est écrit qu'il est impossible de conclure à la pertinence des interventions fondées sur les approches psychanalytiques et la psychothérapie institutionnelle dans le traitement de l'autisme.

Par cette préconisation délibérément partiale, la HAS donne quitus aux associations de familles qui ne veulent pas entendre la souffrance associée à l'autisme et qui dénoncent la prise en charge des personnes autistes par la psychiatrie.

C’est la dimension thérapeutique qui est ainsi ignorée au motif d’absence de résultats sur son efficacité.

Or l’état des recherches aujourd’hui, contrairement au discours ambiant dominant qui laisserait accroire aux fondements génétiques de l’Autisme et donc aux seules réponses adaptées éducatives et comportementales, ne peut valider en rien ce seul point de vue. Sans nier une dimension biologique et génétique dans l'étiologie de l'autisme, rien aujourd'hui ne le confirme. Par contre, au quotidien l'autisme est un handicap et une pathologie complexe qui génère beaucoup de questions et de souffrances chez les personnes qui en sont atteintes et chez les familles qui les accueillent.

Personne ne le nie et les équipes psychiatriques sont les premières à reconnaître la grande difficulté dans la prise en charge.

Les travaux les plus concluants s’accordent à énoncer que ce sont les approches pluri dimensionnelles qui apportent les meilleures évolutions, autrement dit celles qui allient les réponses éducatives, comportementales et thérapeutiques, sans exclusive.

Les pédopsychiatres et psychanalystes les plus en recherche sur cette question comme Pierre Delion, ne disent rien d’autre… et ne pratiquent rien d'autre. Les familles des enfants dont ils ont eu la responsabilité de prendre en considération les attentes anxieuses et les soins et dans les formes parfois les plus difficiles de l'autisme, ne le leur ont jamais reprochés ces choix.

Les attaques et les pressions de quelques associations de familles d’enfants autistes qui ne représentent qu’elles-mêmes et non l’ensemble des parents, attaques relayées par quelques parlementaires ont réussi à imposer un seul point de vue, une seule approche, plus empreints de prédictions que d'analyses critiques et ont trouvé le champ de la psychiatrie et de la psychanalyse comme bouc émissaire, chose facile en ces temps où la complexité du sujet humain ne correspond pas au modèle néo-libéral de l'homme auto-entrepreneur, toujours adapté, toujours asservi, cette servitude volontaire dont parle Roland GORI.

Les Ceméa ont toujours défendu, dans leurs engagements politiques (Pas de zéro de conduite, Les 39 Contre la nuit sécuritaire, l'Appel des Appels) et pédagogiques les réponses qui prennent en considération la personne dans sa globalité et sa complexité.

L’être humain ne peut se réduire à une collection de comportements qu’il faudrait rééduquer pour une meilleure adaptation. La question de la relation aux autres et au monde est assujettie à la question du désir, des émotions et des intelligences partagées. Et à l'inscription de chacun dans une histoire et une culture dont les aspects inconscients fondent l'humanité. Nos pratiques de formation dans le champ de la psychiatrie et de l'éducation spécialisée ont toujours récusées les réponses univoques.

C'est en cela que l'observation, base de la clinique constitue un élément de réponse, mais aussi que la psychanalyse et la psychothérapie institutionnelle ont permis et permettent encore de considérer l'autre quel que soit son état dans sa dignité d'homme. C’est en cela que les réponses éducatives et soignantes sont nécessairement complémentaires.

Nos propositions de formation dans le champ de la psychiatrie, de la santé mentale et du médicosocial s’inscrivent dans ce courant dont nous pensons aujourd’hui la pertinence entière. La dénonciation il y a quelques jours, par l’association « Egalited », association de familles d’enfants autistes, comme organisme de formation prônant ces approches dites dépassées et dangereuses, dans un courrier adressé au ministère des affaires sociales et de la santé, aux agences régionales de santé (ARS) et aux préfectures de régions illustre bien ces pratiques de délation sans connaissance des réalités de nos actions de formation.

Il est important que les militant(e)s du réseau et pas seulement ceux impliqués dans le champ de la psychiatrie et du travail social mesurent que ces débats de société et ces questions spécifiques sont en fait des attaques construites et relayées d’une pensée adaptative et normative qui touchent aussi les questions éducatives. La commission nationale du secteur Travail Social et Santé Mentale du 8 mars dernier a eu un temps de débat et de positionnement sur ces questions et a constitué un dossier d’articles de références qui permettent de mieux s’informer et de prolonger le débat.

Le catalogue Santé Mentale 2013 paraîtra d’ici la fin du mois d’avril, nous y maintenons ces propositions de formation qui seraient à rejeter ; le prochain édito de VEN portera sur cette actualité et celui de VST à venir en fera écho.

C’est bien le rôle d’un mouvement d’Education Populaire et d’Education Nouvelle de résister à toutes les formes d’aliénation et celles notamment les plus insidieuses.

 

Dominique BESNARD

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> LE FORUM FOU, c'est ce dimanche au Petit Bain !

LE FORUM FOU, c’est ce dimanche (15/04/) au Petit Bain !

Après le meeting du 17 mars à Montreuil, dernière mobilisation avant les élections… à l’initiative de l’association HumaPsy !

(Pour ceux qui n’étaient pas au meeting, pardon de vous prévenir à la dernière minute…)

La salle de concert du  Petit Bain accueillera donc trois moments de discussions…

(enregistrées mais pas filmées, on mettra en ligne le Podcast)

15 H : Les « questions qui fâchent » :

Ce sera l’occasion d’évoquer la loi du 5 juillet 2011, le rôle des associations de parents ou d’usagers, l’intervention du Juge des libertés, les difficultés pour dénoncer la maltraitance qu’on peut subir à l’Hôpital … ou toute autre question que vous proposerez pour débattre.

Pause

16 h 30 : Les témoignages

Soignants, soignés, citoyens qui n’avez peur ni des uns (car une psychiatrie humaniste existe) ni des autres (parce que vous en connaissez !), venez vous exprimer, car il faut que ça se sache … Quoi ? Ce que vous voulez ! Vous pourrez aussi remettre vos écrits : ils seront mis à la disposition des participants du forum qui pourront en donner lecture.

