>Soins Psychiatriques. Autorisation de délirer au centre Antonin-Artaud (L'humanité.fr)

 

(Flora Beillouin)

Depuis sa création, 
en 1985, le centre 
de jour Antonin-Artaud offre, à Reims, une vision humaniste 
de la psychiatrie. 
Son fondateur, 
Patrick Chemla, militant dans le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire, mêle ses patients à cette réflexion qui les concerne en premier lieu : le sort que l’on réserve aux fous 
dans notre société.

 

Reims (Marne), 
envoyée spéciale. «Que s’est-il passé cette semaine ?» Olivier embraye : «Il y a eu des élections au Maroc et en Égypte, remportées par des partis qui se réclament de l’islam modéré et veulent instaurer la charia…» Au centre de jour Antonin-Artaud, comme chaque mercredi depuis quinze ans, le forum d’actualité commence, animé par un infirmier. «En France, l’équivalent, ce serait Bayrou ? » tente une petite voix, vite interrompue par Vincent, qui, debout, finit de rouler sa cigarette, une lueur de révolte barrant ses yeux gris-bleu : « Tout ce qu’on sait, c’est que ça n’a jamais rien donné de bon de mélanger la religion à l’État !»

La revue de presse passe du coq à l’âne. Sébastien a la mémoire des chiffres, Fred un goût prononcé pour les contre-pouvoirs. Pour Vincent, « les médias veulent faire de nous des moutons », et il « faut mettre un grand coup de pompe dans la fourmilière ». Un thème retient néanmoins l’attention collective : la folie. Il est notamment question du tueur d’Oslo et d’un reportage de France 3 sur l’unité pour malades difficiles (1) de Sarreguemines. « On voyait les patients, visages floutés, qui refusaient leurs médicaments, et le journaliste racontait qu’ils frappaient les infirmiers », relate Clément, sous le regard horrifié de l’assemblée.

Ici, on est loin du schéma extrême de Sarreguemines. Au centre Artaud, il n’y a ni blouse blanche ni pyjama. Les médicaments, seulement si nécessaire, ne sont que des éléments de la thérapie proposée par l’équipe de Patrick Chemla. « Le médicament n’agit que sur les effets, or la problématique humaine est bien plus complexe, de par la diversité de ses causes, à la fois sociales, traumatiques, anthropologiques », explique le psychiatre, qui refuse de « classer les gens dans des cases », selon les cloisonnements chers à Nicolas Sarkozy. (…)

Lire la suite sur le site de l'humanité 

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>Lettre ouverte

Monsieur le Président du Conseil National de l’Ordre des médecins, Mesdames et Messieurs les parents de personnes autistes, Deux médecins, le Professeur Pierre Delion, « véritable promoteur du Packing en France1  », Chef du Service Psychiatrie Enfant et Adolescent du CHRU de Lille, et le Professeur David Cohen, Chef du Service Psychiatrie Enfant et Adolescent de l’Hôpital de la Pitié-Salpêtrière ont été ou sont convoqués devant leurs Conseils départementaux de l’Ordre des médecins suite à la plainte d’une association représentant des familles de personnes autistes, l’association Vaincre l’Autisme. Leur délit : soutenir le principe d’une recherche scientifique validée dans son objet et son protocole par le Comité de Protection des Personnes du CHRU de Lille, recherche menée dans le cadre d’un Programme Hospitalier de Recherche Clinique National (PHRC), validé en 2008 (PHRC 2007/1918, n° Eudra CT : 2007-A01376-47), financée par le ministère de la Santé et dont le thème est « L’efficacité thérapeutique du packing sur les symptômes de troubles graves du comportement, notamment les automutilations, des enfants porteurs de TED/TSA  ».


Ces plaintes2  constituent une véritable attaque personnelle et professionnelle difficile à comprendre quand on prend le temps de connaître l’objet de ces attaques et les hommes qui en sont les victimes.

De plus, les comparutions devant le Conseil de l’Ordre s’accompagnent d’appels à la manifestation devant les dits Conseils, selon des méthodes d’un autre âge qui interrogent sur les véritables motivations de leurs instigateurs. Elles rejoignent d’autres mobilisations telles celles qui ont violemment attaqué les équipes pratiquant l’avortement ou celles, plus récentes, exigeant l’interdiction de représentations culturelles jugées blasphématoires au nom de la religion.

Or, la recherche scientifique est tout sauf un blasphème, même si elle va à l’encontre de convictions qui peuvent, en elles-mêmes quand elles ne se manifestent pas sur le mode du dénigrement et de la disqualification, être respectables. La science n’est pas un dogme, Pierre Delion et David Cohen ne prétendent pas détenir la vérité, ils la cherchent. « Toute connaissance est issue d’un processus de construction, processus qui consiste en une réorganisation qualitative de la structure initiale des connaissances et qui peut s’assimiler à un changement de conceptions3 .

Pierre Delion rappelle que « ils [ les scientifiques] savent bien qu’avant de pouvoir démontrer quelque vérité scientifique que ce soit, le chercheur émet des hypothèses abductives (j’ai l’intuition que) puis conduit ses recherches pour tenter de démontrer de façon déductive et inductive les hypothèses émises. S’il n’y avait pas d’abord des intuitions basées sur la clinique, aucune découverte n’aurait pu être faite en médecine, ni a fortiori démontrées dans le cadre de l’Evidence Based Medicine . » C’est la base même de la recherche expérimentale.

Une étude scientifique ne préjuge pas de son résultat, ce que font les associations de parents d’enfants autistes qui ont décidé que cette technique « relevait de la torture4  », qu’elle était pratiquée « sans protocole, sans évaluation et sans résultat3  » voire qu’elle « ouvrait la voie à l’abus sexuel5 »  et qu’il fallait y mettre un terme parce que « dénuée de tout respect et de toute dignité3  ».

Pourquoi, donc, s’opposer à un examen scientifiquement validé de la question du packing ?

Le packing, contrairement à ce que laissent entendre ceux qui demandent son interdiction, n’a pas pour origine la psychanalyse et il existe une abondante littérature scientifique sur cette technique, anglo-saxonne notamment6 . Il trouve sa source dans la médecine antique et repose sur l’utilisation de l’eau dans les soins physiques et psychiques, l’hydrothérapie étant utilisée en Grèce dès le VIIIème  siècle avant Jésus-Christ. Soranus d’Ephèse la recommande au Ier  siècle de notre ère pour soigner la dépression. Au XVIIIème  siècle, Pinel demande que l’on utilise les bains chauds à visée de relaxation. Cullen, médecin anglais, est le premier à recommander les enveloppements humides dans le même but. En 1948, Paul Sivadon a utilisé des approches corporelles à base d’eau, à Sainte Anne, « pour favoriser le sentiment de sécurité, la prise de conscience de l’existence corporelle et la relation avec les objets et les personnes  ». En 1966, un psychiatre américain, Woodbury introduit sa méthode d’enveloppement (“packing” en anglais) en France : la technique est la même mais l’enveloppement se déroule en présence d’un infirmier qui reste aux côtés du malade en permanence durant ce temps d’enveloppement. « Le but de ce traitement est de donner au malade une stimulation du schéma corporel, de contrôler ses tendances autodestructrices et agressives, sans l’aliéner par les médicaments ou l’isolement  ». 

La technique du packing sera proposée pour le traitement des enfants et adolescents autistes les plus gravement malades ou qui présentent des troubles graves du comportement (hyperactivité, instabilité grave, auto- ou hétéro-agressivité, stéréotypies envahissantes, anorexie grave, insomnie rebelle notamment).

Il s’agit donc de valider, ou non, scientifiquement « L’efficacité thérapeutique du packing sur les symptômes de troubles graves du comportement, notamment les automutilations, des enfants porteurs de TED/TSA  », en aucun cas traiter l’autisme ou ce que l’on nomme aujourd’hui les Troubles Envahissants du Développement (TED). Le Professeur Pierre Delion a maintes fois rappelé que « le packing ne concerne que quelques enfants porteurs de TED/TSA lorsqu’ils présentent des signes graves voire gravissimes de troubles du comportement, pour lesquels une indication précise doit être posée et une formation de l’équipe réalisée dans de bonnes conditions  ».

Tout le monde est aujourd’hui d’accord pour dire que l’autisme, on devrait probablement dire les autismes, est un trouble neuro-développemental, entrant dans le cadre des troubles envahissants du développement ce qui ne préjuge en rien de son étiologie qui demeure inconnue, les hypothèses allant des anomalies génétiques aux atteintes infectieuses ou toxiques, probablement associés à des degrés divers.

Il n’existe pas de traitement curatif de l’autisme. En revanche, de multiples approches de prise en charge ont vu le jour depuis la découverte de ce syndrome, approches issues de divers courants théoriques et fondées sur des conceptions très diverses de l’autisme7 . De manière pratique, des études scientifiques ont à ce jour permis de démontrer l’efficacité d’une prise en charge précoce à l’aide d’approches éducatives comportementales (ABA8 ), cognitives (TEACCH) ou développementales. La littérature scientifique est unanime sur ce point : il faut que l’intervention éducative soit précoce, massive et structurée.

