Il y en a des corrects, d’autres dont on ne sait pas grand-chose. Dans ces unités, les règles sont claires : on y séjourne contre sa volonté. Jusqu’en 2008, il y en avait quatre, maintenant elles sont 10. Ces lieux, appelés unités pour malades difficiles (UMD), accueillent autour de 530 patients dont 40 femmes. Tous sont là par décision de l’Etat, hier nommée hospitalisation d’office. Endroits à part, entourés de murs et de chambres fermées. Parfois, il y a des grands fous, hospitalisés là après avoir commis des crimes insensés, et déclarés depuis irresponsables. Dans d’autres cas, ce sont des patients agités, ou perçus comme tels dans le service de psychiatrie où ils étaient. Exemple : la sœur de Sandrine Bonnaire a séjourné plusieurs mois dans une UMD parce qu’elle résistait aux traitements.
Jean-Marie Delarue, contrôleur général des lieux de privation de liberté, est allé avec ses enquêteurs y jeter un coup d’œil. Son constat est sévère et, surtout, agacé : il rappelle, non sans pertinence, que «le droit fondamental selon lequel nul ne peut être arbitrairement privé de liberté s’applique évidemment aux personnes souffrant de maladie mentale». Celles-ci ne pouvant être privées de liberté qu’à trois conditions cumulatives : la maladie doit être indiscutable, le trouble est tel qu’il nécessite un internement et, enfin, il doit se prolonger pour justifier ce maintien.
Dans la pratique, qu’a-t-il vu ? Le contrôleur ne s’interroge pas sur la pertinence de la décision – ce n’est pas de sa compétence -, mais sur les conditions de sortie. Il a constaté que des patients étaient maintenus en UMD «malgré l’avis de la commission du suivi médical, et nonobstant l’avis du préfet qui a prononcé sa sortie». Il cite le cas d’un homme retenu depuis deux ans et demi dans une unités pour malades difficiles, alors que rien ne le justifie. Les raisons ? Elles sont toutes bêtes : bien souvent, l’établissement d’où vient le malade refuse de le reprendre. D’autres fois, le patient ayant erré d’hôpitaux en hôpitaux, l’UMD ne sait plus où le renvoyer. Ces personnes restent donc emprisonnées des semaines, voire des mois, alors que leur état ne le justifie pas.
Juste un dysfonctionnement temporaire ? Le contrôleur s’en inquiète : en quatre ans, il a été saisi près de 80 fois sur des questions similaires par des patients ou des psychiatres. Il a alerté cinq fois le ministère sur ces problèmes. Aucune réponse. D’où, aujourd’hui, via cet avis publié au Journal officiel, la demande formelle de l’envoi d’une circulaire préfectorale, rappelant l’obligation de trouver une place pour un malade dont le maintien en UMD n’est plus justifié, ni d’un point de vue médical ni pour l’ordre public. L’avis a déjà été adressé à la chancellerie et au ministère de la Santé. Pas de réponse, là non plus.
source: Libération