Pause

18 h : Et maintenant ?

Quelles pistes pour sauvegarder un accès à des soins qui ne se réduisent pas aux seuls médicaments, au recours à la contrainte et autres dérives sécuritaires ?

La question de la psychiatrie pourra-t-elle se poser dans le débat des présidentielles ?

Quelle hospitalité pour la folie ? – demandent les 39…

Et si on la voulait MAINTENANT ?

http://humapsy.wordpress.com/

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> Je suis là parce que vous êtes là.

L’intervention audio de Madame Jacqueline Berger le 17 mars 2012 à « La parole errante » au meeting

est sur cette vidéo cliquez ici

Je suis là parce que vous êtes là.

Parce que j’ai rencontré des gens, des soignants, des institutions pour jeunes enfants qui avaient la culture analytique comme boussole.

Qu’au plus sombre des années avec mes fillettes souffrant de désordres autistiques très excluant, un peu par hasard, j’ai croisé l’orientation psychodynamique et  que je n’ai jamais eu à le regretter.

Il y a cinq ans j’ai écrit un livre pour témoigner de cela.

Non pas de mon parcours personnel ni des réussites de mes enfants, tout cela appartient à l’ordre de l’intime. Mais pour dire que dans l’autisme infantile il y a quelque chose à soigner, qu’il y a du temps à prendre, à donner pour cela.

Que ce qui est efficient, c’est la réparation par le lien.

A contre-courant des discours qui catégorisent à l’excès les symptômes, du discours qui enferme dans la déficience, le défaut génétique et /ou neuronal, les ratées de l’organe cerveau, je veux redire qu’il y a la possibilité d’une évolution positive des syndromes autistiques, que les enfants qu’on dit «autistes» ne sont pas programmés pour rester enfermés dans leur structure ni à l’être par essence, qu’il y a autant d’autismes que d’enfants diagnostiqués ainsi, qu’une fois le diagnostic posé, les souffrances reconnues, il faut l’oublier pour construire le chemin singulier de chacun, qu’il n’y pas de modèle, qu’il y a tout à inventer pour chaque sujet, à chaque fois et que cela demande une énergie considérable pour les parents et pour tous ceux s’en occupent.

Que c’est le devoir de la société toute entière que de les y aider.

Que la psychanalyse a quelque chose à faire là dedans puisque son objet est la relation à l’Autre, celui qui n’est pas Soi, la bonne distance à l’Autre qui n’est jamais une évidence et encore moins dans l’autisme.

Que ce travail porte ses fruits en matière d’être au monde, ou d’autonomie pour être dans un vocabulaire plus à la mode.

J’ai écrit en 2007 :

« L’« autisme », tel qu’on l’entend aujourd’hui comme pathologie, n’est pas une fatalité, une défaillance « irrémédiablement inscrite dans les lois du corps d’un individu, mais un phénomène évolutif dont les mécanismes s’enclenchent au début de la vie. Il résulte de blessures plus ou moins profondes, plus ou moins précoces dans le « sentiment d’existence » que construit petit à petit l’être humain, être social autant qu’animal.

Il faut en finir avec cette vision d’un mal encore inconnu, qui serait commun à tous. L’« autisme » est simplement une manifestation, celle d’une souffrance profonde dans la manière d’être au monde, particulière à chaque histoire.

Des soins, des réparations sont possibles, d’autant plus porteurs d’espoir qu’ils sont effectués de façon précoce. Encore faut-il redonner à chaque enfant présentant des troubles, l’individualité qui va de soi pour les individus « sains », et dont le qualificatif « autiste » les prive aujourd’hui.

L’« autisme » qualifie un continuum de déviances, de la plus faible à la plus forte, de la plus supportable,  masquable, à la plus excluante. En plaçant l’individu, et singulièrement l’enfant, souffrant de symptômes autistiques, au centre de la réflexion, en décryptant ses perceptions singulières, il s’agit de faire cesser le regard qui aliène. L’« autisme » est une pathologie qui demande qu’on ne s’arrête pas aux apparences.

 J’ai écrit « Sortir de l’autisme » pour que le regard change :

—que l’on cesse de mettre tous les moyens dans recherche d’une Cause avec un grand C, recherche illusoire, parce qu’à mon sens il y autant d’autismes que de sujets

—Que l’on remette l’enfant tel qu’il est au centre du regard.

 Aujourd’hui je suis venue pour dire que, avec le recul du temps, et l’expérience s’accumulant, je ne change pas une ligne de ce que j’ai écrit en 2007.

L’exclusion dont je décortiquais les mécanismes est en marche à plein régime, il manque toujours autant de places spécialisées, et comble de l’absurde, c’est à ceux qui au jour le jour consacrent le plus d’efforts à penser ce qui se joue pour chaque enfant en souffrance,

à bricoler du sur-mesure pour chacun d’eux que s’élève l’anathème.

Aujourd’hui ceux-là sont sommés d’arrêter de penser. Penser n’est pas rentable, il faut faire. Il faut que les interventions soient visibles dans le court terme, qu’elles se plient à critères d’évaluation qui sont les mêmes pour tous, qu’elles aient l’air de…

L’air de quoi ?

L’air d’être  efficaces, que les cases soient correctement remplies, peu importe si c’est au détriment du sujet et de son devenir, peu importe si c’est au détriment du sens.

L’approche analytique, la voie psychodynamique, bientôt bannie de l’autisme ? Voilà LA réponse au scandale du manque d’accueil des sujets autistes dans la société. Quelle formidable réponse ! Déshabillons Paul pour habiller Pierre, moins de soins pour une éducation/rééducation intensive!

Le motif ? Fait pas la preuve immédiate de son efficacité. Ses procédures ne sont pas standard.

Et oui cette approche qui n’est pas une simple technique mais une culture considère qu’il n’y a pas une unique manière d’être au monde.

Je suis venue pour redire qu’en matière d’autisme chaque chemin est singulier.

Je ne suis pas une preuve scientifique,  au sens d’expérience observable par tous et reproductible (heureusement !)