Mais, quel que soit la nature du handicap ou de la différence de la personne autiste, le mérite de la psychiatrie et de la psychanalyse aura été de montrer qu’elle demeure un être de relation, doté d’un inconscient, tout comme ses parents, et que les interactions relationnelles et identificatoires sont modifiés par le trouble. Et ce même si l’on réduit l’inconscient à ses dimensions cognitives, ce qui n’est plus le cas des neuro-biologistes, Lionel Naccache considérant même Freud comme le Christophe Colomb des neurosciences9 .

L’époque n’est plus aux antagonismes, neurosciences versus psychanalyse par exemple, et l’ensemble de ces disciplines se confrontent utilement au travers d’interfaces que nous avons été nombreux à appeler de nos voeux. « Une réflexion critique qui confronte les diverses approches des sciences de la vie et des sciences de l’homme et de la société autour du cerveau de l’homme et de sa fonction devient nécessaire10.  » Dès que l’on parle de l’homme et de la nature, il faut « nouer sciences fondamentales et sciences humaines  » dit Michel Serres.

Il ne suffit pas de se targuer d’autres autorités scientifiques qui, en l’occurrence, s’appuient sur des préjugés qui ont une construction scientiste voire idéologique, pour invalider le travail de plusieurs années au service d’une cause que Pierre Delion et d’autres ont défriché de longue date : combien d’entre nous ne se sont-ils pas intéressés grâce à lui à l’autisme, d’abord par une grande ouverture d’esprit clinique et une réflexion plurifactorielle sans exclusive assortie d’une grande rigueur scientifique ? Si le regard commun et scientifique sur l’autisme a pu évoluer dans ce pays, on le lui doit en grande partie, il suffit de lire ses travaux et ses publications avec honnêteté.

Les attaques visant Pierre Delion, David Cohen, Daniel Widlöcher et Bernard Golse visent aussi toute une profession, que le Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux avait appelé à juste titre la Communauté soignante, dans une optique de « mise en cause des compétences médicales de la psychiatrie  » et, plus généralement, de disqualification de la psychiatrie et de la psychanalyse.

Comment attaquer Pierre Delion, dont l’intégrité professionnelle, le sens éthique et l’humanité peuvent difficilement être discutés par quiconque est de bonne foi ? « Nous sommes tous des Pierre Delion  » disait le Syndicat des Psychiatres Hospitaliers, nous dirions plutôt « Nous voudrions tous être des Pierre Delion  ». Et avoir ses qualités humanistes, son profond respect de l’autre souffrant, sa rigueur scientifique, sa compétence dans l’animation des équipes dont il a eu la charge, sa qualité d’enseignant “maïeutique”, la cohérence qui est la sienne entre sa pratique et son enseignement, son attachement à la “défense et illustration” de la prise en charge des enfants autistes et de leurs familles. Son travail, son enseignement plaident pour lui mieux que quiconque ne pourrait le faire. A travers lui, c’est toute une conception de l’humain, du social et du scientifique qui est en jeu. Et ces attaques inquiètent car elles traduisent une dérive qui voudrait que ceux qui prennent en charge les personnes en souffrance psychique les remplacent, en coupables expiatoires, comme objets de fantasmes primaires stigmatisants. Ainsi, les acharnés de la guérison sont nombreux dans le champ des médecines différentes, précisément parce qu’ils cherchent toujours et encore l’arme absolue qui puisse enfin avoir raison des échecs thérapeutiques qu’ils ne supportent pas.

L’autisme est une souffrance, pour l’autiste d’abord, pour ses proches ensuite. La douleur des parents doit être respectée et entendue, y compris quand elle s’exprime de manière excessive.

Mais l’alliance thérapeutique que prône l’ensemble des dispositifs voulus ces dernières années par les pouvoirs publics suppose respect mutuel et confiance réciproque. La controverse n’est pas inutile, « Le mot liberté n’admet, par définition, aucune restriction11  », si elle fait progresser la lutte contre la souffrance. Chacun doit se regarder en conscience, la pratique de la psychiatrie et de la psychanalyse n’ont pas toujours été heureuses en matière d’autisme, toutes les associations de parents d’autistes ne se reconnaissent pas dans des discours excessifs, et chercher comment concilier au mieux « corps et esprit humains, inséparables12  ».

Cette nécessaire alliance, chacun doit y participer. Autistes  dans la mesure de leurs moyens, parents  qui doivent trouver une réponse à leur détresse et aider leur enfant à progresser autant qu’il lui est possible afin de « garantirl’intégration des personnes autistes en milieu ordinaire ou la création de places adaptées en milieu spécialisé13  » ; pouvoirs publics , qui doivent éviter toute posture démagogique, proposer des espaces de médiation et soutenir toute recherche, sans exclusive aucune, qui permettra de faire avancer les connaissances en matière de troubles envahissants du développement ; les médias, qui doivent aider à la prise de conscience en ces matières mais aussi informer de manière objective. Les professionnels  enfin, dont le dévouement ne peut être contesté et qui, quoi qu’il advienne et quel que soit le champ de compétence de leur intervention, demeureront un maillon indispensable à l’évolution positive des enfants et adultes concernés.

Ces alliances sont tout le contraire de démarches qui ont une construction sectaire en ce sens qu’en s’appuyant sur la détresse et l’émotion au détriment de la réflexion critique, elles se soutiennent du “principe de simplification”, supercherie visant à séduire les personnes en détresse par l’indication d’une “voie unique”, factice face à la complexité des problèmes posés, voie qui, en ce sens, constitue une régression épistémologique.

Claude Finkelstein, présidente de la FNAPSY, rappelle que « les chapelles en psychiatrie sont devenues des sectes, chacune pensant avoir “raison” contre la “déraison” et ceux qui en souffrent sont les patients, non les familles, même si j’en suis sûre celles-ci sont de bonne foi. Seul le patient peut dire si telle ou telle intervention lui a servi . » Pour toutes ces raisons, nous soutenons Pierre Delion, David Cohen, et tous les professionnels mis en cause dans leur démarche scientifique, clinique et thérapeutique, et nous dénonçons la véritable chasse aux sorcières dont ils sont l’objet. Nous demandons qu’ils reçoivent tout l’appui qu’ils méritent de la part de leurs confrères de l’Ordre des médecins, en reconnaissance de leur courage, de leur rigueur et de leur compétence et pour l’ensemble de leur oeuvre

 

1 Vaincre l’Autisme (ex Association Léa pour Samy)


2 Ces comparutions, fondées sur un supposé manque de rigueur scientifique et une volonté de nuire interviennent dans un contexte particulier dont témoigne la diffusion d’un film, « Le Mur », construit uniquement à charge contre la psychanalyse et les psychanalystes et qui, grâce à un montage subtil, discrédite trois professionnels, Pierre Delion, déjà, Daniel Widlöcher et Bernard Golse. Ce document, quelle que soit la volonté explicite de ses auteurs, ne vise pas à faire le point sur l’apport (ou non) de la psychanalyse dans la prise en charge des autistes, critique s’il le faut, mais à constituer un dossier à charge qui ridiculise les professionnels.

3 Hélène Hagège : La démarche scientifique : invariants et spécificités disciplinaires, une approche épistémologique, LIRDEF, Université Montpellier II – IREM, février 2007

4 Vaincre l’Autisme

5 Site officiel du Collectif de soutien au film « Le Mur »

6 Le Professeur David Cohen en donne maintes références dans son argumentaire. Parmi les articles récents, citons :

1. Hospital and Community Psychiatry. 1986, 37: 287-288.

2. Am J Psychiatry. 1988, 145: 242-245.

3. Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence. 2009, 57 : 529-534.

