Deux parmi de nombreux articles (voir ci dessus) reprennent la décision du conseil constitutionnel. Si nous en débattions ? Voici quelques propos récent pour ce qui est de M. B et plus ancien de Bonnafé, car cette question ne date pas d’aujourd’hui. A vos claviers .
Quelques réactions rapides en première lecture de la QPC :
"En mettant la constitution (article 66) comme contradictrice à l’article 3212-7 de la santé publique, le conseil constitutionnel nous rappelle que toute privation de liberté n’est pas chose normale, et a fortiori en psychiatrie.
Le premier intérêt de ce texte est de rappeler aux équipes de psychiatrie qu’elles ne sont pas au dessus des lois, malgré le fait qu’il y ait une spécificité légale de la contrainte dans cette discipline.
Cette QPC ouvre, à la demande de la requérante et de l’association de patients (GIA) la question de la judiciarisation qui n’est pas un débat tranché au sein du collectif des 39 puisque la judiciarisation, si elle propose d’introduire la psychiatrie dans le droit commun et de considérer la privation de liberté psychiatrique comme toute autre privation de liberté, risque concrètement d’être en but à la paupérisation et l’engorgement du système judiciaire ainsi que le risque d’une justice et donc d’une contrainte à deux vitesses. Risque enfin de placer la privation de liberté en psychiatrie sur le registre uniquement du judiciaire plutôt que sur le registre clinique.
Ce qui serait intéressant : envisager la même démarche avec les HO et avec la circulaire donnant ordre aux préfets d’être plus que prudent avec les personnes ayant troublés l’ordre public.
Les perspectives ouvertes par cette décision du conseil constitutionnel :
– La déclaration d’inconstitutionnalité prend acte à partir du 1er août 2011. Dans le même temps, la loi actuelle re-visitée par le conseil constitutionnel montre bien que mis à part cet article qui va dans un sens trop contraignant pour les patients, la loi de 1990 est adaptée et ne nécessite pas de réforme, qui plus est dans un sens sécuritaire.
– Une application sécuritaire de la psychiatrie (qui serait plus du gardiennage qu’un processus actif de soins) peut être remise en cause par les moyens légaux. Ce qui annonce des perspectives politiques intéressantes si l’hypothétique réforme de la loi de 1990 allait dans le sens sécuritaire annoncée par le projet de loi de mars 2010."
Mathieu Bellahsen
Voici un petit texte de rappel de bon sens (article 64 exit à remplacer, sinon le reste tient la route)
Pour mémoire, (n’oubliez pas les oubliettes)
"Il n'y à pas d'internements arbitraires, c'est l'internement qui est arbitraire"
voir l'entretien de Bonnafé en 1989: "Légiférer sur les fous" http://antonin.blog.lemonde.fr/2006/01/14/2006_01_lgifrer_sur_les/
…L’un est l’aspect pénal, avec la mise en question de l’«Article 64». Il se dit là beaucoup de choses qui ont une très grande valeur, contre l’annulation des actes du «fou». Il est bien heureux que se livrent ces «levées de boucliers» contre les positions sur-aliénantes de dé-responsabilisation en chaîne. Mais le fait que ça renvoie à l’immense problématique globale de responsabilité/punissabilité de tous les citoyens reste (je dirai : «par force») plus enseveli encore que le renvoi aux droits de tous les citoyens pour l’« au-delà de la Loi de 38 ». On ne creusera jamais avec assez d’attention la problématique profonde sur «folie et délinquance», mais il n’est pas de bonne méthode de subordonner le débat sur «Loi et folie» à ce registre. On pose mieux la question de fond, celle du statut anthropologique de la folie, en n’enflant pas les mythes du «fou dangereux» et en mettant au premier plan les droits ordinaires des «déments» ou «aliénés», comme on les nommait, à être traités dans la loi commune. Comme les vieux, etc…
L’autre aspect, sur lequel on ne saurait manquer de fermeté, mais où l’important est dans le contexte, est la question de l’internement arbitraire. Le fait est que, dans son traitement ordinaire, elle est surtout utilisée pour empêcher de comprendre que c’est l’internement qui est arbitraire. Le discours commun est envahi de protestations contre le fait que des gens, dont on dit, par exemple très significatif, qu’«ils n’ont rien à se reprocher», soient placés chez les horribles « fous ». En somme, de quoi entretenir chez les bonnes âmes que traiter les «vrais fous» comme on les traite n’a rien de scandaleux. J’ai là, en mémoire, deux révoltes anti-démagogiques passant dans les plus mal-audibles des combats. Comment lutter contre les aberrations répressives de la psychiatrie dans les « pays socialistes » sans dire, en même temps, que protester contre le fait de mettre des «gens bien» chez les fous est aberrant si l’on en profite pour entretenir l’horreur des «vrais fous». Et aussi, comme le cas Camille Claudel en a fourni une occasion récente dans l'histoire, combien il peut être aberrant de parler du sort et de la mort des internés géniaux pendant la guerre en ignorant et faisant ignorer qu’ils furent des victimes comme les autres, les 40 000 «oubliés ».