Mes filles sont de jeunes adultes. Je suis venue ici pour dire que je considère que le chemin que j’ai fait avec elles est une réussite, que la vie me plaît, qu’elles sont sorties d’une forme de mal être particulièrement grave, que ce chemin a été créé avec l’aide de gens qui n’avaient pas arrêté de penser, dont le travail était difficilement évaluable objectivement.

Que j’ai eu la chance d’être étayée par des soignants qui n’avaient pas les réponses, des protocoles standardisés, reproductibles d’un enfant à l’autre.

Mes enfants ont eu la chance d’échapper aux dénominations trop rigides, aux évaluations, aux tests. A quelques années près.

Je considère que c’est une chance.

Je ne suis pas seule à penser cela, mais il faut savoir que la majorité des parents n’appartiennent à aucune association. Par manque de temps, d’énergie ou par désir d’échapper aux projections peu joyeuses qui enferment très tôt dans un destin sûr, catégorisé selon des principes théoriques valables pour tous.

Le développement ces dernières années des évaluations, des diagnostics, l’inflation des personnels intermédiaires s’occupant d’autisme, n’a en rien fait reculer le scandale du manque de places pour les enfants qui ne grandissent pas comme les autres.

Ce scandale demeure et n’a rien à voir avec psychanalyse ou pas psychanalyse, il a à voir avec une société hautement individualiste où règne le dieu de la performance.

Je trouve injuste le mauvais procès fait aux soignants aujourd’hui, qui sont aux prises tous les jours avec cette pathologie qui dévore, avec des moyens sans cesse restreints, des contraintes qui augmentent sans cesse, ils ont bien du courage. Les voilà maintenant sous la menace de positions extrêmes qui réclament une interdiction pure et simple de leur existence. Actée par une loi.

Aujourd’hui, je trouve dangereux l’absence de contre pouvoirs aux discours péremptoires, réducteurs, qui fleurissent sur fond d’indifférence et de bons sentiments, les medias sont de simples chambres d’échos et ce qui filtre, c’est qui est le plus souvent répété ou ce qui est le plus fort. Les journalistes n’ont structurellement plus les moyens d’exercer ce rôle de contre pouvoir, pour le dire plus simplement, d’informer par des reportages, des enquêtes au long cours. Pour savoir quels sont les intérêts en jeu, qui représente quoi, d’où vient l’argent…

Toutes ces questions qui resituent une parole dans son contexte et lui donne sa valeur relative.

L’autisme ne doit pas rester dans le champ clos des passions que l’on voit aujourd’hui, un débat à huis clos confiné aux parents soignants, aidants, il est urgent que tous les citoyens se sentent concernés, parce que ce qui se joue là, c’est l’avenir de tous nos enfants, c’est le monde de demain qui se préfigure. Beaucoup d’espaces de pensée de l’humain sont en train de se refermer au profit d’une « gestion » qui extrapole abusivement les résultats de recherches scientifiques pour exclure de manière raisonnée des catégories de population. Au motif qu’on ne peut pas faire autrement.

J’ai écrit avec l’espérance de faire changer un tant soit peu le regard parce que quand la méconnaissance grandit, la maltraitance ne tarde pas à suivre.

J’ai pris la parole de manière gratuite, n’étant plus personnellement concernée par l’autisme infantile, ne représentant ni soutenant aucun courant de pensée en particulier. Peut-être est-ce le dernier avatar du combat que j’ai mené pour et avec mes filles. Je ne me sens ni coupable ni irresponsable, je me sens concernée par l’inhospitalité grandissante envers tout ce qui sort de la norme et par l’exacerbation du chacun pour soi.

Je me sens concernée par l’infantilisation massive qui nous gouverne, qui nous rend chaque jour un peu plus objet, un peu moins sujets de nos vies.

—Pour que l’on regarde autrement les désordres visibles, les symptômes qui sautent aux yeux, qui, parfois même, pétrifient ceux qui sont en face en provoquant des réflexes de peur ou d’angoisse.

—Pour que ces manifestations soient comprises pour ce qu’elles sont : des manifestations de souffrance, et non      comme la signature d’un état de déficience irrémédiable ou comme quelque chose de menaçant pour soi-même.

Lorsque l’on regarde les choses comme cela, —et c’est tellement important pour un enfant en difficulté— qui comme tous les autres enfants est un sujet en construction,

on donne une petite chance supplémentaire à cet enfant de “naître jusqu’au bout”, selon l’expression de Barbara Donville, c’est à dire d’entrer en société.

Et c’est bien là que le regard de tout un chacun, et pas seulement des parents ou des proches est en jeu : encore faut-il que cette société ait envie de comprendre ce qui se joue

pour des enfants qui ne grandissent pas ordinairement, encore faut-il qu’elle accueille les déviances à une normalité ambiante, qu’elle entende qu’il y a, là aussi, dans ces différences, une source de richesse et de créativité.

J’ai écrit ce livre avec l’ambition de toucher un public hors de ce qu’on pourrait appeler « le monde de l’autisme »,  un public plus large que celui des parents, pour l’entourage au sens large, parce que le regard que l’on porte sur les symptomes pour un enfant en construction est capital, parce que le petit humain, tout petit humain, quelle que soit sa manière de grandir, quelles que soient ses maladies, ses souffrances, se construit d’abord dans les regards d’autrui.

Qu’il y a des regards qui ouvrent des perspectives, un avenir, ou qui à l’inverse enferment.

Des regards, des projections liées au vocabulaire employé —et à ce qu’il véhicule de figé— qui soutiennent ou blessent davantage.

J’ai voulu axer cette intervention sur le thème du regard dans l’autisme infantile parce qu’il y a deux manières d’envisager des enfants avec des difficultés relationnelles et comportementales aussi importantes : soit les regarder à travers ce qui leur manque, soit considérer d’abord leurs capacités.

Le tâtonnement du regard c’est l’abandon de la recherche d’une certitude, c’est prendre le risque de ne pas savoir, de se tromper— mais on ne vit pas sans risques et c’est plus  fécond, plus porteur de vie que les projections peu joyeuses qui enferment très tôt dans un destin sûr, catégorisé selon des principes théoriques valables pour tous. 