4. Clinical Neuropsychiatry. 2009, 6: 29-34.

5. Journal of physiology. 2010, 104: 309-314

6. Issues in Mental Health Nursing, 2009, 30:491-494.

7. Adolescent Psychiatry. 2011, 1: 163-168

7 Voir les travaux, notamment de Jacques Constant et ceux de Centre Ressource Autisme de Languedoc-Roussillon à la demande du ministère de la santé en 2007

8 qui connaît également ses détracteurs, on lira sur ce point l’ouvrage très documenté de Laurent Mottron, « L’autisme, une autre intelligence : Diagnostic, cognition et support des personnes autistes sans déficience intellectuelle », Editions Mardaga, 2004, 235 pages

9 Le nouvel inconscient, Poche Odile Jacob, février 2009

10 L’homme de vérité, Jean-Pierre Changeux, Editions Odile Jacob, Paris, 2002, page 9

11 Jean Yanne, Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil

12 Pierre Delion, Lettre ouverte

13 Autisme France

Marie-Noëlle Alary, psychiatre des hôpitaux,  Mathieu Alary, doctorant en neuro-imagerie, Patrick Alary, psychiatre des hôpitaux,  Claude Allione, psychanalyste,  Marie Allione, pédopsychiatre des hôpitaux, Jean-David Attia , pédopsychiatre des hôpitaux en retraite, Guy Baillon , psychiatre des hôpitaux en retraite, Mathieu Bellahsen , psychiatre de secteur, Jean Bertrand , Psychiatre, Liège, Belgique, Dominique Besnard , Psychologue, Directeur National des CEMEA, Jean-Raphaël Bessis , Psychologue clinicien, Gérard Boittiaux , psychiatre des hôpitaux, Michel Botbol , professeur de pédopsychiatrie, Alain Bouvarel , psychiatre des Hôpitaux, président du CNASM, Loriane Brunessaux , pédo-psychiatre, Marie-France Canoville , addictologue des hôpitaux, Frédérique Cataud , cadre de santé – assistante chef de Pôle, Patrick Chaltiel , psychiatre des hôpitaux, Sophie Charancon , Martine Charlery , pédopsychiatre, Dorota Chadzynski , psychomotricienne, psychologue clinicienne, Patrick Chemla , psychiatre des hôpitaux, Jean-Luc Chevalier , psychologue clinicien, Jacques Constant , pédopsychiatre des hôpitaux en retraite, formateur sur la question de l’autisme, Alain Couvez , psychiatre des hôpitaux, chef de service, Jean-Yves Cozic , psychiatre des hôpitaux, président du Syndicat des Psychiatres Français, Jean-Michel de Chaisemartin , psychiatre des hôpitaux, Pascal Crété , psychiatre, directeur Foyer Léone Richet, Alain Darbas , directeur de Stéphanie Dauver , pédopsychiatre des hôpitaux, Francine Delionnet , ex-enseignante spécialisée, Marie-Philippe Deloche , psychiatre MGEN, Matthieu Duprez , Psychiatre des Hôpitaux, Bernard Durand , pédopsychiatre des hôpitaux en retraite, Président de la FASM Croix-Marine, Michel Duterde , ex-responsable des CEMEA, Claude Finkelstein , présidente de la FNAPSY, Martine Fournier , psychiatre hospitalier, Lise Gaignard , psychanalyste, Nicolas Geissmann , psychiatre des hôpitaux, Roger Gentis , psychiatre retraité de secteur public, Patrick Genvresse , pédopsychiatre des hôpitaux, Yves Gigou , formateur, Geneviève Giret , pédopsychiatre des hôpitaux, Pierre Godart , psychiatre des hôpitaux, chef de pôle, Philippe Goossens , psychiatre, Bruxelles, Belgique, Marie-Christine Hiébel , directrice d’Etablissement public de santé, Ariane Hofmans , psychologue, Michel Jadot , psychiatre médecin-directeur du service de santé mentale de Verviers, Belgique, Christine Jedwab , Psychologue clinicienne, Dina Joubrel , Psychiatre des hôpitaux, Claire Jutard , psychomotricienne, Dimitri Karavokyros , Psychiatre honoraire des Hôpitaux, Anja Kloeckner , psychomotricienne, Yves Le Bon , psychologue-Clinicien, psychanalyste, chargé d'Enseignement à l'Université de Paris 7-Diderot, Paul Lacaze , neuropsychiatre d'exercice privé libéral et institutionnel, Yvon Lambert , formateur retraité des CEMEA, Georges Lançon , pédopsychiatre, Dominique Launat , psychologue, Agnès Lauras-Petit , psychomotricienne, docteur en psychologie clinique et pathologique, Catherine Le Berre , cadre de santé, Michel Lecarpentier , psychiatre, Catherine Legrand-Sébille , socio-anthropologue, maître de conférences, Leïla Lemaire , comédienne, Marc Livet , cadre de santé, Stéphanie Levêque , pédospychiatre, Marie-Hélène Lottin , psychiatre, psychanalyste, Jean-Jacques Lottin , directeur d'études de santé publique, Paul Machto , psychiatre des Hôpitaux, psychanalyste, Jacqueline Mairot , psychiatre, Sandrine Malem , psychanalyste, Marie-Line Marcilly , cadre coordonnateur, Esteban Morilla Martinez , psychiatre des hôpitaux, Vincent Marzloff , interne en psychiatrie, Bénédicte Maurin , membre du collectif des 39, éducatrice spécialisée en pédopsychiatrie, Simone Molina , psychanalyste, Joseph Mornet , psychologue, secrétaire général de la FASM Croix-Marine, Françoise Nielsen , psychanalyste, Joséphine Nohra-Puel , psychologue, psychanalyste, Heitor O'Dwyer de Macedo , psychanalyste, Vincent Perdigon , psychiatre des hôpitaux, Juliette Planckaert , psychologue honoraire des hôpitaux psychiatriques, Martine Ragot , aide-soignante, Philippe Rassat , Pédopsychiatre, Psychanalyste, Directeur médical de CMPP, Nathalie Renon , psychologue clinicienne, Elise Ricadat , psychologue clinicienne, Martine Rosati , psychologue, directrice de l’école de Bonneuil, Sara Rudel , psychologue, Cosimo Santese , psychanalyste-psychologue, Madeleine Sarrouy , pédopsychiatre, Pierre Sadoul , pédopsychiatre des hôpitaux en retraite, Gérard Sadron , directeur, Jacques Sarfaty , pédopsychiatre des hôpitaux, Madeleine Sarrouy , pédopsychiatre, Gérard Schmit , professeur de pédopsychiatrie, Sylvie Séguret , Psychologue, psychanalyste, Jean-François Thiébaux , psychiatre des hôpitaux, Marc Toulouse , psychiatre des hôpitaux, Bruno Tournaire-Bacchini , psychiatre des hôpitaux, Jean-Marc Triffaux , psychiatre universitaire, Liège, Belgique, Maria Eugenia Uriburu , psychologue clinicienne, Pierre Vaneecloo , psychiatre des hôpitaux, retraité, Lucie Verkaeren , monitrice IDE, Benjamin Wouts , diplômé en psychologie,

Association des Cadres et Infirmiers en Santé Mentale, Association Marseillaise pour la Psychothérapie Institutionnelle, Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire, Collège de psychiatrie grenoblois, Fédération d’Aide à la Santé Mentale Croix-Marine, Fédération Inter-Associations Culturelles en Santé Mentale, Groupement des Hôpitaux de Jour francophones

Pour signer cette lettre contacter Patrick Alary

patrick.alary@orange.fr 

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>La "radio des fous" a 20 ans (courrier international)

Lancée en 1991 par un psychologue de Buenos Aires, la station de radio La Colifata, animée par les patients d'un établissement psychiatrique, est devenue un modèle original de thérapie et a largement dépassé les murs de l'hôpital.

 

Il y a vingt ans, le psychologue Alfredo Olivera montait à l'hôpital Borda de Buenos Aires un atelier radiophonique, La Colifata, aujourd'hui reconnu pour sa valeur thérapeutique et journalistique. Première radio au monde gérée par les patients d'un hôpital psychiatrique, ce projet a rencontré et rencontre encore un grand écho dans le monde, de l'ancien footballeur Oscar Ruggeri au réalisateur Francis Ford Coppola, en passant par l'animateur de radio Lalo Mir, le médecin et journaliste Nelson Castro et le musicien Manu Chao. Pourtant, son histoire, ses perspectives de travail, et son projet politique restent méconnus. La Colifata "permet à l'ensemble de la communauté de progresser en construisant ses propres solutions face un problème douloureux et complexe", résume Alfredo Olivera.

Revenons vingt ans en arrière. En août 1991, le psychologue Olivera réunit un groupe de patients autour d'un magnétophone, et leur propose de participer à un projet de radio pour raconter leur quotidien. Peu à peu, "un collectif d'hommes et de femmes diagnostiqués comme fous se sont mis à produire une déconstruction des mécanismes à l'œuvre dans notre société."

Les premières années du projet furent rudimentaires et artisanales. Et comme il s'agissait d'une expérience inédite, Oliveira procédait par tâtonnements. Il transmettait ses conversations avec les patients à la radio et leur faisait ensuite écouter la réponse des auditeurs lors de la rencontre suivante. Tout cela par le biais de cassettes. Et édité sur un magnétophone à double cassette qui lui avait été prêté.

L'année suivante, une radio de San Miguel leur offre un émetteur, qui semble tout droit sorti de la Seconde guerre mondiale, et une antenne. Les patients circulaient dans les couloirs de l'hôpital pour tester la puissance et la portée de l'émission. Ensuite un généreux donateur leur fait cadeau d'une Citroën, qui sera rapidement convertie en antenne mobile. Le projet a également bénéficié du soutien de la radio FM La Boca. Les patients autorisés à sortir pouvaient ainsi profiter de ses studios pour apprendre le métier. Une autre station de radio, FM La Tribu, leur a fait bénéficier de son soutien en leur proposant des émissions, des ateliers et des stages.