Oui malheureusement tristement vrai, dramatiquement vrai:
combien il peut être aberrant de parler du sort et de la mort des internés géniaux pendant la guerre en ignorant et faisant ignorer qu’ils furent des victimes comme les autres, les 40 000 «oubliés ».
Car ces malades géniaux rendent encore plus fous, plus insignifiant les autres.
C'est justement ce qui m'a frappée en lisant les commentaires d'un article de Libé sur le sujet. Les gens parlaient d'internement arbitraire, mais absolument personne ne s'est dit que les malades aussi pouvaient avoir des droits, ne pas être privés de liberté sans justice, contester une hospitalisation. Ca n'a effleuré personne, on a même eu droit à l'habituel "enfermez-les tous, ils sont dangereux".
Personne ne s'est posé non plus la question des HO. Je trouve ça hallucinant que les HDT relèvent de la justice et pas les HO. J'y vois un risque qu'on mette plus facilement les gens en HO. Ca se fait déjà, puisque l'ami dont j'ai déjà parlé a été mis en HO car son père n'a pas voulu signer la HDT.
Je ne comprends pas non plus en quoi il est constitutionnel d'être enfermé sans justice moins de 15 jours mais pas plus.
Concernant l'engorgement des tribunaux, je ne sais pas si c'est un bon argument. En Belgique, les HSC relèvent de la justice et les tribunaux ne sont pas plus engorgés qu'en France (ou pas moins). Au moins, toutes les parties, y compris les patients, peuvent être entendues. Le problème actuel est qu'on utilise de plus en plus des procédures simplifiées d'urgence et qu'il faudrait revenir à l'esprit de la loi.
Je suis frappée du nombre de gens qui sont mis en HDT sans même qu'on leur propose une HL, alors que la loi stipule que ça ne doit être fait qu'en cas d'urgence et dans l'impossibilité totale d'obtenir un consentement. C'est là je trouve le vrai problème, même si je suis plutôt pour une judiciarisation, sans en espérer grand-chose, c'est vrai. Pas une judiciarisation dans le sens où le juge remplacerait le psychiatre, mais dans le sens ou médecins, tiers et patients pourraient être entendus. On écoute trop souvent que les tiers et les médecins, niant d'office toute validité à la parole de la personne malade ou désignée comme telle, ne proposant qu'une hospitalisation sans consentement sans même proposer d'autres soins.
Pour revenir à l'histoire de mon ami, quand j'en ai parlé à ma psychiatre, c'est à peine s'il elle m'a cru, et m'a dit que la première chose à faire était de lui proposer un suivi ambulatoire. Sa mère regrette de l'avoir fait hospitaliser dans cet hôpital en HDT il y a quelques années, en voyant la tournure que ça a pris et les souffrances que ça lui a causé. Car il faut avouer que vu l'état de certains services aujourd'hui, une hospitalisation peut faire plus de mal que de bien, et que la moindre des choses seraient de commencer par écouter ce que les patients en pensent avant de les enfermer. Et de n'appliquer les HDT que comme le prévoit la loi.
et le risque majeur est que les patients
et le risque que j'y vois est que les patients fassent encore plus l'amalgame entre "folie " et "délinquance " entre "maladie "et "faute " commise " ( à tort , bien -sûr )
sentiment fortement partagé parmi eux
s'il y a juridisation de la prise en charge , c'est forcément au détriment de la prise en charge médicale et clinique
et quand on voit la lourdeur et la durée des procédures juridiques , j'ai un doute sur l'efficacité d'une telle mesure
Et , où va-t-on trouver les moyens financiers , humains ???
Et je crains aussi que ce ne soit que pour accélérer le turn over dans les services …surchargés par faute d'encadrement
Je me permets de vous proposer le lien suivant:
http://www.médiartclub.fr
Marie Thérèse FERRISI
Autre lien,toujours sur Médiapart
http://www.mediapart.fr/club/blog/fabrice-leroy/291110/maintien-en-hospitalisation-au-dela-de-15-jours-contraire-la-constitu
Mais le débat reste ouvert sur le site des 39.