Quand on parle de touts-petits, avec qui, tout reste à construire — dans les études scientifiques on évoque de plus en plus souvent la plasticité neuronale—

le regard qui s’attarde sur le « plein »  est le plus créatif, c’est celui qui rend à l’individu son existence entière en tant qu’individu parce qu’il respecte ce qu’il y a de positif,

qu’il encourage le bond en avant existentiel, sans réduire la dimension de l’être à ses difficultés.

Ce regard donne une marche à suivre au quotidien.  Parce que c’est au quotidien que tout se joue, dans tous les menus faits et gestes, dans les menues paroles tout autant que dans des temps de soins ou d’éducation. Une question restée sans réponse, un acte inapproprié face à une demande, même si cette demande est, elle aussi, inappropriée, ajoutent aux blessures qui nourrissent un sentiment d’inexistence déjà trop prégnant.

La capacité de réassurance, de contenance, nécessite d’apprivoiser ses propres peurs,

de s’interroger sans cesse sur ce qui nourrit notre propre regard sur le monde et sur l’Autre. Cela amène parfois à se confronter à ses vertiges personnels car les terreurs qu’ éprouvent ces enfants sont les nôtres, subies à un moment ou à un autre de notre existence, apprivoisées petit à petit grâce à une chance, à l’amour des proches…

Si nous sommes bien portants c’est aussi que avons échappé à la sidération, entendue comme pétrification des émotions, mais, chez chacun de nous, il y a des traces de ces blessures existentielles, de ces grandes peurs fondamentales ayant partie liée avec la crainte de la mort. Et il ne faut pas grand chose pour les réactiver .

Il n’y a pas une manière unique d’être au monde, une manière unique de réussir sa vie, mais tout humain se construit en intégrant à l’intérieur de soi les différents regards d’autrui. Et le regard porte nos sentiments conscients mais ausi nos émotions inconscientes.

Ce dont j’ai voulu porter témoignage, ce n’est pas de mon histoire personnelle, mais de ce poids du regard, pour que chacun se sente concerné. J’ai éprouvé tout au long du parcours qui a été le mien en tant que mère le réconfort du regard qui aide à être fière, qui aide à passer le gué, à trouver des solutions, à prendre conscience de son propre regard sur son enfant, à le changer et à s’en trouver heureux, à rendre la vie joyeuse

en se sentant appartenir à la communauté des autres.

J’ai aussi éprouvé l’amertume de regards qui enfoncent dans un rôle de victime, qui excluent, qui portent des coups à la confiance en soi, disqualifient.

Les parents ne peuvent pas être seuls, même regroupés entre eux, ils ont besoin de toute la société pour inventer sans cesse de nouvelles solutions réelles, humaines, qui ne soient pas dans le semblant de l’inclusion mais leur permettent une inscription véritable dans la communauté humaine, des bricolages singuliers qui font reculer l’angoisse pour tout le monde et permettent aux créativités singulières de s’épanouir, pour l’enrichissement de tous.

Le bien-être ne peut se satisfaire de réponses standardisées, protocolaires, reproductibles de l’un à l’autre, qui engendrent une ghettoïsation. Il n’y a pas de solutions massives à l’autisme, préserver le foisonnement, la légèreté de petites structures qui encouragent la création me parait être la voie de l’espoir.

Plus que tout, les enfants gravement perturbés ont besoin un regard qui n’évalue pas avant de voir, qui ne mesure pas tout à l’aune d’un étalon standart, un regard qui donne à autrui la possibilité d’être pleinement ce qu’il est, dût-il être étrange et dérangeant.

Un regard qui donne de l’existence, qui ne cherche pas à dominer. C’est un regard qui donne, qui soutient, qui partage, qui n’affirme pas sa supériorité fut-ce par la voie détournée de la pitié.

Jacqueline Berger

Le 17 mars 2012

Jacqueline Berger. Sortir de l’autisme. Ed. Buchet Chastel, 2007. 18 euros

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> Vidéos du meeting du 17 mars 2012 à Montreuil

Ouverture du meeting :

 

 

Débat sur le sécuritaire (1) Meeting des 39, 17 mars 2012 à Montreuil… par collectif39

 

Débat sur le sécuritaire (2), Serge Portelli : collectif des 39- Montreuil le 17.03… par collectif39

 

Débat sur le sécuritaire (3) collectif des 39- Montreuil le 17.03… par collectif39


collectif des 39- Montreuil le 17.03… par collectif39

Débat sur le sécuritaire (4) Front de gauche :


collectif des 39- Montreuil le 17.03… par collectif39

Débat sur le sécuritaire (5) : Pas de zéro de conduite :


collectif des 39- Montreuil le 17.03… par collectif39

Débat sur le sécuritaire (6), Lysia Edelstein, protection judiciaire de la jeunesse


collectif des 39- Montreuil le 17.03… par collectif39

Débat sur le sécuritaire (7), Pierre Joxe


collectif des 39- Montreuil le 17.03… par collectif39

Toutes les vidéos en cliquant ici

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> Militant dans l'Hérault, une folie ?

Communiqué de presse

Militant dans l’Hérault, une folie ?

Un communiqué commun de la section de Loupian et du comité régional Languedoc Roussillon de la Ligue des droits de l’homme nous apprend que, le 26 mars 2012, un militant défenseur de l’environnement a fait l’objet d’un arrêté du maire de sa commune, confirmé deux jours plus tard par le préfet de l’Hérault, ordonnant son admission en soins psychiatriques.

Ce militant, qui manifestait par une action non-violente son opposition à un projet de déclassement d’une zone Natura 2000 dans sa commune, a été hospitalisé aux motifs allégués qu’il présentait des troubles mentaux « qui compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public », troubles qui se manifestaient par « des propos désobligeants et insultants » et par le fait qu’il s’était « cadenassé à une grille de protection de la mairie ».

La motivation ahurissante de cet arrêté, censée caractériser un trouble grave à l’ordre public – à moins que le préfet de l’Hérault ne considère que des propos désobligeants ne compromettent … la sûreté des personnes ! – révèle une dérive inquiétante : après les placements en garde à vue et les poursuites judiciaires de plus en plus fréquents, le pouvoir exécutif s’est trouvé une nouvelle arme contre les militants actifs, l’hospitalisation contrainte en psychiatrie.