Aujourd'hui, LT 22 Radio La Colifata possède son propre studio d'enregistrement et elle est diffusée sur les ondes et sur Internet. Les émissions sont retransmises dans tous les hôpitaux psychiatriques argentins. Et grâce à ce projet fondateur, des centaines d'expériences similaires ont vu le jour en Amérique latine et en Europe. La notion de thérapie par l'évènement, l'incidence sur les politiques publiques et la transversalité sont les fondamentaux du projet. Sa réussite s'explique par une nouvelle manière d'être à l'écoute, une ouverture à l'irruption de l'imprévu. "Il était important d'être attentif aux répercussions du phénomène et de créer les conditions idéales pour cette narration. C'est-à-dire, une thérapie par l'événement, pensée de manière active, respectueuse des sujets qui traversent des situations de souffrance psychique, et où la radio fait partie du dispositif."

Dès lors, ce n'est pas seulement le parcours psychiatrique des patients qui importe, c'est aussi leur situation familiale, leur entourage, le fait d'avoir créé de nouvelles relations à travers la radio. Tout cela influe sur la subjectivité. D'après une étude de 2008, 40 % des relations sociales des animateurs de cette radio sont nées de La Colifata, puis se sont poursuivies en dehors de ce cadre.

Cette même étude montre que 40 % des patients vivent avec leur famille, tandis que les 60 % restants résident dans un hôtel proche de l'hôpital. Plus de 70 % des internés ont pour seule source de revenus leur pension d'invalidité. Mais son montant correspond à ce que coûte l'hôtel, si bien que leur état de vulnérabilité psychique et sociale est très important. Ils doivent donc fréquenter les soupes populaires et n'ont pas les moyens de s'acheter des vêtements.

"A quoi cela me sert-il de soigner les gens sur le plan psychique si je ne tiens pas compte de ces situations ?", se demande Olivera. Et de répondre : "Nous élaborons des stratégies d'intervention à partir de ce contexte de vulnérabilité socio-économique, qui se construit dans le devenir de la relation à la personne, afin de pouvoir penser l'aspect radiophonique".


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>Interdire la psychanalyse ?

Les ténors du système néo-libéral travaillent depuis longtemps à de nombreuses choses qu'ils ont expérimentées au début des années 70 au Chili, puis en Argentine. C'est ainsi que le système financier, gestionnaire, celui des actionnaires tout-puissants à pu prendre le contrôle de la planète, ou quasiment. Le documentaire qui suit est exemplaire. Il suffit alors, dans le contexte actuel à propos de l'autisme par exemple, de remplacer le mot marxisme par psychanalyse. Les méthodes sont les mêmes, le but identique. Mais comme vous le verrez, ce sont des méthodes psychiatriques qui illustrent le propos dès le début du documentaire. Pas n'importe lesquelles.

Prenez le temps de visionner cette heure d'histoire et de réflexions, basée sur l'ouvrage de Naomie Klein "La stratégie du choc" : l'objectif de ceux qui prétendent vouloir obtenir des "résultats" (qui sont désastreux pour les populations) est celui d'arrêter toute forme de réflexion, de contestation : au fond c'est l'arrêt de la pensée qui est inscrit dans cette "philosophie" du monde. Et par ricochet, de notre humanité.

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>Des adieux poétiques : hommage d'hommes et de femmes à Hervé Bokobza

Il est jours qui ont de l'importance. Qui font sens. Des jours où les hommes et les femmes réunis sentent en eux un serrement au cœur particulier. C'était un jour comme celui-ci, ce mardi 17 janvier 2012.

Au centre psychothérapique de Saint Martin de Vignogoul, un après-midi de spectacles avait été organisé ce mardi là. En hommage à un homme qui s'en va, continue sa vie ailleurs, n'offrira plus son écoute et son humanité aux personnes en souffrance, en recherche, en doute, qui viennent dans ce lieu protecteur, cet asile merveilleux qu'est Saint Martin de Vignogoul.

Il avait son fauteuil au premier rang, le bougre !

Et il riait, riait : parce que l'hommage était beau et drôle à la fois. Parce que les artistes, ces fous créateurs, avaient mis le paquet : théâtre, musique, poésie, slam… 

Et oui, Hervé Bokobza : 23 ans à être là tous les matins, en groupe de thérapie, ce n'est pas rien. Le groupe 1. Number one. Un cercle de chaises. Des êtres humains, assis, qui se contemplent. Attendent. Parlent. Se taisent. Ecoutent. Crient. Pleurent. Rient.

Hervé Bokobza a reçu le plus beau des hommages. Celui de ceux qui l'aiment pour son "humanité qui sauve", cette extraordinaire capacité à accompagner par le regard, la parole, l'écoute…

Hervé est un artiste de l'âme, des membres du "groupe un" l'ont ainsi défini. 

C'est si vrai. Si simple. On pourrait en pleurer.

Mais régalons-nous, braves gens ! Osons l'espoir, la création et l'inventivité : Hervé Bokobza est parti de Saint Martin, vive Hervé Bokobza ! (et Saint Martin).

Ecoutez maintenant ce texte déclamé avec la force de l'âme, son auteure se nomme Jehanne.

Prenez le temps d'entendre et vibrer, rire avec ces mots qui cognent, qui secouent et qui trompent aussi : là est toute la substance moelle de nos existences, celle des êtres vivants qui vibrent, cherchent, souffrent, jouissent et jamais ne ferment la porte. Nous sommes des êtres humains.

Vive nous !

 

 


Boulimique-Jehanne by collectif39

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>Fleurs du mal, Le Romantisme à l'ère d'internet

Là tout n'est qu'ordre et beauté, luxe, calme et volupté. (Charles Baudelaire)

 

Gecko, jeune beur, sort difficilement d'une enfance de foyers. Streetdancer, yamakusi, il arpente les rues parisiennes à la recherche de lui même. Anahita, jeune iranienne, fuit à Paris la violence de son pays. 

Etudiante à l'Université de Téhéran, belle et intelligence, elle découvre paris à la recherche d'une liberté inconnue. L'internet habite les vies de nos deux protagonistes. Violent parfois, il pénètre les vies de ces deux jeunes à leur insu et rappelle sans cesse la cruauté du monde et la violence des actes.

Ce film est l'histoire d'une rencontre de deux jeunesses blessées. Mais c'est aussi l'histoire d'un protagoniste technologique qui s'immisce dans une relation amoureuse romantique et passionnelle en plein coeur de la ville des amoureux.

Anahita ne peut pas briser le fil qui la retient à l'Iran et c'est son inséparable ordinateur qui lui rappelle sans cesse le pays qu'elle a fui, la lâcheté qu'elle a amenée avec elle dans ses bagages, l'envie de vivre qui l'a poussée à partir et les amis étudiants qui se battent pour une liberté chimérique au prix le plus fort qui soit, celui de leur vie.

Gecko quant à lui, exprime sa solitude à travers un corps en perpétuel mouvement, il danse, danse et danse encore son ennui, sa honte de n'avoir pas été un bon fils et son envie d'aventure.

Ponctué de vidéos youtube montrant la violence iranienne dans sa réalité la plus crue, parfois à la limite de l'insoutenable, on ne peut pas rester indifférent devant un tel film.

Quand le spectateur s'évade dans le romantisme de cette relation amoureuse, Internet le rappelle sans cesse à son souvenir. Il se retrouve alors auprès d'Anahita et souffre avec elle en portant la honte d'être si impuissant devant de telles images. A d'autres moments, le corps du spectateur s'anime devant les figures complexes de Gecko, il danse et voltige avec lui mais le Web revient encore et encore lui rappeler qu'il est des pays où même danser est un crime.

David Dusa, réalisateur de Fleurs du Mal a su mettre dans cette oeuvre toutes les émotions les plus vives et les plus crues. D'origine hongroise, élevé en Suède et vivant en France, ce cinéaste a collectionné des années durant des vidéos de l'insurrection iranienne ayant suivi l'élection de Mahmud Ahmadinedjad en 2009, sans trop savoir comment il allait les utiliser. C'est sa rencontre avec les deux acteurs principaux de ce film qui lui a permis de construire l'intrigue de ce film sur fond d'Internet.

David Dusa nous entraîne alors dans un tourbillon de sentiments des plus forts et des plus violents. La relation amoureuse tissée entre ces deux jeunes protagonistes est empreinte d'un romantisme rare mais elle est aussi le rappel qu'une rencontre d'individus est tout d'abord la rencontre de deux histoires, de deux souffrances parfois tellement fortes qu'elles en deviennent incompatibles.

Des dialogues ciselés, pertinents, sensibles entraînent le spectateur dans des ressentis très perturbants. C'est ainsi qu'on se laisse entraîner dans le sentiment amoureux, la passion, la violence, l'impuissance, la honte et dans tout ce qui fait qu'on se sent exister au plus profond de soi même.