Ci-dessous une thèse sur le thème:
" dualisme juridictionnel en matière d'hospitalisation d'office"
lien:
http://www.groupeinfoasiles.org/allfiles/theses-etudes-doctrine/061000EtudeTouchardcomplete.pdf
Le bon côté, c'est qu'on demandera peut-être plus aux gens s'ils sont d'accord 'être hospitalisés avant de leur coller une HDT sans leur avoir adressé la parole. Ce qui ne pourra qu'améliorer les relations thérapeutiques.
Il y a de plus en plus d'HSC en Belgique, mais tout de même moins qu'en France: 6000 pour 10 millions d'habitant, 10 fois plus en France pour 6,5 fois plus d'habitants.
Et puis on peut être très malade et refuser une hospitalisation de bonne foi. C'est ce que j'ai toujours fait parce que j'avais été tramautisée par l'hôpital, qui en toute honnêteté ne m'a rien apporté de positif. J'avais beau aller très mal, je savais que je ne m'en sortirais pas en allant à l'hôpital, au contraire ça empirait les choses. Or les psy et les tiers ont l'air de penser que ça ne peut que faire du bien.
Le problème, c'est qu'on ne voit que par l'hospitalisation, et qui si on la refuse, c'est directement assimilé à un refus de soins.
Je suis heureuse d'avoir certains droits, même si la théorie n'est pas la pratique, et je trouve normal que les malades psys, comme les autres, ne puissent pas être privés de liberté sans justice. Quant au fait que ça soit assimilé à une détention, ne faisons pas semblant de croire que les HDT ne sont pas ressenties ainsi, elles sont ressenties comme une détention arbitraire. Et puis, à partir du moment où c'est le juge qui confirme une hospitalisation, il est plus facile de moins en vouloir aux tiers et aux soignants.
Je sais que je suis assez révoltée depuis toujours, mais si quelqu'un avait signé une HDT pour moi, je ne lui aurais jamais pardonné, et j'aurais fait semblant de collaborer avec les soignants pour sortir (ce que j'ai fait même en HL d'ailleurs) et ne plus jamais leur adresser la parole. Si la justice avait confirmé l'hospitalisation, je crois que j'aurais ressenti cela de façon moins arbitraire, que je pense cela injuste ou pas.
Donc dans la théorie, je suis d'accord: la justice n'est pas nécessaire, puisqu'on a respecté la parole du malade, qu'on ne l'a hospitalisé qu'en cas de danger très grave et dans l'impossibilité totale d'obtenir son consentement, que le tiers est quelqu'un qui le connaît vraiment et non une assistante sociale qui passe par là, qu'il sera en HL dès qu'il consentira aux soins, et que les HP sont de super lieux de soins qui ne donnent des cauchemars à personne.
Mais on sait que la pratique est très loin de tout ça.
Moi, usager tout simple, mais représentant des usagers à la CDHP, j'aimerais savoiir quel sera son röle (si tant qu'elle en ait un dans mon département!) face à cette judiciarisation annonçée. J"ai déjà l'impression que cette instance n'est qu'un organe d'enregistrement, alors quelle sera son efficacté face au pouvoir judiciaire et à celui de l'état par l'intermédiaire de son représentant?
Bonjour, Je suis schizophrène depuis dix ans, est-ce que , quand ont est malade mental, on n' est plus un homme ? est-ce que les valeurs de "liberté, égalité, fraternité" ne sont pas applicables aux malades mentaux ? Dois-je m'attendre, dans le futur, à être soit complètement lobotomisé chez moi avec des shooteuses à retard (IMR) , où alors être interné pour une très longue durée ?
Pourtant, je n'ai pas d'hallucination, ni de délires interprétatifs, ni de paranoïa, je suis normal ou presque .
Comment ces gens qui nous gouvernent peuvent-ils disposer des vies humaines comme ils l'entendent ?
En temps que schizophrène, ma vie, n'est-elle pas toute aussi importante que celle de quelqu'un d'autre ? ne puis-je pas prétendre, comme tout le monde, à la liberté ?
J'aurai aimé pouvoir m'exprimer au nom de tous les schizophrènes, ne peut-on pas donner plus d'autonomie à cette catégorie de personnes ?
Est-ce qu'il doit y avoir forcément internement, puis soins accompagnés ?