Ce militant, au mépris de ses droits les plus élémentaires, a été placé à l’isolement pour avoir refusé le traitement que l’on voulait lui imposer, a été interdit de tout contact avec ses proches pendant plusieurs jours, et a eu le plus grand mal à obtenir communication des décisions le concernant !!

Les organisations signataires, membres du collectif « Mais c’est un homme », dénoncent l’usage inadmissible par l’autorité administrative de ce pouvoir d’internement – survivance archaïque au regard des législations de nombreux autres pays européens – à des fins coercitives et les atteintes graves ainsi portées aux libertés et aux droits sociaux.

Elles exigent la mainlevée immédiate de la mesure de soins psychiatriques imposée à ce militant, encore hospitalisé à ce jour malgré un certificat médical récent favorable à la levée de celle-ci.

 

LDH Ligue des droits de l’Homme

Sud Solidaires – Santé Sociaux

Advocacy France

Syndicat de la Magistrature

Union syndicale de la psychiatrie (USP)

Cercle de réflexion et de proposition d’actions sur la psychiatrie (CRPA)

Collectif des 39 « Quelle hospitalité pour la folie ? »

 

 

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> Pour accompagner quelqu’un, encore faut-il marcher sur ses deux jambes !

Pour la journée de PI de Bruxelles du samedi 24 Mars 2012

 

 

Pour accompagner quelqu’un, encore faut-il marcher sur ses deux jambes !

Quand Pierre Smet m’a proposé d’intervenir dans cette 26° journée de PI, j’étais bien loin de me douter de la campagne idéologique qui allait exploser contre la psychanalyse et la Psychothérapie Institutionnelle, et mettre Pierre Delion en place de bouc émissaire pour sa pratique auprès des enfants autistes.

J’étais aussi bien loin de me douter que Pierre ferait l’objet d’un marchandage assez abject de certains de ses collègues le lâchant au milieu du gué, c'est-à-dire  lâchant le packing pour prétendument sauver la psychanalyse et la PI !

Il est clair qu’il va nous falloir encore plus de détermination dans nos pratiques pour éviter de tels sauveteurs ne voulant pas se rendre compte de leur responsabilité dans la destruction de la psychiatrie.

Jamais depuis longtemps, la double aliénation dont je voulais vous parler n’aura été aussi explicite et violente !

Nous ramenant à une situation que je qualifierais bien de fascisante et propice à un climat de chasse aux sorcières, pour ne pas dire de chasse à l’homme…

La semaine dernière à Montreuil, comme l’a souligné MC Hiebel, malgré la standing ovation que le grand meeting des 39 a réservé à Pierre Delion, sa peine nous faisait tous très mal. Alors bien sur nous sommes à ses cotés, mais je crois aussi qu’il ne faut pas en rester là et qu’il s’agit de traverser cette zone de douleur, de trauma, pour en faire une colère active, celle de l’intelligence de la situation, de l’art de la guerre qu’il va falloir mener contre nos ennemis, et en même temps de notre appui sur les collectifs que nous animons.

Au sujet de ces collectifs, une remarque : depuis trois ans que le combat s’est radicalisé contre le discours fascisant de Sarkozy et d’une partie de l’appareil d’Etat, l’implication des patients à nos cotés a été de plus en plus forte. Au point que dans certaines manifestations que les 39 ont proposées, ils étaient probablement plus nombreux que les professionnels.

Mais pour être au plus juste, je voudrais vous parler de ce qui s’est passé dans ma praxis, et qui pourrait se passer partout si nous nous donnons les moyens.

Comme certains ici le savent, nous avons démarré à Reims dès 1980 en nous réappropriant à notre manière et à notre rythme la méthode de la Psychothérapie Institutionnelle.

Certes il y avait eu pour ma part quelques années de tâtonnements: j’avais été séduit par la geste basaglienne et le projet d’en finir avec l’asile.

Mais très vite sur le terrain de la praxis, j’ai pu constater l’impasse de ce discours dont il faut remarquer combien il a été récupéré et instrumentalisé par l’idéologie néolibérale. Aujourd’hui le nouveau discours antipsychiatrique et antipsychanalyse a pris le pouvoir dans les ministères, à l’OMS, et maintenant dans certaines associations  de parents.

Qu’on ne s’y méprenne pas : je ne confonds pas un discours qui a pu porter l’illusion, autrement dit le désir de transformation et même de révolution ; avec sa perversion qui a pulvérisé la psychiatrie en l’attaquant dans son essence même.

Les responsabilités sont multiples et il faudra bien un jour faire l’inventaire de tous les « collabo » qui auront contribué à cette situation, mais l’urgence consiste à analyser la situation présente.

Donc retour à Reims : nous avons donc commencé par un club thérapeutique dans l’ambulatoire, club qui continue à vivre et à fédérer aujourd’hui l’ensemble des clubs du service. Puisqu’entre temps, nous avons considérablement développé le dispositif ambulatoire, avec un réseau d’AT et un autre d’AP, un centre de jour à la campagne, le centre Artaud au centre ville de Reims constituant le lieu de rassemblement et d’orientation de l’ensemble.

 Nous avons aussi repris un travail solide à l’hôpital avec un club qui gère la vie quotidienne et s’articule avec les clubs hospitaliers, mais aussi avec le GEM articulé comme un club etc.…

Rien de très original pour tous ceux qui connaissent les principes directeurs de la Psychothérapie Institutionnelle, sauf peut-être que le centre de gravité de notre travail s’est déplacé en ville, l’hôpital s’inscrivant comme un des lieux possibles du soin.

Ce qui surprend, c’est plutôt notre sentiment de solitude, la rareté actuelle des expériences de terrain et les difficultés innombrables auxquelles nous nous heurtons, tant du côté des administrations que des collègues.

IL est important de souligner cette démoralisation, cette apathie qui prévaut dans tous les métiers de la psychiatrie, tout en soulignant qu’il s’agit aussi des effets d’une destruction qui a été voulue, pensée et exécutée ! Ce qui est inquiétant c’est le peu de résistances rencontrées, et même le désir de servitude volontaire manifesté par de nombreux soignants courant au devant des attentes de l’Etat ! Bien avant que l’indépendance professionnelle des psychiatres soit vendue pour un plat de lentilles, on a pu constater cette soumission à tous les diktats normatifs, alors pourtant qu’il n’y avait pas grand risque à y opposer un refus !