Internet devient le personnage principal. Il est celui qui nous permet de nous rencontrer, de nous informer mais il est aussi celui qui, par sa violence et sa réalité crue, peut nous séparer, nous hanter et nous faire faire des choix irréversibles. Anahita et Gecko vivront leur passion jusqu'au bout de ce qu'ils peuvent et savent donner, l'iranienne qui rêve de liberté et le danseur qui s'emprisonne dans des clichés sociaux et culturels se donnent l'un à l'autre sans compter, sans espérer et Internet saura les rappeler à leur douloureuse réalité.

Il est difficile d'écrire au sujet d'une telle oeuvre tant l'émotion est fulgurante. Si on devait en résumer l'essence et le sens, un mot suffirait peut-être : celui de Liberté. Les Fleurs du Mal n'ont jamais été d'autant d'actualite quand Charles Baudelaire, en d'autres temps avait dit : 

Les sanglots des martyrs et des suppliciés

Sont une symphonie enivrante sans doute,

Puisque, malgré le sang que leur volupté coûte,

Les cieux ne s’en sont point encore rassasiés.


 

Sortie en salles le 8 février.

Marie L

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>Adresse à tous les candidats républicains pour qu’ils s’engagent à soutenir une psychiatrie fondée sur l’hospitalité.

 

Collectif des 39 – Quelle hospitalité pour la folie ? Quelle hospitalité pour l’humain ?

Meeting du 17 mars 2012 à "La maison de l'Arbre" à Montreuil sous Bois 93

 

La folie n’est concevable qu’irréductiblement liée à la condition humaine.

Les conditions d’hospitalité pour la folie se dégradent inexorablement depuis près de trente ans.

Depuis le 2 décembre 2008, date du discours du Président de la République à l’hôpital d’Antony, la situation s’est considérablement aggravée ; il est de plus en plus difficile de soigner et d'être soigné particulièrement depuis la loi du 5 juillet 2011.

Nous sommes à un moment politique où tous ces enjeux cruciaux pour la psychiatrie se posent aussi pour l'ensemble de la société.

Nous nous adressons à tous les candidats républicains pour qu’ils s’engagent à soutenir une psychiatrie fondée sur l’hospitalité.

Nous, professionnels du sanitaire, du médico-social, patients, familles et proches qui fréquentons la psychiatrie affirmons que : 

-L’engagement thérapeutique doit conduire à mettre l'accueil au centre des préoccupations afin de prendre en considération la vulnérabilité et la créativité des patients nécessaires à toute prise en charge thérapeutique.

-La dimension relationnelle est au cœur de tout processus de prévention et de soins.

-L’accès à des soins de qualité est un principe républicain.


Aussi refusons-nous avec force :

– L’envahissement d’une logique gestionnaire et managériale, l’exigence de rentabilité du soin, le manque de temps soignant, le manque de lits et de places, qui amènent à une accélération inconsidérée des prises en charge. Trop souvent les patients se retrouvent déshospitalisés avant d’aller suffisamment bien. Ce qui de fait conduit à un abandon des plus fragiles renvoyés à la rue ou à la prison.

–  Les empêchements à la mise en place d’un accueil de bonne qualité dans les services et dans les lieux ambulatoires, où les protocoles standardisés pseudo scientifiques dénient la singularité de chaque acte, de chaque projet soignant, de chaque patient et constituent un obstacle à la rencontre avec les patients.

– La politique de la Haute Autorité de Santé (HAS) qui  impose cette protocolisation destructrice d’hospitalité par des « quasi rituels » de soumission sociale au travers de processus d’accréditations homogénéisants et abêtissants.

– La nouvelle loi du 5 Juillet 2011qui se fonde sur l’illusion dangereuse qu’un traitement sous la contrainte juridique dans la cité est une avancée pour les patients ou leur famille.

– La mise à mal de la protection judiciaire de la jeunesse et la volonté de prédire le destin psychopathologique d’enfants de 3 ans ou d’adolescents. Ces choix  vont à l’encontre de toute expérience clinique et éducative et aggravent de fait la situation psychique des jeunes concernés.

Les diagnostics effectués par des programmes informatiques ou des questionnaires sans finesse clinique qui relèvent d’une pratique machinique que nous n’aurions jamais imaginée.  Cette dérive ne peut conduire qu’à des aberrations et à une déshumanisation.

Aussi soutenons nous toutes pratiques qu’elles soient publiques, libérales conventionnées ou associatives, garantissant en particulier la continuité des soins et prônant l’attachement à des valeurs fondamentales telles que le respect du secret professionnel, l’engagement relationnel, l’indépendance professionnelle et le respect de l’intimité du patient.

Nous défendons pour tous les professionnels de la psychiatrie  un enseignement qui repose  notamment sur la psychopathologie et nécessite la réintroduction de formations spécifiques ancrées sur la clinique.  Une rupture nette du cadre hospitalo – universitaire  sous l’emprise des laboratoires pharmaceutiques doit être effective.

Nous nous battons déjà quotidiennement là où nous travaillons pour une autre pratique du soin et de l’hospitalité pour les patients et leurs familles. Nous le faisons malgré toutes les difficultés que nous rencontrons sur le terrain. Les résistances internes aux collectifs de soins ont toujours nécessité un travail d’analyse permanent ouvrant  une possibilité  concrète d’agir sur  l’organisation  du travail. Or  ces résistances se trouvent considérablement aggravées par l’organisation bureaucratique actuelle de la Psychiatrie.

Nous sommes dans l’urgente nécessité de refonder la psychiatrie avec les principaux concernés: soignants de tous métiers et travailleurs sociaux, patients et usagers, familles et tous ceux, intellectuels et artistes qui soutiennent notre  mouvement.

Nous affirmons que cette perspective est essentielle pour que la psychiatrie ne bascule pas dans la barbarie où rejeter et punir feraient disparaître les pratiques accueillantes de soins désaliénistes.

Nous  demanderons solennellement aux politiques lors de ce meeting du 17 mars 2012 à "La maison de l'Arbre" à Montreuil sous Bois 93, de s’engager dans ce mouvement de refondation et d’abroger

– la Loi du 5 juillet 2011, et toutes les lois organisant depuis des années la bureaucratisation de la gouvernance hospitalière.

– La loi du 25  février 2008 sur la rétention de sûreté


Contacts presse:


Yves Gigou: 06 60 48 98 84 – yglns39@orange.fr


 

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>Appel au meeting du 17 mars 2012

 

Communiqué de presse – Collectif des 39 – Quelle hospitalité pour la folie ?

Appel au meeting du 17 mars 2012 à "La maison de l'Arbre" à Montreuil sous Bois 93

La folie n’est concevable qu’irréductiblement liée à la condition humaine.

Depuis le 2 décembre 2008, discours du Président de la République à Antony la situation ne fait que se dégrader, il est de plus en plus difficile de soigner et d'être soigné particulièrement depuis la loi du 5 juillet 2011.

C'est pour ces raisons que nous interpellerons lors de cette journée les candidats à l'élection présidentielle ainsi que celles et ceux qui solliciterons nos suffrages aux législatives.

Reprenant la charte que nous avons rédigés le 7 février 2009.  

Nous, soignants, patients/usagers et familles en psychiatrie affirmons que :

• Notre engagement thérapeutique tient d’abord à la considération de la vulnérabilité et de la créativité des patients ; il doit par ailleurs nous conduire à promouvoir tous les lieux nécessaires à une hospitalité pour la folie qui constitue l’enjeu de notre travail : dans l’hospitalisation, comme dans les lieux ambulatoires qui doivent mettre l’accueil au cœur de leur projet.

• La dimension relationnelle est au cœur de tout processus de prévention et de soins

• Les valeurs républicaines de liberté, égalité et de fraternité sont le socle constitutif de toute pratique.

Aussi refusons-nous avec force :

• L’abandon des patients renvoyés à la rue ou à la prison

• L’idéologie sécuritaire qui stigmatise, contient, isole et maltraite les plus démunis des citoyens

• Toutes les lois qui confirmerait la ségrégation des patients en les assujettissant à des lois spécifiques et aggraveraientt la tendance à l’enfermement.

• L’idéologie falsificatrice qui ferait croire que soigner sous la contrainte dans la cité est une avancée pour les patients ou leur famille.

• L’imposture des protocoles standardisés pseudo scientifiques déniant la singularité de chaque acte, de chaque projet soignant, de chaque patient.

• La mainmise de l’appareil technico gestionnaire tentant d’annihiler, de nier et d’écraser la dimension créative et inventive de tout processus de soin.

Aussi soutenons nous toute pratique qu’elle soit publique en accord avec les acquis du secteur, libérale conventionnée ou associative, garantissant en particulier la continuité des soins et prônant l’attachement à des valeurs fondamentales telles que : respect du secret professionnel, engagement relationnel, indépendance professionnelle, respect de l’intimité du patient.