Je ne remet pas en question l'utilité de la psychiatrie, je vous rassure, j'ai un très bon psy .
Si quelqu'un pouvait me répondre …
Excusez-moi, mais ceux qui nous gouvernent, ils leur faut lire ou relire, "L'esprit des lois" du baron de Montesquieu, et que les lois ne doivent pas être anti-populaire { 600.000 schizophrènes en France } .
Voilà, j'en ai fini
Certains n'ont pas les mêmes droits que les autres, les malades mentaux et les prisonniers notamment, et malheureusement ça ne gêne pas grand-monde, certains qu'ils sont de ne jamais être de ce côté de la barrière.
guy Baillon
Lettre à Lucien Bonnafé
Guy Baillon
Paris le 5 décembre 2010
Lettre à Lucien Bonnafé
Mon cher Lucien
Certains d’entre nous disent t’aimer bien, mais laissent entendre en douce à leurs amis qu’ils pensent que tu es dépassé, que tu as vieilli, tu ne serais pas au courant de tout, tu n’es donc pas apte à donner ton avis autour des débats actuels sur « l’internement » !
Tu partirais d’un de tes grands éclats de rire, reconnaissant là les sophistes que tu savais si bien mettre en déroute !
Tu relèverais avec humour ce que peut être le « toilettage » d’une loi ségrégative ; il te serait facile de démontrer ici que chacun sait que toute modification de la loi de 1838 ne peut être que pire ; ainsi la loi de 1990 ‘toilettée’ est pire parce qu’elle masque la réalité, certes elle enlève de la loi 1838 le terme ‘internement’, mais dans les faits elle pérennise cette réalité : c’est donc pire puisqu’elle masque son jeu ! c’est pire aussi parce qu’elle a facilité son utilisation alors que la loi de 1838 était devenue obsolète, peu utilisée. D’ailleurs depuis 1990 le nombre d’internements n’a fait que croitre chaque année
Pourquoi le Ministre de l’époque Claude Evin a utilisé lui-même le terme de ‘toilettage’, si ce n’est pour affirmer qu’il ne changeait rien sur le fond de cette loi si vieille. Aucune avancée !
La loi de 1838-toilettée 1990 confirme qu’elle continue à ordonner « cette conduite barbare, et primitive de notre société dite moderne » qu’est l’internement.
Je ne veux abuser de ton temps, je serai bref. Toi-même dans ta réponse au journaliste du Monde Nouchi le 18-10-89 tu as été trop gentil, rappelant que les personnes (des patients) qui bousculaient le gouvernement en 1988 voulaient la fin des internements arbitraires, il n’y en avait pas ! Tu as été trop gentil de vouloir donner des arguments sur ce point. En plus ces patients ont été totalement floués : les internements doublement certifiés de la loi de 1990 donnent l’impression d’interdire tout arbitraire, en réalité l’Etat a commis un nouveau crime il a confirmé que les faits de troubles mentaux justifiaient une loi spécifique, et justifiaient qu’on enferme ceux qui les portaient ! Nouvel arbitraire ! Il a donc continué à les interner, il a augmenté leur nombre tout en faisant refluer sur l’hôpital les soignants du secteur, et ainsi mis à mort la politique de secteur, ‘en douce’ (car cette mise à mort n’est pas écrite dans les articles de la loi de 1990, mais c’est ce qui a été fait).
Revenons à cette belle année 2010 et bientôt 2011, belle ? Belle, Oui parce que plein de nos espoirs. Ne crois-tu pas Lucien que l’on peut aujourd’hui être simples à nouveau, appeler un chat, un chat, un internement ‘internement’ ? un internement ‘atteinte à la liberté’ ?
Ne penses-tu pas qu’il est temps de redire comme tu l’as fait avec tes amis dès le lendemain de la guerre que c’est ne pas ouvrir les yeux sur ce que vivent les hommes que ne pas comprendre ce qu’il y a d’infamant dans le fait d’être enfermé dans un espace à part appelé hôpital, sous prétexte que nous aurions des discours et aurions des actes ‘anormaux’.
Comment les psychiatres peuvent-ils penser avoir aux yeux de la société une qualité supérieure leur permettant d’être au-dessus des juges qui seuls sont reconnus par la société comme ayant le droit au nom de la Nation de priver quelqu’un de sa liberté ?
En fait ce qui manque à nous, ces personnes qui se disent psychiatres c’est clairement l’expérience de cet enfermement, l’expérience de cette « stigmatisation » qui accompagne ensuite le parcours de vie de la personne, car il y a toujours une personne ‘bien intentionnée’ pour le rappeler après, point n’est besoin de fichier. La personne est « marquée », flétrie, à vie.