Je ne crois pas que cette soumission soit explicable par des erreurs théoriques sur l’analyse de la fonction de l’hôpital, ou sur l’approche psychanalytique. Je crois que nous nous sommes heurtés à une espèce de catastrophe politique qui reste à analyser : une défaite sans combat.

Sans doute, les analyses de G. Agamben, et en particulier Homosacer sont elles fort utiles pour relier cet effondrement à la catastrophe qui a ravagé le 20° siècle et que C. Lanzmann a nommée Shoah. Comme si une frontière avait été franchie dans la possibilité de l’impossible de la destruction de « l’espèce humaine » (Robert Antelme) ; et qu’une fois cette frontière franchie, elle soit devenue totalement poreuse.

Traiter l’humain comme du bétail, pratiquer le tri et la sélection, évaluer ceux qui méritent de survivre et ceux qui devront être liquidés en premier etc.…

Il m’aura fallu un certain temps pour supporter cette idée d’une continuité dans la discontinuité des processus historiques, et d’une réappropriation de l’idéologie nazie par le néolibéralisme.

Pas de raccourci sommaire, ni de simplification abusive en avançant cela, mais la nécessité d’affronter une réalité et donc de l’analyser si nous voulons nous dégager de cette passivation dangereuse et de l’incorporation insidieuse des discours « santémentalistes ». Je fais allusion au développement important que Mathieu Bellahsen a consacré dans sa thèse de médecine à ce qui se présente comme nouveau discours des bien-pensant prônant la déstigmatisation des « handicapés psychiques » etc.…Vous entendez comme cette idéologie malfaisante et destructrice de la psychiatrie s’est avancée en détruisant, dévoyant les mots de la mouvance désaliéniste, puis produisant une novlangue qui tourne sur un vocabulaire restreint mais efficace pour nier la réalité de la maladie mentale, de la psychose, et prôner une nouvelle conception du monde. Ce modèle qui se présente comme intégratif, et même partisan d’une intégration forcée, a besoin de nier la spécificité de l’humain, du « désir inconscient inaccessible » (comme dirait Oury), du rapport de l’humain au langage et à l’altérité. Autant de notions qui nous paraissaient jusqu’alors comme tombées dans le domaine public, et qui se trouvent rejetées violemment.

Il faut dire que la violence s’est avancée masquée dans un premier temps, sous ce prétexte de déstigmatisation, en subvertissant les mots et en formatant les pratiques par les biais des accréditations et de l’évaluation. Beaucoup de « collabo » pour cette mise en place des « bonnes pratiques », du culte de l’homogène et de  la transparence ! Tout cela s’avançait sous couvert de bons sentiments dont on ne se méfie jamais assez, et d’une meilleure qualité d’accueil pour les patients. Moyennant quoi, tous ceux qui se sont prêtés à cette mascarade depuis des années ont contribué à construire cette idéologie gestionnaire, prétendument athéorique comme le DSM, et autres machines de guerre construites pour défaire une clinique multiréférentielle s’adossant à la psychanalyse et à la phénoménologie. 

C’est ainsi que ce modèle gestionnaire a été voulu par la droite, comme par la gauche : Edouard Couty, militant socialiste comme JL Roelandt, n’est-il pas l’auteur d’un des derniers rapports de psychiatrie proposant une « gestion de la folie » et voulant entre autres joyeusetés cliver l’intra de l’extrahospitalier ?

Edouard Couty présente l’actuel plan de santé mentale à la Fédération Hospitalière de France sur des pdf  frappés du sigle de Fondamental : le lobby mené par Marianne Montchamp et Marion Leboyer auprès des entreprises et des politiques. Ce même lobby montré dans le film de Borel « Un monde sans fous »  qui veut en finir avec la psychanalyse qualifiée de romantique pour arriver enfin à une conception scientifique de la maladie.

Traduisez : une conception scientiste et réductrice, qui conçoit le sujet comme un système cérébro-spinal et nous ramène à un modèle animalier. Une conception en fait fort ancienne qui fait croire à des découvertes récentes, ce qui est un mensonge repris par les media et par l’Etat, que François Gonon est venu pulvériser au meeting de Montreuil, mensonge auquel beaucoup finissent par croire !

Les agrégés de psychiatrie adulte sont en train de vouloir s’aligner sur ce modèle qui nous vend de l’ancien pour dissoudre leur discipline dans la neurologie alors même que leurs « laboratoires de recherche » ne trouvent strictement rien de probant tout en multipliant IRM, scanners et recherches génétiques !

Je dis bien « leur » discipline, mais allons-nous nous laisser exproprier de nos pratiques et de nos savoirs ?

Que signifierait une telle régression politique alors que les pratiques de Psychothérapie Institutionnelle lorsqu’elles sont soutenues et mises en acte, rencontrent un efficace, qui ne se mesure pas avec une petite échelle ?  Mais qui redonne un point d’appui au sujet psychotique dans sa reconstruction d’un monde vivable, un point d’appui aussi pour ceux qui tiennent une fonction soignante. Nous sommes là au cœur de ce qui peut faire accompagnement comme ce colloque en propose l’enjeu.

 Revient la question : qui accompagne qui  et vers où?

Question cruciale car toute la pratique des clubs thérapeutiques témoigne de cette extension possible de la fonction soignante aux patients, comme à chaque membre du Collectif qui veut bien s’y tenir ! Si nous n’avions pas eu à Reims la matrice du club thérapeutique, nous n’aurions jamais rien su des potentialités soignantes des patients, de leur capacité d’écoute sensible, voire d’écoute de l’inconscient d’autant plus aigue qu’elle est fort peu clôturée par du refoulement.

Bien au-delà des limites géographiques d’un club, ce qui compte c’est la mise au travail de la « fonction club » dans une topologie en remaniement constant, ce qui permet la circulation, l’accueil et l’accompagnement.

Nous aurions ainsi besoin d’un double niveau de structuration : celui visible du dispositif  qui articule plusieurs structures et institutions ; et celui sous-jacent d’une structuration dynamique qui remette en permanence du mouvement.