Nous défendons un enseignement reposant en particulier sur la psychopathologie, et nécessitant la réintroduction de formations spécifiques désarrimées de la logique, du cadre théorique et des intérêts hospitalo-universitaires actuels autant que de l’emprise des laboratoires pharmaceutiques et ceci pour tous les professionnels de la psychiatrie.

Avec et pour ces valeurs nous continuons à dénoncer toutes les dérives politiques, techniques, gestionnaires et sociales qui enferment peu à peu les patients dans un carcan déshumanisant.

Nous affirmons que ce combat est essentiel pour que la psychiatrie ne bascule pas dans la barbarie où rejeter et punir ferait disparaître les pratiques accueillantes de soins désaliénistes.

Contacts presse:

 
Yves Gigou: 06 60 48 98 84 – yglns39@orange.fr


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>L’autisme, grande cause nationale ?

L'autisme a reçu le label "Grande cause nationale 2012". L'exposition médiatique de ce sujet va s'intensifier, un groupe de travail s'est formé à l’Assemblée Nationale dont les premières rencontres parlementaires débutent jeudi.

 

 
 
Comment ne pas se réjouir de l'intérêt porté à l'autisme face aux insuffisances actuelles de la prise en charge thérapeutique, éducative et pédagogique et des possibilités professionnelles proposée à ces patients (adultes et enfants) ? Cependant, l'aspect polémique et orienté des discours offerts au grand public empêche d'ores et déjà d'être optimiste sur l'issue de ce travail parlementaire.
En effet, on nous donne à entendre:
 
Ø De fausses évidences:
 
· "L'autisme est un trouble neurologique".
         Faux: si une dimension biologique de l'autisme est une hypothèse forte, les différentes recherches effectuées sur le sujet, tant sur le plan d'une localisation neurologique (cerveau, cervelet, tronc cérébral), que d'une anomalie génétique ou hormonale (ocytocyne), n'ont pas permis d'établir formellement une origine organique à l'autisme. Il s'agit probablement d'une pathologie liée à l'intrication de plusieurs dimensions (organique, psychopathologique, environnementale, histoire de vie).
Mais ceci est un faux débat car une origine organique à l'autisme ne change rien au fait que ces enfants puissent évoluer grâce aux thérapies relationnelles.
 
· "Le vrai problème est un grand retard diagnostique, qui montre l'insuffisance de formation des pédopsychiatres"
         Faux: la raison de l'augmentation du nombre d'enfants autistes dépistés (passant de 1 enfant sur 2000 à 1 sur 150, environ) est l'élargissement des critères d'inclusion dans ce diagnostic de la classification DSM.
En effet, les "troubles envahissants du développement" ou "désordres du spectre autistiques" composent une acception de l'autisme beaucoup plus large que par le passé et conduisent à appeler "autistes" des enfants ou adultes qui précédemment auraient reçu un autre diagnostic (schizophrénie infantile, dysharmonie évolutive…). Ceci aux dépens de la finesse diagnostique et, du coup, de la finesse des prises en charge, moins ajustées à la singularité de chaque patient.
Par ailleurs, cette fausse évidence entraîne une confusion entre "diagnostic" et "prise en charge". Que le diagnostic soit posé tôt ou tard, la vraie question est celle des modalités de suivi des enfants présentant des particularités de développement, qui ne peut être réglée par un protocole préétabli et ce, quel que soit leur diagnostic.
Enfin, le diagnostic d'autisme est souvent posé tardivement parce que la clinique des enfants, de tous les enfants, est fluctuante et réversible, il est donc parfois dangereux voire traumatisant pour un enfant et pour ses parents de poser trop rapidement un diagnostic d'autisme. Il existe également un temps nécessaire aux parents pour accepter la pathologie de leur enfant et ce temps est propre à chacun. Si certains souhaitent un diagnostic le plus précoce possible, d'autres au contraire préfèrent que toutes les autres options diagnostiques soient éliminées précédemment.
 
· "Les pédopsychiatres français refusent de se mettre à jour de l'évolution des connaissances et persistent à utiliser des classifications vieillottes telle la CFTMEA".
         Faux: la plupart des pédopsychiatres français sont plus qu'à jour des scandales accompagnant la création des diagnostics DSM: alliances objectives entre médecins, compagnies pharmaceutiques et financeurs de l'industrie de la santé. Cette classification dite athéorique est au contraire profondément idéologique dans le sens d'une vision mécaniciste de l'être humain et se situe au carrefour d'enjeux financiers importants. Ceci lui ôte toute objectivité et toute scientificité.
 
Ø Un faux procès fait à la Psychanalyse:
 
· "La Psychanalyse est inefficace et inadaptée pour les enfants autistes".
         Faux: tout d'abord, la « Psychanalyse » n'existe pas. Il y a des psychanalyses, différents courants dans la psychanalyse d'enfants, qui travaillent différemment, comme il y a différents courants à l'intérieur du cognitivisme.
L'objet général de la psychanalyse des enfants autistes est de réduire leurs angoisses, de libérer leurs capacités d'apprentissage, de permettre qu'ils trouvent du plaisir dans les échanges émotionnels et affectifs avec les personnes qui les entourent, de permettre qu'ils gagnent du champ dans les choix de vie les concernant. Il s'agit d'un travail au long cours dont les résultats ne sont pas évaluables avec des critères mécanicistes. Ainsi, les méthodes psychothérapiques sont complémentaires des méthodes éducatives et pédagogiques. L'une ne remplace pas l'autre. Il s'agirait que ces différentes théories et pratiques puissent dialoguer sur le mode de la controverse et non sur celui de la polémique éliminationniste. 
Le vrai problème n'est pas celui de la méthode employée (psychanalyse, cognitivisme, pédagogie) mais celui de l'intensivité des suivis au cas par cas. Toute méthode, appliquée de manière intensive et raisonnée (au cas par cas pour chaque enfant) et avec un fort engagement des soignants, éducateurs, pédagogues, aboutit à des progrès chez l'enfant autiste.
 
· "La psychanalyse culpabilise les parents d'enfants autistes et notamment les mères".
         Faux: la culpabilisation des parents est une dérive malheureuse des discours soignants, éducatifs et pédagogiques de manière générale, et ce, de tout temps et de toutes époques.
Certains psychanalystes n'y ont pas échappé et cela est tout à fait affligeant.
La psychanalyse, en elle-même, offre au contraire les outils pour penser cette facilité qui consiste à incriminer les parents comme fautifs. En effet, par le biais des concepts de résistance du ou des thérapeutes, du contre-transfert, de la rivalité imaginaire qui peut surgir entre les équipes soignantes, éducatives, pédagogiques et les parents, la psychanalyse a construit les outils qui permettent de repérer, d'analyser et de dépasser les mouvements qui amènent un soignant, un éducateur ou un pédagogue à accuser massivement les parents d'un enfant en difficulté. 
 
Ø De fausses nouveautés:
 
"Avec des rééducations adaptées, un enfant autiste peut progresser et gagner en autonomie, mener une vie professionnelle et amoureuse épanouissante".
         Oui, et la même phrase est applicable "avec des soins adaptés".
 
Ø Un faux scandale et un faux espoir:
 
·"Le scandale est le manque d'intégration en école ordinaire des enfants autistes alors que, lorsque celle-ci est possible, ces enfants effectuent des progrès spectaculaires".
         Faux: l'intégration scolaire en école ordinaire des enfants autistes est un formidable tremplin pour certains, une simple aide pour d'autres, une corvée douloureuse pour d'autres encore et une souffrance intolérable pour d'autres enfin. Et ce, quels que soient les aménagements effectués.
L'intégration scolaire fait partie des techniques pédagogiques proposées aux enfants autistes, elle ne doit pas remplacer les techniques thérapeutiques ni les techniques éducatives. Ce n'est pas l'un ou l’autre mais les trois ensemble, au cas par cas pour chaque enfant.
Le triomphalisme des discours présentant l'intégration scolaire comme seule méthode faisant progresser l'enfant risque de provoquer de faux espoirs et, en conséquence, de lourdes déceptions pour les parents d'enfants qui ne peuvent supporter l'école et devront rester à domicile, sans place dans un établissement spécialisé.
 
Ø Un vrai scandale: la pénurie de places en établissements spécialisés et adaptés, en France, pour les enfants et les adultes en difficultés.
 
Il est scandaleux de devoir envoyer son enfant en Belgique car aucun établissement français adapté ne peut l'accueillir faute de place.
Il est également scandaleux de voir certains établissements inadaptés à la prise en charge d’enfants autistes (IME, ITEP) être mis en avant pour palier à l'insuffisance du service public ou à l'absence d'hôpitaux de jour dignes de ce nom. Ces établissements se voient souvent obligés de refuser les enfants les plus en difficulté, dans l'incapacité de leur offrir un accueil adéquat.
Cela produit une ségrégation honteuse et c'est à cela que devraient s'atteler les pouvoirs publics!
 