Ce qui a été clairement oublié depuis la loi de 1838, c’est qu’à l’époque ces personnes qui souffraient, le plus souvent étaient pauvres, et de ce fait étaient laissées sur le bord de la route, cette loi de 1838 obligeait ainsi chaque département à les accueillir.
Mais dans le même temps n’oublions pas, comme tu le rappelais Lucien, cette décision était une décision prise par le pouvoir exécutif ; elle était clairement la reprise par cet Etat des ‘lettres de cachet’ arbitraires, décidées par le Roi, avant la révolution, le lien est clair.
Dans tous les autres pays d’Europe la page a été tournée (après 200 ans), une telle décision ne peut appartenir qu’à la justice, ont-ils affirmé. La France reste accrochée à ce lourd passé.
Demander à des professionnels de la médecine d’être les conseillers du Préfet ou du Ministre de l’intérieur c’est clairement affirmer que ces personnes sont une catégorie à part de l’espèce humaine, bientôt une autre espèce. Cette décision est clairement « stigmatisante », ou bien c’est une autre race, ou bien ce sont des hommes qu’il faut flétrir.
Lucien tu as assez affirmé avec raison que la seule possibilité est l’abrogation de la loi 1838, abrogation déjà partiellement réalisée pour leurs biens avec la loi de janvier 1968, qui a largement « écorné » (et pas toiletté) la loi de 1838. Soigner en psychiatrie dans le cadre des lois de droit commun, est possible, c’est une exigence éthique.
Tu t’es assez battu, Lucien, pour montrer que les attitudes de protection comme celle qui a permis de construire les asiles avaient abouti au massacre rare de 45.000 morts dans ces asiles « protecteurs ». De même la fonction des psychiatres n’est en rien une fonction de protecteurs, ceux-ci peuvent, et cela s’est vu sous certains régimes, pour x raisons inverser leur rôle. Notre fonction est de soigner. C’est à la Nation entière de jouer un rôle d’asile pour ces personnes vulnérables. Les psychiatres n’ont aucunement la compétence, ni les moyens de leur assurer dans la société une place décente. La preuve en est la dégradation des conditions de vie des patients-usagers de 1970 à 2002, et l’espoir apporté par la loi d’Action Sociale 2005.
Le second rôle des psychiatres et de tous leurs collaborateurs (car la psychiatrie n’est plus faite par les psychiatres seuls, mais par les acteurs de plusieurs professions complémentaires, pourquoi le psychiatre s’arrogerait-il là un rôle tellement à part de certificateur et de protecteur, il est l’un des soignants parmi d’autres, seulement aidant par ses efforts à approfondir l’élaboration théorique soutenant la pratique de chacun), le second rôle des psychiatres et des équipes soignantes est d’en finir avec la stigmatisation qui écrase l’opinion et les médias, et qu’enfin ils arrivent à convaincre l’ensemble de la société que ces personnes ont des troubles, mais sont comme les autres hommes, et que plus que les autres, étant seulement vulnérables, ils ont besoin de marque d’humanité et de fraternité.
La tâche formidable, passionnante et généreuse des soignants de la psychiatrie, des équipes de secteur, est d’approfondir leurs connaissance, leur savoir faire, d’améliorer les soins en s’appuyant sur l’environnement des patients, mettant en application la ‘politique de secteur’ associée à ‘application de la loi d’Action sociale dite sur le handicap de 2005 qui la complète.
Mais en jouant franc jeu. Un exemple à travailler : avec les familles l’une des escroqueries de la loi de 1990 est la fameuse HDT, hospitalisation à la demande d’un tiers : ce sont des massacres familiaux que la loi et les psychiatres ont mis ainsi en place.
Les psychiatres doivent comprendre que pour jouer la totalité de leur rôle il leur faut la participation d’un ‘tiers’ : le juge est le seul personnage de la Cité à pouvoir jouer ce rôle.
Au lieu que ce débat soit une lutte théorique que chacun vive ce que vit le patient, la famille, aide nous Lucien, comme tu savais le faire, à fuir les débats polémiques, stériles, et à prendre la réalité à bras le corps, ceci au plus près de ce que vivent ces personnes qui souffrent.
Lucien, le moment est venu de provoquer ensemble un débat de fond, associant tous les acteurs et toutes les générations autour de l’homme et de ses souffrances psychiques graves au sein de notre Cité.