Je vais isoler deux moments de structuration, et chacun est hautement problématique :

– D’abord la création du Gem la Locomotive il y a cinq ans, alors que j’avais pourtant une analyse résolument critique de la fonction des GEM, comme une des pierres de l’édifice néolibéral pour détruire les clubs, cliver le soin et l’accompagnement, enfermer les patients dans une sorte de « réserve indienne » où ils se débrouilleraient entre eux. On ne parlait pas encore des « pairs aidants » mais c’était dans la logique de la construction d’un dispositif au sens que Michel Foucault a donné à ce terme (repris d’ailleurs dans un petit livre d’Agamben) : un dispositif de fabrique de subjectivités formatées pour les besoins du système néolibéral. Une nécessité : nier la folie et la vie psychique, tout ramener à une simple question d’aide sociale, et à une logique du sujet entrepreneur de lui-même. Il s’agit bien sur d’une imposture et il n’y avait qu’à lire le texte fondateur des GEM pour y lire le désaveu explicite : comme un club/pas comme un club ; distinct et coupé du sanitaire mais parrainé et conventionné par un EPSM…etc.

Nous aurions pu refuser cette manne séductrice de la dotation annuelle, mais voilà nous n’avons pas un sou pour les clubs actuellement dans le public, et nous travaillons en permanence avec ce genre de paradoxe. Si nous voulions avoir les mains pures nous aurions arrêté depuis longtemps de travailler. Ceci dit la ligne de partage est mince entre compromis et compromission, et il s’agit à chaque fois d’un pari.

Je n’aurais jamais osé le tenir s’il n’y avait pas eu ce travail des clubs depuis 1980, avec tout ce que ça suppose de prise de responsabilité pour les patients et pour les soignants embringués dans l’aventure.

Nous avons donc démarré en refusant d’entrée de jeu le clivage entre le soin et le social, entre le GEM et les clubs, en favorisant au contraire les responsabilités croisées. Des membres de droit du club dans le bureau du GEM et réciproquement, et une analyse institutionnelle permanente pour ne pas perdre le cap ! Ce qui n’a pas été très simple, et il aura fallu ménager une réunion hebdomadaire pour articuler club et Gem, travailler le contre-transfert des soignants, limiter et réduire les emballements imaginaires, maintenir la circulation entre les lieux.  

Sans doute cela suppose-t-il une défitichisation permanente du « bon lieu », celui qui serait blasonné « Psychothérapie Institutionnelle » ! Ce qui me parait importer le plus c’est notre capacité à créer et à maintenir des processus instituants qui laissent du jeu, un espace de jeu aux uns et aux autres pour se poser, s’inscrire, prendre des responsabilités réelles et ne pas se payer de mots.

Ce Gem dialectise aujourd’hui de façon extrêmement vivante les clubs autant qu’il est dialectisé par eux, et l’ensemble aura permis l’émergence du collectif de patients Humapsy. Je passe sur les turbulences et les disputes très vives que cela aura suscité dans le Collectif ; mais c’est souvent comme ça à chaque enjeu important. En tout cas, il aura fallu sortir d’un respect dogmatique ou religieux des structures traditionnelles de la Psychothérapie Institutionnelle pour mieux la réinventer, tout en travaillant sans cesse à une conceptualisation de ce que nous faisions, de ce qui nous arrivait.

Autre opérateur important : l’AG du centre Artaud

Elle réunit à peu près une fois par mois tous ceux patients, soignants, animateurs du Gem qui gravitent dans le dispositif, et qui veulent échanger et construire.

Le prétexte pour relancer cette AG voici six ans ce fut le vol du cahier de dettes du club, d’où une dramatisation de l’affaire et la construction d’une scène pour discuter ensemble les règles du jeu et ainsi le relancer. Transformer en quelque sorte le passage à l’acte en acting out…  

Emergence donc d’une scène dont le Collectif se saisit, en particulier les patients, et du coup nous en profitons pour nous réunir régulièrement : faire le point sur le petit commerce et ses aléas, mais aussi discuter ensemble de tous les aspects de la vie quotidienne. Et c’est sur cette scène qu’a émergé le discours d’Antony de Nicolas Sarkozy, avec ce questionnement légitime des patients sur notre positionnement. Et là pas moyen de se défiler, même si ça reste pénible pour certains soignants, et pour certains patients qui se bouchent les oreilles ou sortent de la pièce lorsqu’il est question de parler de cette cruauté du discours social à leur encontre.

J’ai donc évoqué la création des 39 à l’initiative d’Hervé Bokobza, mon engagement dans ce collectif, et très vite un certain nombre de patients ont voulu être partie prenante des initiatives qui se tenaient. Je dois dire que je n’en menais pas large au début car j’avais peur de surcharger leur difficulté à exister, et aussi de les aliéner à mon propre engagement.

D’autant plus que l’enthousiasme des soignants était beaucoup plus mesuré, à la mesure de tous les combats perdus et de la difficulté à maintenir leur position dans cette période incertaine. Mais voilà les patients réclamaient la présence de leurs soignants aux manifestations, ne comprenant pas le repli sur la vie privée et le sacro-saint week-end : forcément eux sont à temps plein! Ils réclamaient à juste titre la fonction phorique dont ils avaient besoin pour s’avancer dans le monde, cette fois comme sujets politiques.

Les soignants ont dû suivre peu ou prou, mais à certains moments, ils ont pu dire à quel point ils se sentaient dépassés par les événements.

Cet engagement dans le mouvement des 39 n’a fait que se renforcer, avec la participation maintenant de patients aux réunions d’organisation, ces patients qui viennent de prendre leur autonomie en fondant une association indépendante du centre de jour : « l’association HUMAPSY pour une psychiatrie humaine ».

Je vais vous lire un extrait de leur texte web invitant à une fête le 15 avril à Paris, ce qui signe aussi leur engagement sur une scène nationale et non plus

seulement rémoise :

« L’idée de cette association est née dans la tête de quelques agités du bocal, plus communément appelés: tarés, fous, barges ou encore cinglés…
Mais aussi schizos, bipolaires, psychos… Mais nous sommes avant tout des hommes, des femmes.