         Au total : quel sera l'effet de la mise en place du groupe parlementaire de travail sur l'autisme ? Au vu de la forte partialité des discours tenus, gageons que les conclusions aboutiront à la mise à l'écart des théories et pratiques psychanalytiques (pour des raisons idéologiques) et à une loi renforçant l'obligation scolaire des enfants en difficulté sans augmenter le nombre de places en établissements spécialisés (plus économique et plus démagogique à la veille des élections).
 
C'est alors que nous, patients, parents, soignants, nous aurons beaucoup perdu. Espérons que cette année sera aussi celle de la pensée et de la controverse, pas seulement celle du populisme et de la réduction des dépenses de santé.
 
Journée d’action des 39, le samedi 17 mars 2012 à Montreuil, "La Parole Errante à la Maison de l'Arbre", 9 rue François Debergue,  93100 – Montreuil-sous-Bois, Metro Croix de Chavaux.(métro ligne 9)
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>Décès de Monsieur Thierry MASNOU

 

Nous souhaitons vous faire part de la triste nouvelle du décès de Monsieur Thierry MASNOU.

Malgré une grave maladie, Monsieur Masnou a travaillé tant qu'il l'a pu au service de la psychiatrie, que ce soit comme administrateur d'associations du secteur médico-social, comme adhérent d'associations de parents ou comme membre actif du collectif des 39.

Il était très soucieux des conditions d'hospitalisations des malades et défendait l'idée qu'à leur sortie d'hospitalisation ils puissent avoir un logement ou un hébergement décent.

Père d'un enfant malade, il a initié, au sein du collectif, la création d'une commission "famille" permettant aux familles qui ne se retrouvent plus dans le discours de certaines associations de parents de s'engager à nos côtés. Nous éspèrons que ses efforts de création d'un réseau social entre les familles et les 39 ne seront pas vains et que cette commission perdurera. Ceux d'entre vous qui souhaitent continuer à faire exister cette commission peuvent écrire à maurinbenedicte@yahoo.fr

Nous tenons à présenter toutes nos condoléances aux proches de Monsieur Masnou et en particulier à sa femme et à ses enfants.

Le collectif des 39

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>La logique sécuritaire des « soins » sans consentement en ambulatoire enfin explicitée par le gouvernement

 

Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire

Communiqué du 10.01.2012


Dans un projet de décret de trois ministères (Intérieur, Santé et Cohésion sociale), la logique des « soins sans consentement en ambulatoire » nommés « soins psychiatriques sous la forme mentionnée au 2° de l’article L.3211-2-1 » par la loi du 5 juillet 2011 se précise.

 

Nos analyses concernant le contrôle social des personnes soumises à ce régime de « soins » sont clairement explicitées dans ce projet de décret (cf. l’annexe). Bien loin des discours rassurants sur l’atteinte aux libertés fondamentales prononcés lors du vote de la loi, le registre sécuritaire, sous couvert de permettre la réinsertion sociale, est entériné.

 

Sous prétexte d’une convention devant « définir le cadre global d’une prise en charge et un accompagnement de qualité en matière de réinsertion sociale des patients faisant l’objet de soins psychiatriques sous la forme mentionnée au 2° de l’article L.3211-2-1», il est imposé aux patients une levée du secret médical (Art. R.3222-11): « Les professionnels sociaux et médico sociaux intervenants dans la réinsertion sont informés des lieux et des horaires des différentes modalités de prise en charge mentionnées dans le programme de soins ».

 

Nous rappelons à l’ensemble des professionnels que la mise en place de tels « soins » n’est en rien obligatoire quand les personnes hospitalisées sans leur consentement sortent « définitivement » de l’hôpital. Ainsi est-il nécessaire de s’efforcer, pendant l’hospitalisation, à transformer les « soins sous la contrainte » en soins libres.

 

Il appartient aux équipes de travailler le consentement et l’alliance thérapeutique dans le temps de l’hospitalisation. En aucun cas la contrainte légale ne peut se substituer à la relation thérapeutique, sauf à croire qu’il n’y a que la loi pour soigner les patients.

 

Nous, collectif des 39, appelons de nouveau l’ensemble des équipes de psychiatrie à refuser la mise en place de tels « soins » pour les patients, une fois leur sortie de l’hôpital actée.

 

Nous appelons d’emblée au retrait de ce projet de décret levant le secret médical et qui, sous prétexte d’assurer une réinsertion pour les patients soignés « sans leur consentement », organise de fait leur stigmatisation dans l’espace démocratique accordé à tout citoyen en situation de précarité

 

Journée d’action des 39, le samedi 17 mars 2012 à Montreuil"La Parole Errante à la Maison de l'Arbre", 9 rue François Debergue,  93100 – Montreuil-sous-Bois, Metro Croix de Chavaux.(métro ligne 9)

 

Inscriptions à la journée d'action

 

ANNEXE : Projet de Décret

 

Décret n°                          du

 

relatif à la réinsertion sociale des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques.

 

NOR : […]

 

Le Premier ministre,

 

Sur le rapport du ministre du travail, de l’emploi et de la santé,

 

Vu le code de la santé publique, notamment son article L.3222-1-2 ;

 

Vu l’avis de la commission consultative d’évaluation des normes ;

 

 Le Conseil d’Etat (section sociale) entendu,

 

Décrète :

 

Article 1er

 

Au sein du chapitre II du titre II du livre II de la troisième partie du code de la santé publique,  il est inséré une section ainsi rédigée :

 

« Section II  Réinsertion sociale des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques sans leur consentement.

Art. R.3222-10  En application de l’article L.3222-1-2, le directeur de l’établissement de santé conclut des conventions avec le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police, les représentants des collectivités territoriales et leurs groupements compétents sur les territoires de santé correspondants et le directeur général de l’agence régionale de santé.

Ces conventions ont pour but de définir le cadre global d’une prise en charge et un accompagnement de qualité en matière de réinsertion sociale des patients faisant l’objet de soins psychiatriques sous la forme mentionnée au 2° de l’article L.3211-2-1. Elles définissent les modalités de coopération entre les personnels de l’établissement prenant en charge le patient, les personnels des établissements et services sociaux et médico-sociaux et les services territoriaux d’assistance sociale afin de préciser les conditions d’organisation des réponses des différents acteurs sur un territoire déterminé et les procédures à mettre en œuvre en cas d’urgence. Ces conventions assurent la coordination des coopérations ainsi définies avec les

 

actions de soutien et d’accompagnement des familles et des aidants des patients menées par l’établissement de santé et les associations mentionnées à l’article L.3221-4-1.

 

Ces conventions précisent pour chacun des services placés sous l’autorité des signataires les principes et modalités de leur collaboration en matière d’échanges d’information, de formation et en cas de réadmission des patients en hospitalisation complète.

 

 La  modalité de mise en œuvre de la convention peut être précisée dans un protocole individuel relatif à un patient. Ce protocole constitue une pièce du dossier médical du patient.

 

 Art. R.3222-11   Les conventions précisent les modalités des échanges d’information prévus à l’article R.3222-10 intervenants, sauf en cas d’urgence due notamment à la levée de l’hospitalisation complète par le juge des libertés et de la détention avant la définition du programme de soins du patient et pendant l’exécution de ce programme de soins.

 

 Avant l’établissement du programme de soins, le psychiatre prenant en charge le patient informe les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion  de la prochaine modification de la prise en charge du patient, des caractéristiques du patient ainsi que de ses difficultés et de ses besoins en matière de réinsertion sociale.

 

Pendant le suivi du programme de soins, l’équipe soignante, les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion organisent des échanges réguliers sur la réinsertion sociale du patient et sur son évolution, afin de favoriser la continuité de la prise en charge, d’éviter les situations de crise et les ré hospitalisations à temps complet en urgence. Le protocole établi pour un patient indique la procédure à suivre en cas d’urgence.

 

Les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion sont  informés des lieux et des horaires des différentes modalités de prise en charge mentionnées dans le programme de soins

 

Art. R.3222-12  Les conventions prévoient que les équipes soignantes, les professionnels sociaux et médico-sociaux intervenant dans la réinsertion définissent leurs besoins communs et spécifiques en formation, notamment en matière de connaissances des pathologies mentales, de soins sans consentement, de dispositifs pour la réinsertion sociale.

 

 Art. R.3222-13  Sans préjudice des dispositions de l’article L.3222-1-1A, les conventions précisent les conditions dans lesquelles le patient en programme des soins est ré hospitalisé à temps complet, les organisations mises en place et les missions de chaque professionnel concerné pour :

 

– le  transport du patient, du lieu où il se trouve vers l’établissement de santé, par l’équipe soignante éventuellement escortée par les forces de police ou de gendarmerie requises par le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police lorsque le patient présente un risque d’atteinte grave à l’ordre public résultant de sa dangerosité particulière attestée par un certificat ou un avis médical.