Bref nous voilà, patients suivis en psychiatrie à Reims, dans un service plutôt ouvert vers le monde et non refermé sur lui-même. Depuis fin 2008 nous avons pris part à diverses manifestations contre les lois envisagées dans le domaine de la psychiatrie à l’époque, avec des professionnels, qui au début ne savaient pas trop de quelle manière recevoir notre présence. La loi votée le 5 juillet 2011 instaurant des soins sous contrainte même en ambulatoire nous semble liberticide (sachant que certains psychiatres ont communiqué aux commissariats des listes de malades «à risque» au mépris du secret médical). Nous avons aussi par la suite constaté que nombres de services psychiatriques usent de méthodes inhumaines que nous n’avons jamais rencontrées dans notre service, comme des entraves, des camisoles de force, électrochocs (pudiquement cachés sous le terme sismothérapie), isolement, infantilisations, des douches froides, humiliations et autres traitements dégradants…

Nous nous sommes donc donné pour but de défendre et de promouvoir une psychiatrie plus humaine où les patients sont traités dans le respect de la dignité et non comme des sous-hommes que l’on pourrait maltraiter à l’envie.

Le plus dur reste à faire, quelques idées en vrac: aller dans les différents services pour parler avec les patients de leurs conditions d’hospitalisation et leur communiquer les adresses et les horaires des lieux (Gem, clubs, associations) vers lesquels ils peuvent se tourner pour rompre l’isolement ou au moins passer du temps hors des murs. Ou encore: regrouper des témoignages d’éventuels maltraitances ou abus de pouvoir, mais aussi écouter, conseiller et rassurer. Nous voulons aussi porter la voix du plus grand nombre auprès des autorités représentatives afin de faire évoluer les mentalités et faire changer les regards sur cette branche de la médecine.

En outre, forts de nos expériences personnelles, persuadés que l’expression a des vertus thérapeutiques, nous aimerions développer un réseau pour à la fois diffuser et soutenir les talents sous toutes leurs formes qui nous seraient révélés. Par le biais d’exposition, de diffusions radiophonique ou de court-métrages, d’éditions diverses, de manifestations, de vitrine virtuelle (web)… »

Ce surgissement d’un collectif  de patients se réappropriant les enjeux de la Psychothérapie Institutionnelle sur la scène publique, montrant ses liens avec le soin mais aussi avec les enjeux du Politique, tout cela témoigne d’une réalité encore pour moi inédite, et que nous avons à inscrire dans notre mouvement de pensée. Des patients qui endossent l’insulte de leur désignation habituelle pour mieux la subvertir et qui se dégagent dès la fondation de leur collectif du positionnement antipsychiatrique, autant que de la soumission de la Fnapsy alignée avec l’Unafam et les présidents de CME à soutenir la politique actuelle.

Cet événement ne constituait évidemment pas un objectif de travail attendu ni même prévu ! Je n’y aurais même pas cru il y a quelques mois… ; mais il faut souligner que le travail de longue durée des clubs et du Collectif aura construit l’espace de possibilisation d’une telle survenue.

Espace et temps long d’une attente abductive, une attente qui ne se comblerait pas de trouver l’objet qui viendrait trop facilement la satisfaire, enjeu du « hors-d’attente » dont nous parle Héraclite depuis l’Antiquité :

« S’il n’attend pas il ne découvrira pas le hors-d’attente qui est chose introuvable et vers quoi il n’y a pas de chemin »

Je me permets donc d’insister une fois de plus sur cet enjeu : il s’agit de construire dans la durée un espace stratifié qui nous permette de déplier et d’articuler la pluralité des enjeux du transfert institutionnel, sans négliger la deuxième jambe politique de la Psychothérapie Institutionnelle.

Dire qu’elle est quelque peu souffrante ces derniers temps me parait un euphémisme, tant je trouve notre mobilisation bien maigre par rapport à la déclaration de guerre explicite dont nous sommes l’objet.

Il ne s’agit pas seulement de soutenir Pierre Delion, ça c’est la moindre des choses, mais de retrouver une posture beaucoup plus combattive.

Il est clair que nous sommes en position d’extrême fragilité : que nos points d’appui sur la psychanalyse et nos valeurs d’humanité vont à rebours de l’air du temps néolibéral.

Il est vrai aussi que nous sommes plutôt isolés et que de nombreux collègues ont baissé les bras.

Je crois que le pire serait de se résigner, ou de croire qu’il s’agirait de laisser passer la vague du tsunami. Cette logique là a été celle des groupes analytiques qui ont cru qu’en négociant avec l’Etat ils allaient sauver la psychanalyse : toujours la même illusion !

Aujourd’hui il faut remarquer la rareté des psychanalystes présents dans nos mobilisations, quand ils ne les dénoncent pas au nom de leur nécessaire neutralité. A l’exception notable de la Fédération des ateliers de psychanalyse et du Cercle Freudien qui nous ont apporté un soutien explicite.

J’ai dit ailleurs ce que je pensais du dévoiement d’une partie du mouvement lacanien dans les présentations de malades et dans un certain cynisme devant la destruction de la psychiatrie, un mépris aussi par rapport à la Psychothérapie Institutionnelle qui ne serait pas de la « vraie psychanalyse » !

Je le rappelle en conclusion parce qu’il s’agit d’une réalité que nous avons à transformer, forts de notre expérience d’une posture dans le transfert à mille lieux de la figure de l’analyste impassible et cadavérisé !

Cette psychanalyse vivante qui nous a été transmise et que nous mettons en acte dans nos établissements comme dans nos cabinets, nous avons me semble-t-il à la transmettre. Et à considérer cet enjeu dans son versant irrémédiablement politique.

Donc au-delà des trouvailles d’il y a 40 ou 50 ans, la transmission consisterait à sortir du ressassement d’un prétendu âge d’or pour réinventer sans cesse les conditions  de possibilité de la Psychothérapie Institutionnelle, mais aussi ses concepts et ses outils théorico-pratiques.

Il s’agirait d’en finir sans cesse avec l’embaumement et la fétichisation qui sont nos plus fidèles ennemis intérieurs.

 

Patrick Chemla

 

 

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Le Collectif des 39