 

– l’accès au domicile du patient par l’équipe soignante.  En cas de refus réitéré du patient de laisser le libre accès à son domicile, et après que l’équipe soignante a tenté d’obtenir l’assentiment du patient d’accéder à son domicile, le recours aux forces de l’ordre peut être sollicité par l’intermédiaire du directeur d’établissement saisi par l’équipe soignante. Les forces de police ou de gendarmerie requises par le préfet de département ou, à Paris, le préfet de police interviennent lorsque les troubles mentaux du patient compromettent sa sécurité etla sureté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public.

 

Art. R.3222-14 Les conventions mentionnées à l’article R.3222-10 sont signées pour une durée d’un an, renouvelable par tacite reconduction. Leur application fait l’objet d’une évaluation annuelle conduite par l’établissement de santé avec l’ensemble des signataires de la convention. Cette évaluation est établie à partir d’une liste minimale d’indicateurs validés par l’agence régionale de santé et relatifs au projet de réinsertion sociale du patient, à la formation des professionnels concernés, et aux réadmissions en hospitalisation complète.

Les conventions et leurs avenants sont publiés au bulletin des actes administratifs de la préfecture du département dans lequel l’établissement de santé initiateur de la convention a son siège.

                                                            Article 2

 

 Le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités locales et de l’immigration, le ministre du travail, de l’emploi et de la santé, la ministre des solidarités et de la cohésion sociale et la secrétaire d’Etat auprès du ministre du travail, de l’emploi et de la santé chargée de la santé sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

 

 Le

Par le Premier ministre :

 

Le ministre du travail, de l’emploi et de la santé

Xavier BERTRAND

 

Le  ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités locales et de  l’immigration

 

Claude GUEANT

La ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Roselyne BACHELOT-NARQUIN

 

La secrétaire d’Etat auprès du ministre du  travail, de l’emploi et de la santé chargée de la santé

Nora BERRA

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>Pour une refondation de la psychiatrie (Tribune dans liberation.fr, le 02 janvier 2012)

Par Hervé Bokobza, psychiatre, membre du collectif des 39 contre la nuit sécuritaire

La psychiatrie, discipline profondément ancrée dans le champ social, est en grave péril. Ceci a été dénoncé vivement et clairement lors des états généraux de la discipline en 2003. Nous affirmions alors que seul un changement radical de politique permettrait d’éviter le risque de désastre sanitaire auquel nous étions confrontés.

Traiter des personnes souffrant de pathologie mentale pose toujours la question de l’exclusion et de la ségrégation : la peur de la folie est ancestrale et le demeurera probablement. Peur de la folie de l’autre, de la sienne, de l’étrangeté, de l’étrange, du déraisonnable.

Soigner, c’est dédramatiser, faire confiance, accompagner, encourager.

C’est, quand cela est possible, rassurer les familles, tenter d’expliciter notre travail, leur permettre de traverser des moments on ne peut plus douloureux.

Or, il y a trois ans, le président de la République est venu stigmatiser les malades mentaux : ils seraient tous potentiellement dangereux, nous a-t-il affirmé.

Le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire est né de cette infamie.

En juillet, une loi inique et liberticide était votée : sous-tendue par cette supposée dangerosité, elle enferme les patients dans une coquille sécuritaire et elle continue de transformer les soignants en exécuteurs de diktats normatifs. Au lieu de veiller sur les patients, on nous demande de les surveiller.

La norme envahit les services, les pratiques, les espaces de soins : tout doit être contrôlé, protocolisé, prévu, géré, contrôlé, sécurisé. Or, le soin a besoin de liberté de penser et d’action, de confiance, de surprise.

Notre temps doit être consacré à nos patients, au travail de réflexion au sein des équipes de soin. Or, pour répondre aujourd’hui à ces exigences normatives, chaque soignant est convoqué à se replier ou à se renfermer pour accomplir sa «mission» : remplir des cases, des fichiers. En fait, tout se passe comme s’il fallait éviter, refouler ou dénier l’essence même de notre pratique : la rencontre avec le patient, seul garant d’un soin de qualité.

Une machine infernale est en marche. Chacun tente de résister comme il le peut. Lors d’un récent débat avec Claude Finkelstein, au forum de Libération à Lyon, j’insistais pour signifier que la psychiatrie ne se limitait pas, loin de là, «aux horribles internements» ; que près de trois millions de personnes se confient à des soignants tous les ans avec confiance et espoir, que c’est justement pour tenter de sauvegarder ces rapports de confiance que des mouvements importants de toute la profession s’étaient organisés dans le but de combattre cette récente loi qui justement institue la méfiance. Mais nous avons perdu une nouvelle bataille.

Dans ces conditions, que deviennent et que vont devenir nos lieux d’hospitalisation ? Seront-ils ou ne sont-ils pas déjà complètement obsolètes ? Ne sont-ils pas les lieux qui peuvent le moins résister à cette machine normative et excluante, dont les récentes lois ne représentent que les derniers avatars ?

Devrons-nous continuer d’accepter que nos pratiques soient à ce point méprisées, dévalorisées, étouffées par les pouvoirs publics ?

Devrons-nous continuer à garder un «entre nous de circonstance» où chacun tente de se débrouiller comme il le peut, en s’épuisant et parfois vainement, et n’a de cesse de dire : «Ce n’est plus possible» ?

Devrons-nous encore longtemps courber l’échine, oublier de dire, accepter l’inacceptable, participer à cette formidable œuvre de démolition qui s’accomplit devant nous et hélas parfois avec nous, au mépris de nos valeurs et de nos espoirs ?

Car nous continuons d’affirmer que ceux qui souffrent de pathologie mentale ont besoin et auront besoin à des moments de leur existence de recourir à des lieux d’asile et qu’il est hors de question de supprimer encore des lits ! Mais inventer des lieux où l’accueil de la souffrance est possible est indispensable ! Lieux où les rencontres nécessaires à tout soin qui se réclame «humain» ne sont pas dictées par des protocoles aliénants, lieux où les règlements ne sont pas l’unique proposition «contenante», lieux où prendre du temps est possible et estimé nécessaire, lieux où le patient puisse tout simplement être reconnu dans sa singularité.

Or, jour après jour, ces espaces sont de plus en plus difficiles à maintenir vivants. Que beaucoup disparaissent pour laisser place à des endroits indignes des valeurs humanistes qui ont fondé la psychiatrie moderne nous fait honte et nous révolte. Nous ne l’acceptons pas car cela nous écœure.

Seul un mouvement de grande envergure réunissant soignants, patients, familles, citoyens pourra stopper cette machine infernale. Il est décidément grand temps de refonder la psychiatrie.

Article original sur liberation.fr : http://www.liberation.fr/societe/01012380766-pour-une-refondation-de-la-psychiatrie

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>Les voeux des 39 pour 2012

Pour commencer l’année deux textes en attendant le rendez-vous du 17 mars 2012 à « La parole errante » 

 

On ne peut se défendre de l'impression que les hommes se trompent généralement dans leurs évaluations.

Tandis qu'ils s'efforcent d'acquérir à leur profit la jouissance, le succès ou la richesse, ou qu'ils les admirent chez autrui, ils sous-estiment en revanche les vraies valeurs de la vie.

Mais sitôt qu'on porte un jugement d'un ordre aussi général, on s'expose au danger d'oublier la grande diversité que présentent les êtres et les âmes.

Une époque peut ne pas se refuser à honorer de grands hommes, bien que leur célébrité soit due à des qualités et des oeuvres totalement étrangères aux objectifs et aux idéals de la masse. On admettra volontiers, toutefois, que seule une minorité sait les reconnaître, alors que la grande majorité les ignore.

Mais, étant donné que les pensées des hommes ne s'accordent pas avec leurs actes, en raison au surplus de la multiplicité de leurs désirs instinctifs, les choses ne sauraient être aussi simples.

 

Malaise dans la civilisation est l'un des textes classiques qui, publiés primitivement dans la Revue française de Psychanalyse, sont devenus introuvables. Il nous a semblé important de le remettre à la disposition de nos lecteurs. La présente traduction a paru dans la Revue française de Psychanalyse, t. VII, n ̊ 4, 1934, p. 692, et t. XXXIV, no I, 1970, p. 9. (Note de l’Éditeur.)

 

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Il est un ridicule usage,

– Dont on abuse au jour de l'an – 

Qui met nombre de gens en rage 

La manie est au Compliment ;


C'est ainsi de par l'étiquette –

Que bien des amis… détestés 

Sur un carton vous font risette…

– Sourires sitôt protestés !


Mais, galant ou grave en sa forme,

Sincère hommage ou tendre aveu, 

De ces cartons le tas énorme 

A son destin marqué: le Feu…


Un avenir bien plus durable 

Est réservé seul aux cadeaux

Ils font trouver un fat aimable…

S'il a su choisir les plus beaux


 

Rogues de Fursac (J.) Les écrits et les dessins dans les maladies mentales et nerveuses, Masson, 1905. (Cité par Frédéric Gros dans Création et folie PUF 1997 page 46)

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